Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 18 février 2021, sous le n° 21NC00462, M. L... C..., représenté par Me David, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 2100071 et 2100072 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 19 janvier 2021 en tant qu'il rejette ses demandes ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Haut-Rhin du 5 janvier 2021 le concernant ;
3°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre et de mettre fin à son assignation à résidence en application des dispositions, alors en vigueur, du second alinéa de l'article L. 743-3 et du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard, de lui délivrer une attestation de demande d'asile et de lui restituer son document d'identité ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement de première instance est entaché d'irrégularité pour insuffisance de motivation, dès lors que le magistrat désigné n'a pas répondu aux moyens tirés respectivement de l'incompétence de la signataire des décisions portant rétention du document d'identité, de ce que le préfet du Haut-Rhin ne pouvait légalement prévoir le renouvellement tacite de ses assignations à résidence et du défaut de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français ;
- le jugement de première instance est également entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne fait pas mention de son mémoire complémentaire produit le 12 janvier 2021 et qu'il ne vise pas l'ensemble des textes sur lesquels le magistrat désigné s'est fondé pour rendre son jugement et, en particulier, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme te des libertés fondamentales ;
- le jugement de première instance est encore entaché d'irrégularité dès lors que le magistrat désigné, pour répondre au moyen tiré de l'erreur d'appréciation, dont est entachée l'interdiction de retour prise à son encontre, s'est fondé sur les dispositions, alors en vigueur, du sixième alinéa du troisième paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'étaient pas applicables au présent litige.
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- la décision en litige est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet du Haut-Rhin s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer une mesure d'éloignement à la suite du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de sa demande d'asile ;
- le préfet du Haut-Rhin n'a pas tenu compte des éléments qu'il a fournis et des nombreuses pièces qui viennent accréditer le bien-fondé de sa demande d'asile ;
- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant fixation du pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant assignation à résidence est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle prévoit que le renouvellement de son assignation à résidence se fera de manière tacite ;
- elle n'est pas justifiée dans son principe et dans sa durée et porte une atteinte disproportionnée à sa liberté d'aller et de venir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mai 2021.
II. Par une requête, enregistrée le 18 février 2021, sous le n° 21NC00463, Mme E... C..., née A..., représentée par Me David, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100071 et 2100072 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 19 janvier 2021 en tant qu'il rejette ses demandes ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Haut-Rhin du 5 janvier 2021 la concernant ;
3°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre et de mettre fin à son assignation à résidence en application des dispositions, alors en vigueur, du second alinéa de l'article L. 743-3 et du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard, de lui délivrer une attestation de demande d'asile et de lui restituer son document d'identité ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement de première instance est entaché d'irrégularité pour insuffisance de motivation, dès lors que le magistrat désigné n'a pas répondu aux moyens tirés respectivement de l'incompétence de la signataire des décisions portant rétention du document d'identité, de ce que le préfet du Haut-Rhin ne pouvait légalement prévoir le renouvellement tacite de ses assignations à résidence et du défaut de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français ;
- le jugement de première instance est également entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne fait pas mention de son mémoire complémentaire reçu le 12 janvier 2021 et qu'il ne vise pas l'ensemble des textes sur lesquels le magistrat désigné s'est fondé pour rendre son jugement et, en particulier, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme te des libertés fondamentales ;
- le jugement de première instance est encore entaché d'irrégularité dès lors que le magistrat désigné, pour répondre au moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont est entachée l'interdiction de retour prise à son encontre, s'est fondé sur les dispositions, alors en vigueur, du sixième alinéa du troisième paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'étaient pas applicables au présent litige.
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- la décision en litige est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet du Haut-Rhin s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer une mesure d'éloignement à la suite du rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de sa demande d'asile ;
- le préfet du Haut-Rhin n'a pas tenu compte des éléments qu'elle a fournis et des nombreuses pièces qui viennent accréditer le bien-fondé de sa demande d'asile ;
- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant fixation du pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant assignation à résidence est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle prévoit que le renouvellement de son assignation à résidence se fera de manière tacite ;
- elle n'est pas justifiée dans son principe et dans sa durée et porte une atteinte disproportionnée à sa liberté d'aller et de venir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mai 2021.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Meisse, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes nos 21NC00462 et 21NC00463, présentées pour M. L... C... et pour Mme E... C..., née A..., concernent la situation d'un couple d'étrangers au regard de leur droit au séjour en France. Elles soulèvent des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. et Mme C... sont des ressortissants kosovars, nés respectivement les 20 juillet 1986 et 3 septembre 1993. Ils ont déclaré être entrés irrégulièrement en France le 22 février 2020, accompagné de leur fils mineur, né le 19 septembre 2017. Examinées dans le cadre de la procédure accélérée en application des dispositions, alors en vigueur, du 1° du premier paragraphe de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 20 novembre 2020. Estimant que les intéressés ne bénéficiaient plus du droit de se maintenir sur le territoire français, conformément aux dispositions, alors en vigueur, du 7° du premier alinéa de l'article L. 743-2 du même code, le préfet du Haut-Rhin, par quatre arrêtés du 5 janvier 2021, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de leur éventuelle reconduite d'office à la frontière, leur a interdit le retour sur le territoire français pendant un an, leur a fait obligation de remettre leur passeport ou toute pièce d'identité en échange un récépissé valant justification d'identité et, enfin, les a assignés à résidence dans le département. M. et Mme C... ont, chacun, saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation des arrêtés les concernant. Ils ont également sollicité, à titre subsidiaire, la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement prise à leur encontre et la fin de leur assignation en application des dispositions, alors en vigueur, du second alinéa de l'article L. 743-3 et du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du même code. Les requérants relèvent appel du jugement nos 2100071 et 2100072 du 19 janvier 2021 qui rejette l'ensemble de leurs demandes.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...). / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. / (...) ".
4. D'une part, si M. et Mme C... font valoir que le magistrat désigné a, en méconnaissance des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, omis de viser le mémoire en réplique reçu le 12 janvier 2021, qu'ils avaient présenté chacun dans l'instance, une telle circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à vicier la régularité du jugement attaqué dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les écritures en cause n'apportaient aucun élément nouveau auquel il n'aurait pas été répondu dans les motifs du jugement. D'autre part, si le jugement attaqué ne vise pas la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ses stipulations, dont le magistrat désigné a fait application, y sont mentionnées dans ses motifs. Dès lors, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que le jugement ne respecte pas les dispositions précitées.
5. En deuxième lieu, la circonstance que le magistrat désigné s'est fondé, au point 16 de son jugement, sur les dispositions, alors en vigueur, du sixième alinéa du troisième paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas applicables à la situation de M. et de Mme C..., lesquels relèvent du quatrième alinéa de ce même paragraphe, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.
6. En troisième lieu, il ressort du jugement attaqué que le magistrat désigné a suffisamment répondu, aux points 5 et 6, aux moyens tirés respectivement de l'incompétence du signataire des décisions en litige et du défaut de motivation des mesures d'éloignement contestées. Les circonstances que Mme K... F... ne serait pas signataire des décisions portant rétention du document d'identité, et que les décisions portant obligation de quitter le territoire français ont omis de mentionner l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés relèvent du bien-fondé du jugement et s'avèrent sans incidence sur sa régularité.
7. En quatrième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que, à l'appui de leur demande respective, M. et Mme C... soutenaient notamment que les décisions du 5 janvier 2021, par lesquelles le préfet du Haut-Rhin les a assignés à résidence, sont entachées d'une erreur de droit en qu'elles prévoient le renouvellement tacite de leur assignation à l'issue d'une première période de quarante-cinq jours. Le magistrat désigné ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, le jugement de première instance est entaché d'irrégularité et doit être annulé en tant qu'il ne s'est pas prononcé sur le moyen en cause. Il y a lieu, en conséquence, de statuer, par la voie de l'évocation sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du 5 janvier 2021 portant assignation à résidence et, par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions de la requête.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, alors en vigueur, " la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée ". Contrairement aux allégations de M. et de Mme C..., les décisions en litige énoncent, dans leurs visas et motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Alors même qu'elles ne mentionnent pas l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951, ni n'explicitent les raisons pour lesquelles le Kosovo est considéré commun un pays d'origine sûr ou encore les éléments sur lesquels le préfet s'est fondé pour conclure à l'absence de risque de mauvais traitements en cas de retour au Kosovo, elles sont suffisamment motivées au regard des exigences du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.
9. En deuxième lieu, il ne ressort ni des motifs des décisions en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet aurait omis de procéder à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M. et de Mme C... et qu'il n'aurait pas pris en considération les éléments produits par les intéressés à l'appui de leurs demandes d'asile.
10. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Haut-Rhin s'est estimé à tort en situation de compétence de liée pour prendre à l'encontre des requérants une mesure d'éloignement à la suite des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 20 novembre 2020 rejetant leur demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
11. En quatrième lieu, M. et Mme C... ne sauraient utilement invoquer une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour contester la légalité des obligations de quitter le territoire français prises à leur encontre, de telles mesures d'éloignement n'impliquant pas, par elles-mêmes, un renvoi des intéressés au Kosovo. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.
12. En cinquième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... ne sont arrivés en France que le 22 février 2020. Ils n'y justifient d'aucune intégration particulière et n'établissent pas être isolés dans leur pays d'origine. Si M. C... fait valoir que deux sœurs à lui résident également en France, la présence de la première n'est pas établie et la seconde, en situation irrégulière, a déjà fait l'objet de trois obligations de quitter le territoire français auxquelles elle n'a pas déféré. Les circonstances que leur second fils est né en France le 4 décembre 2020 et que M. C... y suit un traitement médical ne suffisent pas à faire obstacle à l'éloignement des requérants. Enfin, rien ne s'oppose à ce que les intéressés reconstituent leur cellule familiale au Kosovo. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre les décisions portant fixation du pays de destination :
13. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Si les requérants font valoir qu'ils ont été victimes au Kosovo de menaces et de violences de la part d'un usurier auprès duquel M. C... a emprunté une somme d'argent, ils n'établissent pas, par les éléments versés au dossier, qu'ils risqueraient d'être exposés, en cas de retour dans leur pays d'origine, à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations en cause ne peut être accueilli.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre les décisions portant assignation à résidence :
14. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que les décisions en litige seraient illégales en raison de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français.
15. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les décisions en litige ont été signées, " pour le préfet et par délégation " par Mme K... F..., cheffe du bureau de l'asile et de l'éloignement à la préfecture du Haut-Rhin. Or, par un arrêté du 1er octobre 2020, régulièrement publié le même jour au recueil n° 84 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Haut-Rhin a consenti à l'intéressée une délégation de signature à l'effet de signer notamment les " assignations à résidences des étrangers en situation irrégulière, leurs renouvellements et leurs confirmations ". Si l'exercice de la compétence ainsi déléguée à Mme F... est subordonnée à l'absence ou à l'empêchement simultané de M. G... H..., directeur de la réglementation, de M. J... I..., chef du service de l'immigration et de l'intégration, et de Mme D... B..., adjointe au chef du service de l'immigration et de l'intégration, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle condition n'était pas remplie en l'espèce. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des décisions en litige manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.
16. En troisième lieu, les décisions en litige énoncent, dans leurs visas et motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elles sont suffisamment motivées au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.
17. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, spécialement des motifs des décisions en litige, que l'assignation à résidence de M. et Mme C... a pour objet de permettre au préfet du Haut-Rhin de s'assurer de la présence des intéressés dans le département aux fins du traitement rapide et du suivi efficace de leur demande d'asile. Il est constant, en outre, que M. et Mme C... ne bénéficient plus du droit de se maintenir sur le territoire français, conformément aux dispositions, alors en vigueur, du 7° du premier alinéa de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'ils font tous deux l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, à supposer même que les intéressés se soient toujours maintenus sur leur lieu de résidence et qu'ils aient toujours répondu aux convocations de l'administration, ils ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige ne seraient pas justifiées.
18. En cinquième lieu, aux termes du cinquième alinéa de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative peut également, aux fins de préparation du départ de l'étranger, lui désigner, en tenant compte des impératifs de la vie privée et familiale, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside, dans la limite de trois heures consécutives par période de vingt-quatre heures. (...) ". En se bornant à faire valoir qu'ils ont un enfant en bas-âge et qu'ils sont soumis, comme le reste de la population, à des mesures de couvre-feu dans le cadre de la lutte contre la Covid-19, M. et Mme C... ne démontrent pas que l'obligation, qui leur est faite en application des dispositions précitées, d'être présents sur leur lieu de résidence du lundi au vendredi de 9 heures à 11 heures porterait une atteinte disproportionnée à leur liberté d'aller et de venir.
19. En sixième lieu, aux termes du premier alinéa du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Lorsque le droit au maintien de l'étranger a pris fin en application du 4° bis ou du 7° de l'article L. 743-2 et qu'une obligation de quitter le territoire français a été prise à son encontre, l'autorité administrative peut, aux fins du traitement rapide et du suivi efficace de sa demande d'asile, l'assigner à résidence selon les modalités prévues aux trois derniers alinéas de l'article L. 561-1, pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable une fois. (...). ".
20. En application de ces dispositions, le préfet a pu légalement fixer à 45 jours la durée de la période initiale d'assignation à résidence des requérants. En revanche, il résulte de ces dispositions que le renouvellement de cette période initiale de 45 jours nécessite une décision expresse, prise au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de son édiction. Par suite, en tant qu'elles prévoient le renouvellement tacite de cette période initiale de 45 jours, les décisions contestées sont entachées d'une erreur de droit.
Sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français et à ce qu'il soit mis fin aux assignations à résidence :
21. Aux termes du second alinéa de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. ". Aux termes du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du même code, alors en vigueur : " Lorsque le juge administratif saisi d'une demande de suspension d'exécution de la mesure d'éloignement en application des articles L. 743-3 et L. 743-4 fait droit à cette demande, il est mis fin à l'assignation à résidence ou à la rétention de l'étranger, sauf lorsque l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision de rejet et que la demande d'asile de l'intéressé relève du 5° du III de l'article L. 723-2. ".
22. En l'absence d'éléments sérieux de nature à justifier, au titre de leurs demandes d'asile respectives, le maintien de M. et de Mme C... sur le territoire français durant l'examen de leur recours par la Cour nationale du droit d'asile, leurs conclusions tendant à la suspension de l'exécution des décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles tendant à ce qu'il soit mis fin à leur assignation à résidence.
23. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à demander l'annulation des décisions du préfet du Haut-Rhin du 5 janvier 2021 portant assignation de résidence en tant qu'elles prévoient le renouvellement tacite de leur assignation à résidence. Par suite, les intéressés ne sont pas fondés à solliciter la suspension de l'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français et la fin des mesures d'assignation à résidence qu'ils comportent, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
24. Le présent arrêt n'appelant pas de mesures d'exécution, les conclusions de M. et Mme C... aux fins fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
25. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat les sommes réclames par M. et Mme C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement nos 2100071 et 2100072 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 19 janvier 2021 est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions de M. et Mme C... dirigées contre les décisions du 5 janvier 2021 portant assignation à résidence.
Article 2 : Les décisions du 5 janvier 2021 portant assignation à résidence sont annulées en tant qu'elles prévoient le renouvellement tacite de l'assignation à résidence de M. et de Mme C....
Article 3 : Le surplus des conclusions des demandes présentées devant le tribunal et des requêtes est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... C..., à Mme E... C..., née A..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
N° 21NC00462-21NC00463 3