Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2019, M. et Mme E..., représentés par Me Boia, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de leur délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'application au regard de l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont ils remplissent les conditions ;
- l'obligation de quitter le territoire : est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de l'état de santé de Mme E... et celle-ci ne pouvant être séparée de son époux sauf à violer l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire.
M. et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Nancy du 11 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E..., ressortissants kosoviens, sont entrés irrégulièrement en France au cours de l'année 2013, accompagnés de leur enfant mineur. Leurs demandes d'asile ont fait l'objet de décisions de rejet devenues définitives, après réexamens, à la suite d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 8 juillet 2016. Les intéressés ont alors fait l'objet d'arrêtés du préfet des Ardennes portant obligation de quitter le territoire le 8 mars 2016 qu'ils n'ont pas exécutés. Les époux E... ont finalement saisi le préfet de la Marne le 22 mai 2019 de demandes de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des arrêtés du 5 juillet 2019, le préfet de la Marne leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire. Par le jugement attaqué du 17 octobre 2019, dont M. et Mme E... relèvent appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que les époux E... sont entrés en France au cours de l'année 2013 et ne s'y sont maintenus que pour les besoins de leurs demandes d'asile et, suite au rejet de celles-ci, en dépit d'arrêtés leur faisant obligation de quitter le territoire. Afin d'établir leur intégration dans la société française, ils se bornent à faire valoir la scolarisation de leurs deux enfants mineurs ainsi que l'apprentissage du français. M. E... invoque il est vrai sa qualification d'ingénieur en électrotechnique, mais il ressort des pièces du dossier qu'il n'a occupé aucun emploi depuis son arrivée en France et ne peut faire valoir que l'obtention du certificat d'aptitude à la conduite d'engins de manutention ainsi que des promesses d'embauche pour des emplois non qualifiés dans la restauration et le bâtiment. A cet égard les démarches qu'il invoque en vue d'un recrutement en rapport avec ses qualifications ne sont pas établies par les pièces du dossier. Dans ces circonstances, en dépit de l'état de santé de Mme E..., le préfet de la Marne n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation de la situation des requérants au regard de l'application des dispositions ci-dessus reproduites de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
4. D'abord, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les décisions de refus de titre de séjour ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, les requérants ne peuvent se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de ces décisions, pour demander l'annulation des décisions les obligeant à quitter le territoire français. Par ailleurs, il résulte également des motifs exposés au point 3 ci-dessus, que les mesures d'éloignement, qui n'ont pas pour objet de séparer les membres de la famille, ne portent pas une atteinte disproportionnée à la vie familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et ne méconnaissant pas non plus l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.
5. Ensuite, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
6. Les requérants soutiennent que le préfet de la Marne a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation quant à l'état de santé de Mme E... et qu'il ne justifie pas qu'elle serait en mesure de voyager vers son pays d'origine. Toutefois, les certificats médicaux produits datent de 2015 et 2016 et ne suffisent pas à établir la gravité de l'état de santé de Mme E... ainsi que l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine à la date de la décision contestée. Dans ces conditions, le préfet de la Marne n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation de l'état de santé de la requérante. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision obligeant les époux E... à quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
7. Les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire n'étant pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, entachées d'excès de pouvoir, le moyen par lequel il est excipé, à l'encontre des décisions fixant le pays de destination, de leur illégalité ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes. Par suite, leur requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E..., M. C... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Marne.
N° 19NC03313 2