1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 1er mars 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 21 janvier 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 eu égard à la relation amoureuse qu'il entretien avec une ressortissante française ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle et familiale eu égard à l'imminence de son mariage ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale eu égard à l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à ses observations présentées en première instance.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 14 mai 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... F..., ressortissant algérien, né le 13 décembre 1988, est entré en France le 24 novembre 2018, sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 1er janvier 2019. Interpellé en Allemagne le 19 janvier 2019 alors qu'il circulait à bord d'un bus assurant la liaison Strasbourg-Bruxelles, il a été remis par les autorités allemandes aux services de la police aux frontières de Forbach (Moselle), le 21 janvier suivant. Le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, par arrêté du 21 janvier 2019, pris sur le fondement du 2° de l'article L. 511-1-l du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. F... fait appel du jugement du 1er mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur l'arrêté pris dans son ensemble :
2. Le préfet de la Moselle a, par un arrêté du 19 décembre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, donné délégation à Mme G... C..., directrice du service de l'immigration et de l'intégration de la préfecture et, en cas d'absence ou d'empêchement de celle-ci, à M. B... E..., chef du bureau de l'éloignement et de l'asile, pour signer l'ensemble des actes relevant de sa direction à l'exclusion des arrêtés prononçant l'expulsion d'un étranger en application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... n'aurait pas été absente ou empêchée à la date de signature de l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de M. E..., signataire de l'arrêté contesté, doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. F... était célibataire et sans enfant à la date de la décision contestée, et que s'il soutient qu'il entretenait alors une relation amoureuse avec une ressortissante française qu'il a finalement épousée le 27 avril 2019, il est constant qu'il n'a jamais sollicité de titre de séjour sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et il n'établit pas la réalité d'une vie commune à la date de la décision contestée. De plus, l'intéressé n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où vivent notamment ses parents, selon ses propres déclarations. N'établissant pas ainsi remplir les conditions d'obtention de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, le moyen tiré de ce qu'il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français au regard de son droit au séjour doit être écarté.
5. En second lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...). ".
6. Compte tenu de ce qui a été indiqué au point 4 du présent arrêt, M. F... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations précitées ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation des conséquences eu égard à l'imminence de son mariage.
Sur la décision fixant le pays d'éloignement :
7. En premier lieu, eu égard à ce qui précède, le moyen tiré par le requérant de l'illégalité, invoquée par la voie de l'exception, de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, doit être écarté.
8. En second lieu, eu égard à ce qui a été indiqué au point 4 ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 21 janvier 2019. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées, par voie de conséquence.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. F... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
N° 19NC01836 2