Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 juin 2019, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour qui devra lui être délivrée dans les deux jours de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté pris dans son ensemble est entaché d'un défaut d'examen approfondi de sa situation et repose sur une erreur de fait en ce qu'il ne prend pas en compte la présence en France de sa mère ainsi que de ses deux frères ;
- le refus de titre de séjour porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ; le refus de titre de séjour est illégal en ce qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un certificat de résidence sur le fondement du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien pour l'exercice de son activité salariée dans l'entreprise de son frère, ainsi que sur le fondement du 5) de l'article 6 du même accord en sa qualité de gérant non salarié de cette société ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Nancy du 14 mai 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 7 février 1986, entré en France le 24 septembre 2015 a saisi le préfet de Meurthe-et-Moselle d'une demande de titre de séjour en qualité de salarié ou de commerçant. Par un arrêté du 10 avril 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jour et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. Par le jugement attaqué du 12 mars 2019, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les ressortissants algériens s'établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification, selon le cas, qu'ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis " et aux termes l'article 7 du même accord : " c) les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ". Il résulte des termes mêmes des stipulations de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié que celui-ci ne s'applique pas aux salariés.
3. Afin de refuser à M. C... le certificat de résidence qu'il sollicitait en qualité de commerçant en faisant valoir sa qualité de gérant de la SARL La Patate Gourmande, telle qu'établie par l'extrait kbis du registre du commerce et des sociétés, le préfet s'est essentiellement fondé sur la circonstance que les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) avaient émis un avis défavorable en relevant que l'intéressé était salarié de cette société. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait été salarié de cette société à la date de sa demande ou encore qu'il aurait déclaré l'être tandis qu'il ressort des rapports de la DIRECCTE que le requérant n'était pas salarié de cette société mais seulement le gérant non-salarié. Dans ces conditions, compte tenu des précisions apportées en appel par le requérant, en se fondant sur ce motif pour refuser à M. C... le certificat de résidence le préfet de Meurthe-et-Moselle doit être regardé comme ayant entaché sa décision d' une erreur de fait.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 mars 2019 le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande et à en demander l'annulation ainsi que celle de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 10 avril 2018.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
6. L'annulation ci-dessus prononcée de l'arrêté du 10 avril 2018 implique seulement que le préfet de Meurthe-et-Moselle procède à un nouvel examen de la demande de M. C.... Il y a lieu par suite de l'enjoindre d'y procéder dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 7691-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me D..., sous réserve qu'elle renonce à la part contributive de l'Etat à l'aide juridique, de la somme de 1 500 euros au titre des frais que M. C... aurait exposés dans la présente instance s'il n'avait été admis à l'aide juridictionnelle.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 mars 2019 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 10 avril 2018 est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de procéder au réexamen de la demande de M. C... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me D... la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
N° 19NC01890
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