Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 5 avril et 2 octobre 2019, 2 et 8 juillet 2020, M. B... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2018 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 4 octobre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " et dans l'attente de l'instruction, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour permettant l'exercice d'une activité salariée ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il démontre contribuer à l'éducation et à l'entretien de son enfant, répondant ainsi aux conditions posées par les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense et des mémoires en réplique, enregistrés les 19 décembre 2019, 23 juillet 2020 et 7 août 2020, le préfet des Vosges conclut à ce qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 mars 2019.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., né en 1990 et de nationalité ivoirienne, serait entré irrégulièrement en France le 25 avril 2017 selon ses déclarations. Il a sollicité une demande de titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français. Par arrêté du 4 octobre 2018, le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. M. B... A... relève appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 4 octobre 2018.
Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par le préfet des Vosges:
2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.
3. Il ressort des pièces du dossier que, le 6 juillet 2020, le préfet des Vosges a décidé de délivrer à M. A... un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision a implicitement mais nécessairement abrogé les décisions du 4 octobre 2018 faisant obligation au requérant de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Ces décisions n'ayant pas été exécutées, les conclusions de l'intéressé tendant à leur annulation ont perdu leur objet et il n'y a plus lieu d'y statuer. En revanche, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du 4 octobre 2018 portant refus de titre de séjour, qui a reçu application et n'a pas été retirée, ont conservé leur objet et il y a lieu d'y statuer.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6°. A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ".
5. M. A... soutient qu'il est père d'un enfant français né le 28 décembre 2017 et qu'il contribue effectivement à son entretien et à son éducation au sens du 6° de l'article L. 313 11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'intéressé produit une attestation de la mère de son fils du 14 octobre 2018 chez qui il réside. Cette dernière y précise que M. A... " remplit bien son devoir de père " et qu'il lui a acheté notamment du matériel pour bébé. Elle indique qu'elle souhaite que M. A... puisse travailler pour subvenir à ses besoins et à ceux de leur fils. Cette attestation est corroborée par le certificat d'un médecin généraliste du 15 octobre 2018 qui indique que M. A... s'est présenté à onze reprises à son cabinet pour assister à toutes les consultations relatives à son fils. Les documents ainsi produits, nécessairement limités par leur nombre et leur nature eu égard au très jeune âge de l'enfant à la date de la décision attaquée, et la circonstance que M. A... vit effectivement avec son enfant, permettent, en l'espèce, d'établir la réalité de la participation effective de l'appelant à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis sa naissance. Par suite, M. A... est fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet a méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Ainsi qu'il a déjà été dit, le 6 juillet 2020, le préfet des Vosges a décidé de délivrer à M. A... un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant.
Sur les frais de l'instance :
8. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me D..., avocat du requérant, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me D....
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. A... en tant qu'elles sont dirigées contre les décisions du préfet des Vosges du 4 octobre 2018 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 31 décembre 2018 et la décision portant refus de titre de séjour du 4 octobre 2018 sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à Me D... une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me D... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet des Vosges.
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N° 19NC01051