Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 septembre 2014, MmeD..., représentée par Me C... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301811-1401943 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 juillet 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 8 mars 2013 et l'arrêté du préfet de la Moselle du 10 mars 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résident d'un an, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme D...soutient que :
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de son fils qui ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et ne pourra pas poursuivre une scolarité ;
- les décisions contestées méconnaissent les paragraphes 5 et 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ainsi que les articles 3 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 février 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que l'ensemble des moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Steinmetz-Schies a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., ressortissante algérienne, née le 23 septembre 1974, est entrée en France le 15 décembre 2012 sous couvert d'un passeport muni d'un visa de court séjour, d'une durée de trente jours avec entrées multiples, valable jusqu'au 10 mai 2013. Le 22 janvier 2013, elle a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence ou, à titre subsidiaire, d'une autorisation provisoire de séjour en raison des soins nécessités par l'état de santé de son fils, Mohamed. Par une décision du 8 mars 2013, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande. Mme D...a sollicité le 20 novembre 2013 le réexamen de sa demande. Par arrêté du 10 mars 2014, le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Mme D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 mars 2013 et de l'arrêté du 10 mars 2014.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un certificat de résident à un ressortissant algérien qui se prévaut de ces stipulations, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
4. Il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé a émis un avis daté du 23 janvier 2014 selon lequel l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que cet enfant peut effectivement avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine, l'Algérie, vers lequel son état de santé lui permet de voyager sans risque, accompagné par un membre de sa famille. Si Mme D...soutient que son fils, né en 2007, autiste, est atteint de troubles du comportement, d'un retard du langage, de troubles relationnels, qu'il ne peut bénéficier de soins appropriés en Algérie faute d'établissements spécialisés pour les autistes et ne peut poursuivre une scolarité adaptée, les certificats médicaux produits par l'intéressée qui ne sont pas circonstanciés en ce qui concerne la possibilité d'accéder aux soins en Algérie, ne lui permettent pas de contredire sérieusement l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé. Par ailleurs, elle n'apporte aucun élément en appel qui permettrait de remettre en cause l'appréciation, qu'il y a lieu d'adopter, portée par les premiers juges. Il s'ensuit que la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au regard de l'état de santé de son fils, le préfet de la Moselle a méconnu les stipulations des points 5 et 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.
5. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 9 de la même convention : " Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
6. Il ressort des pièces du dossier que le fils de la requérante était, antérieurement à son arrivée en France, suivi au centre psychopédagogique pour enfants inadaptés mentaux de Sidi Ali, qu'il bénéficiait de soins de rééducation orthophonique. Par suite, MmeD..., qui fait état de difficultés financières pour la prise en charge de son enfant sans d'ailleurs les établir, ne démontre pas plus en appel qu'en première instance que le préfet n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur de l'enfant en prenant les décisions contestées et qu'il aurait commis une erreur de droit. Par ailleurs, l'arrêté préfectoral contesté n'implique pas que le fils de Mme D...devrait être séparé de cette dernière. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 et du paragraphe 1 de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme représentative des frais de procédure soit, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative ou 37 de la loi du 10 juillet 1991, mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...épouse D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 14NC01900