Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2015, MmeC..., représentée par
MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou subsidiairement de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les décisions ne sont pas suffisamment motivées ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- le préfet a commis une erreur manifeste en estimant qu'il ne faisait pas état de motifs exceptionnels ou humanitaires et dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français sera annulée en raison de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle encourt des risques pour sa vie en cas de retour en Turquie ;
- le préfet s'est cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2015, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 26 novembre 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code des relations entre le public et l'administration dont les dispositions ont été reprises par le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre.
1. Considérant que Mme B...C..., ressortissante turque, née le 9 décembre 1987, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, accompagnée de son époux, M. A...C..., le 24 novembre 2013 et a sollicité, comme ce dernier, l'octroi du statut de réfugié ; que sa demande ayant été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 9 juillet 2014 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 22 décembre 2014, le préfet de l'Aube a pris, le 16 février 2015, un arrêté portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ; que M. C...a fait l'objet des mêmes décisions ; que Mme C...relève appel du jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 23 juin 2015 en tant qu'il porte rejet de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 février 2015 ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de séjour :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Aube n'a, compte tenu de l'entrée récente en France de Mme C...et de son époux, qui fait également l'objet d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français, ni porté, nonobstant les efforts d'intégration du couple, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur la situation personnelle de Mme C...ni commis une telle erreur en estimant que celle-ci ne faisait état d'aucun motif exceptionnel ou humanitaire au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;
4. Considérant que Mme C...ayant fait l'objet d'un refus de titre de séjour, soit le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire national qui lui a été faite n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ;
5. Considérant, en second lieu, que Mme C...n'est pas, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, fondée à exciper de l'illégalité de la décision préfectorale portant refus de séjour ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
6. Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet de l'Aube a fixé la Turquie comme pays de renvoi satisfait aux exigences de motivation de la loi du
11 juillet 1979 susvisée alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises par le code des relations entre le public et l'administration ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
9. Considérant que MmeC..., dont la demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, ne justifie pas, en particulier par les documents qu'elle a produits à l'appui de sa demande de réexamen, qu'elle encourt des risques pour sa vie en cas de retour en Turquie en raison de son engagement politique ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être par suite écarté ;
10. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru lié par les décisions l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile en ce qui concerne l'appréciation des risques allégués ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme C...ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
14. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme C...une somme en application de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 15NC01650