Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 27 avril 2018 sous le numéro 18NC01342, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 mars 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du préfet du Bas-Rhin du 5 janvier 2018 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision du préfet du Bas-Rhin du 5 janvier 2018 portant obligation de quitter le territoire français ;
5°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'est pas motivé ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur sa situation personnelle et familiale ;
En ce qui concerne la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :
- l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour entraîne l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
- il ne peut voyager sans risque ;
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision attaquée méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision lui faisant obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle et familiale.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par ordonnance du 19 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 20 décembre 2018.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 19 juin 2018.
II. Par une requête enregistrée le 27 avril 2018 sous le numéro 18NC01344, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) de prononcer, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 mars 2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B...soutient que :
- l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens de sa requête au principal paraissent sérieux.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par ordonnance du 19 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 20 décembre 2018.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 19 juin 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Laubriat, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par la requête enregistrée sous le numéro 18NC01342, M.B..., ressortissant algérien, fait appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Il demande également le sursis à exécution de ce jugement par la requête enregistrée sous le numéro 18NC01344.
Sur la requête n° 18NC01342 :
En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision du 5 janvier 2018 vise les articles 6-7 de l'accord franco-algérien et L. 511-1 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique la date et les conditions d'entrée du requérant sur le territoire français ainsi que les éléments de sa situation personnelle, précise la nature du titre de séjour qu'il a sollicité et s'approprie les termes de l'avis émis par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). La décision attaquée comporte ainsi l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui la fondent et est, par suite, suffisamment motivée au regard des dispositions des articles L. 211.2 et suivants du code des relations entre le public et l'administration.
3. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 5 janvier 2018 que le préfet du Bas-Rhin a, contrairement aux affirmations de M.B..., procédé à un examen particulier de sa situation avant de décider de lui refuser la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificat de résidence formées par les ressortissants algériens sur le fondement des stipulations précitées : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". L'article 6 de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016 dispose : " Au vu du rapport médical (...), un collège de médecins désigné pour chaque dossier (...) émet un avis (...) précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) ". Il appartient ainsi au collège de médecins de l'OFII, tout en respectant le secret médical, de donner au préfet les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer sa décision.
5. Dans son avis émis le 7 septembre 2017, le collège de médecins de l'OFII a estimé que si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine à destination duquel il peut voyager sans risque. L'avis émis le 7 septembre 2017 par le collège de médecins de l'OFII comporte ainsi toutes les mentions requises par l'arrêté du 27 décembre 2016 et est, par suite, suffisamment motivé.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Le présent code régit l'entrée et le séjour des étrangers en France métropolitaine, (...). Il régit l'exercice du droit d'asile sur l'ensemble du territoire de la République. Ses dispositions s'appliquent sous réserve des conventions internationales. (...) ". L'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, publié au Journal officiel du 22 mars 1969 en vertu du décret du 18 mars 1969, régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, et les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'établir en France. Il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent à cet égard des règles fixées par l'accord précité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision du 5 janvier 2018 par laquelle préfet du Bas-Rhin a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. B...méconnaitraît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est, comme l'a fait valoir le tribunal administratif, inopérant.
7. En cinquième lieu, M. B...se prévaut d'un certificat émis le 22 janvier 2018 par son psychiatre traitant pour soutenir que le traitement approprié à son état de santé n'est pas disponible en Algérie et que l'aggravation de son état de santé depuis un an lui interdit en tout état de cause de voyager. Toutefois, M.B..., qui ne précise pas la nature du traitement dont il bénéficie, ne fournit aucune pièce de nature à établir que ledit traitement est indisponible en Algérie. Dans ces conditions, le certificat médical émis le 22 janvier 2018 ne saurait suffire pour contredire l'avis émis seulement cinq mois plus tôt par le collège de médecins de l'OFII selon lequel si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine à destination duquel il peut voyager sans risque. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur sa situation personnelle.
8. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré sur le territoire français le 12 novembre 2015. A la date de l'arrêté contesté, il ne séjournait donc sur le territoire français que depuis un peu plus de deux ans. M. B...est célibataire et sans enfant. S'il est constant que son frère et deux de ses soeurs résident en France, ses parents et sa troisième soeur vivent toujours en Algérie, pays où lui-même a vécu plus de 25 ans. Dans ces conditions, la décision du 5 janvier 2018 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé à M. B...un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, M. B...n'établissant pas l'illégalité de la décision par laquelle le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, il n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
12. Il ressort de l'avis émis le 7 septembre 2017 par le collège de médecins de l'OFII que si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine à destination duquel il peut voyager sans risque. M.B..., qui ne contredit pas utilement cet avis, n'est par suite pas fondé à soutenir que la décision du 5 janvier 2018 par laquelle le préfet du Bas-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français méconnaitraît les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
13. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision obligeant M. B...à quitter le territoire français sur la situation personnelle et familiale de ce dernier doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 9.
14. En dernier lieu, M. B...pouvant bénéficier en Algérie d'un traitement approprié à son état de santé, il n'est pas fondé à soutenir que l'exécution de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français l'exposerait à des traitements contraires aux articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur la requête n° 18NC01344 :
16. Le présent arrêt statue sur les conclusions de M. B...tendant à l'annulation du jugement n° 1800725 du tribunal administratif de Strasbourg du 27 mars 2018. Il n'y a, par suite, plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC01344 par lesquelles M. B...demandait à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 18NC01342 de M. B... est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 18NC01344 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement no 1800725 du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Strasbourg.
Article 3 : Les conclusions présentées en appel par M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC01342 - 18NC01344