Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 20NC00334 le 7 février 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 août 2019 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de renouveler son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt, le cas échéant, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Il soutient que :
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi :
- ces décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;
S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- ni sa durée de présence sur le territoire français, ni la nature et l'ancienneté de ses liens en France n'ont été pris en compte ; il n'a jamais fait l'objet d'autres obligations de quitter le territoire français et ne représente pas une menace pour l'ordre public ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision en date du 23 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Goujon-Fischer premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant kosovar, est entré sur le territoire français, selon ses déclarations, en novembre 2016. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 juillet 2019. Par arrêté du 28 août 2019, le préfet de la Moselle a refusé de renouveler l'attestation de demande d'asile dont il était titulaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 11 octobre 2019, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté 28 août 2019 :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France en 2016, à l'âge de 22 ans. S'il allègue vivre en concubinage depuis 2018 avec une compatriote, titulaire d'une carte de séjour temporaire, et contribuer effectivement à l'entretien et l'éducation de l'enfant née de leur relation le 20 décembre 2017, il ressort toutefois des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment du caractère récent de son entrée en France à la date de l'arrêté contesté, et alors que rien ne faisait obstacle à ce que M. B... retourne dans son pays d'origine avec sa compagne et leur enfant, ni l'obligation de quitter le territoire français, ni, en tout état de cause, la décision fixant le pays de renvoi n'ont porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ces mesures ont été prises, ni ne sont contraires à l'intérêt de l'enfant. Dès lors, ces décisions n'ont méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin a fait à M. B... interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, sur le fondement des dispositions des quatrième et huitième alinéas du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, selon lesquels, en dehors du cas où aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, " l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".
4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait assorti l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an sans examen préalable de la durée de séjour et des liens de M. B... avec la France, en particulier de sa situation personnelle et familiale en France. Il ressort en revanche des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, M. B... ne justifiait que d'une durée brève de présence en France. En outre, ses liens avec la France se limitaient à sa compagne, titulaire d'un titre de séjour, et à leur enfant, avec lesquels il lui est possible de retourner dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, et alors même que l'intéressé n'avait pas fait l'objet antérieurement d'une mesure d'éloignement et ne constituait pas une menace à l'ordre public, le préfet n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 511-1, citées au point 3, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
5. En second lieu, il y a lieu d'écarter, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 2, les moyens tirés, à l'encontre de l'interdiction de retour sur le territoire français, de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
6. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B....
Sur les frais liés à l'instance :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 20NC00334