Par une décision n° 359844 du 14 novembre 2014, le Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Nancy l'appel formé par M. C...contre ce jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 31 mai, 27 août, 28 novembre 2012 et 31 octobre 2014, M. C..., représenté par la SCP Yves Richard, demande :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1105971 du 26 mars 2012 du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler la décision contestée du préfet du Bas-Rhin ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est dépourvue de motifs et ne répond pas au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du récépissé de déclaration de travaux ainsi qu'au moyen tiré de l'atteinte à l'environnement ;
- c'est à tort que le vice-président du tribunal administratif a statué sur le fondement de l'article R. 221-1 du code de justice administrative et considéré que la demande de première instance ne comportait pas de moyen de fond ou que le moyen était dépourvu de précision ;
- le récépissé est entaché d'incompétence ;
- la non-opposition méconnaît l'article L. 211-1 du code de l'environnement, ce qui démontre l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2014 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée n'a pas omis de répondre à un moyen ;
- il appartenait à M. C...d'établir devant le tribunal administratif une illégalité au regard du 2ème alinéa du II de l'article L. 214-3 du code de l'environnement ;
- l'auteur de la décision avait reçu une délégation régulière ;
- le requérant ne démontre pas en quoi les travaux déclarés par l'entreprise Schatt sont de nature à augmenter les risques d'inondations.
Par un mémoire enregistré le 22 juillet 2015, la SARL Entreprise Schatt conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le moyen tiré de l'incompétence n'est pas fondé et manque en fait ;
- il n'est pas démontré en quoi la décision contestée augmenterait les risques d'inondations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- Vu le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 29 avril 2011, la SARL entreprise Schatt a déposé auprès de la préfecture du Bas-Rhin, en application du II de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, un dossier de déclaration concernant la réalisation d'un passage busé sur le cours d'eau l'Altbach à Mackenheim. M.C..., exploitant agricole qui habite et possède des terres à proximité du projet, interjette appel de l'ordonnance du 26 mars 2012 par laquelle le vice-président du tribunal administratif a rejeté sa demande dirigée contre la décision implicite par laquelle le préfet du Bas-Rhin ne s'est pas opposé à la déclaration de travaux déposée par la société Schatt.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de régularité :
2. Aux termes de l'article R. 221-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ".
3. Pour rejeter par ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 221-1 du code de justice administrative, le vice-président du tribunal administratif de Strasbourg s'est notamment fondé sur la circonstance qu'à l'appui du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, M. C... se bornait à affirmer que les travaux déclarés accroissaient les risques d'inondations et qu'en l'absence de toute référence aux règles de droit qui auraient été méconnues, un tel moyen était dépourvu des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Toutefois, la demande de première instance comportait des précisions de fait sur les motifs pour lesquels M. C...craignait un accroissement des risques d'inondations, était accompagnée du recours gracieux présenté par l'intéressé le 22 août 2011 qui mentionnait que l'autorisation délivrée en application de l'article L. 214-3 du code de l'environnement comportait une atteinte aux intérêts figurant à l'article L. 211-1 du même code et était accompagnée de procès-verbaux de constats d'huissier et de photographies et cartes relatifs à la situation des lieux. Dans ces conditions, c'est à tort que les moyens présentés par M. C... ont été regardés comme n'étant assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou n'étaient manifestement pas assortis de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. En conséquence, l'ordonnance attaquée doit être annulée.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Strasbourg.
5. D'une part, le moyen tiré de ce que l'administration ne démontre pas que l'auteur du récépissé, ayant fait naître la décision de non-opposition contestée, ne disposait pas d'une délégation de signature régulière manque, en tout état de cause, en fait, dès lors qu'il résulte de l'instruction que, par arrêté du 14 mars 2011 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du 15 mars 2011, le préfet du Bas-Rhin a délégué sa signature à M.B..., directeur départemental des territoires, qui a régulièrement subdélégué sa signature à M. A..., chef du service de l'environnement signataire du récépissé litigieux, par décision du 30 mars 2011 publiée au recueil le 1er avril 2011.
6. D'autre part, aux termes de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : " I. Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de (...) de nuire au libre écoulement des eaux (...) d'accroître notablement le risque d'inondation (...) / Les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 211-1, les moyens de surveillance, les modalités des contrôles techniques et les moyens d'intervention en cas d'incident ou d'accident sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des actes complémentaires pris postérieurement. (...) / II.- Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. (...) / Si le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 n'est pas assuré par l'exécution des prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3, l'autorité administrative peut, à tout moment, imposer par arrêté toutes prescriptions particulières nécessaires ". L'article L. 211-1 du code de l'environnement dans sa rédaction alors en vigueur mentionnait la prévention des inondations parmi les éléments à prendre en compte.
7. M. C...fait valoir, en produisant notamment des constats d'huissier et photographies des lieux, que la pose de buse d'1,5 mètres dans le lit mineur de la rivière, large de 3 mètres à cet endroit, est de nature à rétrécir le cours d'eau, que des déchets peuvent être bloqués dans les buses et les boucher et qu'un barrage provisoire situé en amont du cours d'eau comporte des risques d'aggravation d'inondations qui seraient préjudiciables à ses installations électriques situées au ras de sol, reliées notamment à des panneaux photovoltaïques situés sur un hangar agricole. Cependant, il résulte de l'instruction que le débit de l'Altbach est réglé par des ouvrages adaptés et qu'après une visite sur place et une étude de la situation et du dossier de déclaration, un agent de l'Office national de l'eau et des milieux hydrauliques a émis un avis favorable au projet, compte tenu des modalités prévues pour les travaux de pose d'une buse d'une longueur de 9 mètres, de la configuration des lieux et du respect de conditions nécessaires à la protection de la faune et de la flore. Ainsi, la réalité des risques d'aggravation d'inondations ne résulte pas des pièces du dossier. Dans ces conditions, M C...n'est pas fondé à soutenir que la non-opposition à la déclaration méconnaît les articles L. 211-1 et suivants du code de l'environnement ou qu'une autorisation aurait été nécessaire.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le paiement d'une somme à la société entreprise Schatt à ce titre.
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance attaquée du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. C...et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de la SARL entreprise Schatt relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C..., au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à la SARL entreprise Schatt.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 14NC02154