Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2017, Mme D...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1603547, 1603776, 1603883 et 1603983 du 18 mai 2017 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Corny-sur-Moselle du 8 janvier 2016 portant approbation du plan local d'urbanisme en tant qu'il classe les parcelles nos 101, 102, 103, 146, 148 et 150 de la section 7 en zone AU ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Corny-sur-Moselle une somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient que :
- le tribunal, qui a joint plusieurs demandes pour statuer par un même jugement, n'a pas statué sur tous les moyens de sa demande ;
- la motivation du jugement est des plus lapidaires s'agissant de sa demande ;
- la délibération est entachée d'irrégularité dès lors que la modification substantielle du classement des parcelles en cause est intervenue à la suite d'une simple réclamation sur le registre d'enquête publique, sans remise d'un dossier et sans qu'elle ait été mise à même de prendre ses dispositions ;
- le classement des parcelles litigieuses est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il porte atteinte à l'activité agricole d'élevage de chevaux qu'elle exploite sur les parcelles voisines ;
- le classement des parcelles litigieuses est entaché de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2017, la commune de Corny-sur-Moselle, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme A...à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Corny-sur-Moselle soutient que :
- la requête d'appel n'est pas recevable dès lors que Mme A...se borne à reprendre son argumentation de première instance sans critiquer le jugement ;
- la requérante, qui n'établit pas être propriétaire ou exploitante des parcelles voisines des parcelles en litige, est dépourvue d'intérêt pour agir contre la délibération litigieuse ;
- aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 31 janvier 2018, Mme A...conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que précédemment.
Mme A...soutient, en outre, que :
- elle justifie d'un intérêt pour agir dès lors qu'elle est propriétaire des parcelles voisines des parcelles en litige depuis le 25 février 2016 et exploitante agricole depuis le 1er janvier 2016 ;
- sa requête d'appel, qui contient une critique du jugement, est régulièrement motivée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour la commune de Corny-sur-Moselle.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 4 juin 2008, le conseil municipal de la commune de Corny-sur-Moselle a prescrit la transformation de son plan d'occupation des sols en plan local d'urbanisme. Le projet a été arrêté par une délibération du 17 décembre 2014. A l'issue de l'enquête publique, qui s'est déroulée du 21 septembre au 21 octobre 2015, le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme par une délibération du 8 janvier 2016.
2. Mme D...A...relève appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération, en tant qu'elle approuve le classement, par le plan local d'urbanisme, des parcelles nos 101, 102, 103, 146, 148 et 150 de la section 7 en zone AU.
Sur la recevabilité de la requête d'appel :
3. En vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, une requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des fais et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge.
4. En l'espèce, si Mme A...reprend l'argumentation qu'elle a développée devant le tribunal, elle ne se borne pas à reproduire ses écritures de première instance mais critique tant la régularité que les motifs du jugement. La fin de non-recevoir soulevée par la commune de Corny-sur-Moselle manque ainsi en fait et doit être écartée.
Sur la régularité du jugement :
5. Il ressort des pièces du dossier de première instance que MmeA..., à l'appui de sa demande, a soutenu que la délibération litigieuse, en tant qu'elle approuve le classement des parcelles litigieuses, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir ainsi que d'un vice de procédure. Il ressort du jugement que le tribunal n'a visé que les deux premiers de ces moyens et n'a statué que sur celui tiré du détournement de pouvoir.
6. Dès lors, Mme A...est fondée à soutenir qu'en omettant ainsi de statuer sur plusieurs moyens, les premiers juges ont entaché d'irrégularité leur jugement. Celui-ci doit, par conséquent, être annulé en tant qu'il porte sur la demande de MmeA....
7. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire ". Aux termes de l'article L. 153-21 du même code : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il est loisible à l'autorité compétente d'apporter des modifications au projet soumis à enquête publique à l'issue de celle-ci sous réserve, d'une part, que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet soumis à enquête et, d'autre part, que ces modifications procèdent de l'enquête.
9. Il est constant que la modification du classement des parcelles litigieuses, par rapport au classement prévu dans le projet de plan local d'urbanisme, est intervenue à la suite d'une demande présentée dans le cadre de l'enquête publique. La circonstance que cette demande n'ait pas été accompagnée d'un " dossier " et ait fait l'objet d'une simple inscription dans le registre d'enquête publique est sans incidence sur la légalité de la délibération, dès lors qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit de formalisme particulier pour la présentation des observations du public.
10. La modification litigieuse procède ainsi de l'enquête publique et il n'est pas établi ni même allégué qu'elle remettrait en cause l'économie générale du projet soumis à enquête. Dès lors, le vice de procédure allégué n'est pas établi.
11. En deuxième lieu, si Mme A...soutient que les conditions dans lesquelles la modification a été sollicitée dans le cadre de l'enquête publique ne lui ont pas permis de " prendre ses dispositions pour faire face à cette situation nouvelle ", elle n'assortit ce moyen d'aucune autre précision qui permettrait à la cour d'en apprécier la portée et le bien-fondé.
12. En troisième lieu, les dispositions du règlement sanitaire départemental et de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, qui régissent l'implantation des constructions à usage agricole par rapport aux autres constructions, notamment à usage d'habitation, ne s'appliquent qu'aux autorisations d'urbanisme. Ces dispositions ne font nullement obstacle à une ouverture à l'urbanisation de parcelles voisines d'une construction à usage agricole, le classement de ces parcelles n'ayant d'ailleurs pas, par lui-même, pour effet d'y autoriser l'édification de constructions.
13. En se bornant à se prévaloir de ces considérations inopérantes, Mme A...n'établit pas que le classement de ces parcelles en zone AU serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
14. En quatrième lieu, la circonstance que la commune ait réservé une suite favorable à la demande du propriétaire des parcelles litigieuses tendant à ce qu'elles soient ouvertes à l'urbanisation ne suffit pas, à elle seule, à démontrer qu'elle aurait procédé au classement de ces parcelles en zone AU dans le but exclusif de favoriser l'intéressé. Par ailleurs, si Mme A...soutient que ledit propriétaire serait " proche des gestionnaires de la collectivité locale ", elle n'assortit cette affirmation d'aucune précision et ne l'étaye par aucun élément concret. Dans ces conditions, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par la commune de Corny-sur-Moselle, que les conclusions à fin d'annulation de Mme A...ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Corny-sur-Moselle qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A...une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Corny-sur-Moselle au titre de ces mêmes dispositions.
Par ces motifs,
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement nos 1603547, 1603776, 1603883 et 1603983 du 18 mai 2017 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il porte sur la demande présentée par Mme D...A....
Article 2 : La demande présentée par Mme D...A...devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Mme D...A...versera à la commune de Corny-sur-Moselle une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Corny-sur-Moselle est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et à la commune de Corny-sur-Moselle.
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N° 17NC01732