Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 20NC00192 le 22 janvier 2020, Mme E... B..., épouse C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 septembre 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Moselle du 5 avril 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai déterminé et au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision de refus de séjour :
- les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues, faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour ;
- les stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien ont été méconnues ;
- le refus de titre de séjour emporte pour sa situation personnelle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, révélatrices d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- l'illégalité du refus de séjour emporte celle de l'obligation de quitter le territoire ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen préalable et particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'elle encourt un risque de mise au ban en cas de retour en Algérie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 16 juillet 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 14 août 2020.
Mme B..., épouse C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 14 janvier 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E... B..., épouse C..., ressortissante algérienne, est entrée en France le 10 janvier 2017, à l'âge de 34 ans. Après avoir sollicité en vain un titre de séjour en qualité de conjointe de Français et fait l'objet d'une mesure d'éloignement, devenue définitive, le 29 mai 2017, elle a sollicité son admission au séjour à titre exceptionnel. Le 5 avril 2019, le préfet de la Moselle a pris à son encontre un arrêté refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Mme B..., épouse C... fait appel du jugement du 27 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement toutes les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou des ressortissants algériens qui remplissent effectivement les conditions des articles de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ayant une portée équivalente à celle de ces articles, auxquels il envisage de refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions
4. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée a été prise suite à la demande présentée le 10 juillet 2018 par Mme B..., épouse C..., tendant à bénéficier d'un droit au séjour à titre exceptionnel, et non sur le fondement des stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait dû saisie la commission du titre de séjour.
5. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit plus haut, Mme B..., épouse C... avait sollicité son admission au séjour à titre exceptionnel, et non sur le fondement des stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968. Par suite, et alors que, par ailleurs, le divorce de M. et Mme C... a été prononcé en Algérie le 16 mars 2017 et que la requérante n'établit pas ni même n'allègue l'existence d'une communauté de vie avec son ex-époux de nationalité française, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté comme inopérant.
6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., épouse C... est entrée en France le 10 janvier 2017, à l'âge de 34 ans. Elle ne résidait ainsi sur le territoire français que depuis un peu plus de deux ans, à la date de l'arrêté préfectoral contesté. En outre, la durée de sa présence sur le territoire français s'explique en partie par les démarches vaines qu'elle avait entreprises pour obtenir d'abord un titre de séjour en qualité de conjointe de Français et par le fait qu'elle n'avait pas exécuté une précédente mesures d'éloignement en date du 29 mai 2017. De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à son arrivée récente en France. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit plus haut, le divorce de M. et Mme C... a été prononcé le 16 mars 2017 et la requérante n'établit pas ni même n'allègue l'existence d'une communauté de vie avec son ex-époux. Par suite, nonobstant la circonstance que le divorce n'a pas fait l'objet d'une transcription sur les registres de l'état civil français, Mme B..., épouse C..., divorcée et sans enfant à charge, n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée emporte pour sa situation personnelle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et est ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme B..., épouse C... n'est pas fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision refusant de lui accorder un titre de séjour, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire.
8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle n'aurait pas procédé à l'examen de la situation particulière de Mme B..., épouse C..., avant de l'obliger à quitter le territoire français. Par suite, et alors que la requérante n'établit pas être au nombre des ressortissants étrangers susceptibles de bénéficier des dispositions protectrices de l'article L. 511-4-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le moyen tiré de ce que préfet n'aurait pas procédé à un tel examen doit être écarté.
9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt, Mme B..., épouse C... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité de la décision fixant le pays d'éloignement :
10. En premier lieu, la décision contestée, qui vise notamment l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et précise que l'intéressée n'a pas justifié être exposée à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Algérie, comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté.
11. En deuxième lieu, si la requérante, qui n'a jamais sollicité le statut de réfugié, affirme qu'elle encourt un risque de mise au ban en cas de retour en Algérie, elle ne l'établit pas par les pièces qu'elle produit. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B..., épouse C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 5 avril 2019. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai déterminé et au besoin sous astreinte doivent être rejetées, par voie de conséquence.
Sur les frais liés à l'instance :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
14. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de Mme B..., épouse C... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... B..., épouse C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 20NC00192