Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mai 2018 et 23 janvier 2019, le Mouvement démocrate, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1600044 du 27 mars 2018 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler la décision contestée ;
3°) d'enjoindre au maire de Belfort de lui réaffecter le même local ou tout autre local ayant les mêmes caractéristiques, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune de Belfort à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le Mouvement démocrate soutient que :
- le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré du défaut de caractère exécutoire de la décision contestée ;
- le motif de la décision tenant au défaut de paiement de la redevance d'occupation est matériellement inexact ;
- la commune ne lui a pas, chaque année, adressé un titre de recettes à payer, et le titre de recettes global que celle-ci a établi à la fin de l'année 2014 ne lui a été régulièrement communiqué que le 3 novembre 2015 ;
- en l'absence de convention d'occupation, la commune ne peut pas lui opposer le manquement à une stipulation contractuelle fondant la résiliation de la mise à disposition du local ;
- son éviction est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 juillet 2018 et 5 février 2019, la commune de Belfort, représentée par le cabinet Richer et associés, conclut au rejet de la requête et à la condamnation du Mouvement démocrate à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Belfort soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques,
- le code général des collectivités territoriales,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la commune de Belfort.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 18 décembre 2015, le maire de la commune de Belfort a mis fin à la mise à la disposition d'un local dans le bâtiment dénommé Maison du Peuple, dont bénéficiait la section du Mouvement démocrate pour le Territoire de Belfort. Le Mouvement démocrate relève appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. Le requérant fait valoir que le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré du défaut de caractère exécutoire de la décision contestée. Toutefois, la légalité d'une décision s'appréciant, en excès de pouvoir, à la date à laquelle elle a été prise, le moyen tiré de ce que cette décision n'aurait pas été ultérieurement rendue exécutoire est inopérant. Dès lors, le tribunal, qui a analysé ce moyen dans les visas de son jugement, n'a pas entaché ce dernier d'irrégularité en s'abstenant d'y répondre expressément dans ses motifs.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : " Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations, syndicats ou partis politiques qui en font la demande. / Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. / Le conseil municipal fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation ".
4. Il ressort du jugement qu'après avoir jugé illégal le motif fondant la décision contestée, tiré de ce que la municipalité souhaitait affecter la salle à l'usage d'un autre groupe politique, le tribunal lui a substitué un autre motif, invoqué devant lui par la commune, tiré de ce que le Mouvement démocrate ne justifiait pas, à la date de cette décision, être à jour du paiement de la redevance à laquelle était subordonnée la mise à disposition du local en cause.
5. En premier lieu, le motif ainsi retenu, qui contrairement à ce que soutient le requérant, n'est pas lié à un manquement de sa part à une stipulation contractuelle, est de nature à justifier légalement l'abrogation d'une autorisation d'occupation du domaine public.
6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des propres écritures du Mouvement démocrate, qu'à la date de la décision contestée, ce dernier restait devoir à la commune de Belfort le montant des redevances d'occupation au titre des années 2011 et 2012. La circonstance, au demeurant non établie, qu'à la date de cette décision, le recouvrement de cette somme ne faisait plus l'objet d'un titre de recettes exécutoire est sans incidence sur la réalité de la dette. Et la légalité de la décision contestée s'appréciant, à la date à laquelle elle a été prise, le requérant ne peut pas non plus utilement faire valoir qu'il a réglé entièrement sa dette le 23 décembre 2015, avant que la décision ne lui soit notifiée et ne devienne exécutoire. Le Mouvement démocrate n'est ainsi pas fondé à soutenir que le motif substitué manque en fait.
7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier du bordereau de situation établi par la direction générale des finances publiques, qu'un titre de recettes a été émis le 22 novembre 2014 à l'encontre du Mouvement démocrate en vue du recouvrement du montant des redevances restant dues au titre des années 2009 à 2013. Le Mouvement démocrate soutient que la commune ne lui a jamais adressé de titre de recettes pour le recouvrement de ses redevances d'occupation et qu'il n'a pris connaissance des prétentions de cette dernière que par un courrier du 3 novembre 2015. Toutefois, il ressort du même bordereau que la direction générale des finances publiques lui a adressé une relance le 26 décembre 2014 et des mises en demeure les 25 février et 4 juin 2015, que le Mouvement démocrate ne conteste pas avoir reçues. Au demeurant, il ressort de ses propres écritures que le titre en cause a fait l'objet d'une annulation partielle le 27 juillet 2015 en ce qui concerne les redevances dues au titre des années 2009 et 2013, à la suite de vérifications effectuées conjointement par la commune et le Mouvement démocrate. Cette circonstance confirme que ce dernier, contrairement à ce qu'il soutient, était informé de l'existence de ce titre bien avant le 3 novembre 2015.
8. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la commune lui avait précédemment adressé, les 30 juin et 8 juillet 2015, en recommandé avec accusé de réception, deux lettres d'une teneur similaire à celle du 3 novembre 2015, lui réclamant le paiement de sa dette et l'informant de la fin de la mise à disposition de son local à compter du 31 août 2015, en raison de son retard à s'en acquitter. Même en ne tenant pas compte du premier de ces courriers, libellé à l'attention de M.B..., dont le requérant soutient qu'il n'est pas son représentant, il est constant que le courrier du 8 juillet 2015 a été envoyé à l'attention de M. Gruder, président de la section du Mouvement démocrate pour le Territoire de Belfort. Si le requérant fait valoir que ses locaux étaient fermés lorsque ce second courrier est arrivé, il ne l'établit pas en se bornant à se référer à la période de vacances scolaires. Il n'établit pas davantage s'être ultérieurement enquis du contenu du courrier correspondant à l'avis de passage laissé dans sa boîte aux lettres.
9. Enfin, s'il est constant que le titre de recettes émis le 22 novembre 2014 était partiellement erroné, les redevances dues au titre des années 2009, 2010 et 2013 ayant déjà été payées, le Mouvement démocrate ne peut s'en prévaloir pour justifier son retard à s'acquitter des redevances dues au titre des années 2011 et 2012, dont il ne pouvait ignorer qu'il ne les avait pas réglées.
10. Ainsi, le Mouvement démocrate a été informé plusieurs mois avant la décision contestée aussi bien de son obligation financière vis-à-vis de la commune, que des conséquences que cette dernière était susceptible de tirer de son retard à lui payer les sommes dues. Dans ces conditions, eu égard à la persistance du mauvais vouloir du Mouvement démocrate à s'acquitter de ses dettes, la commune était fondée à mettre fin à la mise à disposition de son local dans la Maison du Peuple de Belfort.
11. En quatrième lieu, il résulte de ce qui précède que le détournement de pouvoir allégué ne saurait être établi.
12. En conclusion de tout ce qui précède, le Mouvement démocrate n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Belfort qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le Mouvement démocrate demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du Mouvement démocrate une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Belfort au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du Mouvement démocrate est rejetée.
Article 2 : Le Mouvement démocrate versera à la commune de Belfort une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Belfort est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Mouvement démocrate et à la commune de Belfort.
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N° 18NC01452