Par une requête enregistrée le 5 juin 2015, M.B..., représenté par la
SCP A. Levi-Cyferman et L. Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à la SCP A. Levi-Cyferman et L. Cyferman sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée et ne fait état d'aucun examen particulier de sa situation personnelle ;
- la demande de réexamen de sa demande d'asile repose sur des éléments sérieux et nouveaux ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- - il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il se réfère à ses écritures de première instance.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 26 mars 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre, président-assesseur.
1. Considérant que M.B..., de nationalité serbe, est entré en France le
30 juillet 2012 avec sa compagne et leurs cinq enfants ; qu'il a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ; que sa demande, instruite dans le cadre de la procédure prioritaire, a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 4 octobre 2012 ; que l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination du 18 octobre 2012 ; que le recours en annulation de cette décision a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 avril 2013, confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy par un arrêt du 13 février 2014 ; que la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmé la décision de l'OFPRA par une décision du 2 mai 2013 ; que l'intéressé a présenté, le 3 juin 2013, une première demande de réexamen au titre de l'asile et s'est vu notifier une décision refusant de l'admettre provisoirement au séjour du 19 juin 2013, en application de l'article L. 741-4 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que faute d'avoir produit le formulaire demandé par l'OFPRA, la demande de l'intéressé n'a pas été enregistrée ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle a confirmé, par sa décision du 12 septembre 2013, la décision du 18 octobre 2012 ; que le requérant a sollicité, le 19 novembre 2013, une seconde fois, le réexamen de sa demande d'asile ; que par une décision du 18 décembre 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de l'admettre provisoirement au séjour ; que M. B...relève appel du jugement n° 1401496 du 31 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que s'agissant du moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée, il y a lieu d'écarter celui-ci par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile (...) constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (...) " ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a présenté une première demande d'asile, rejetée par une décision de l'OFPRA du 4 octobre 2012 et confirmée par la CNDA le 2 mai 2013 ; qu'il a ensuite sollicité le réexamen de sa demande d'asile le 3 juin 2013 ; que n'ayant pas transmis à l'OFPRA le formulaire requis, la demande de l'intéressé n'a pas été enregistrée ; que M. B...a sollicité, une seconde fois, le
19 novembre 2013, le réexamen de sa demande d'asile ; que le requérant, qui faisait l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 18 octobre 2012, confirmée par une décision du
12 septembre 2013, a ainsi présenté deux demandes de réexamen au cours d'une période de six mois et n'a pas répondu à la demande de l'OFPRA de produire le formulaire permettant l'enregistrement du réexamen ; que, par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu, sans commettre d'erreur de droit, considérer que la demande de M.B... entrait dans le champ des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l 'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l' étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d' existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
6. Considérant que M.B..., qui n'est entré en France qu'en juillet 2012, fait valoir qu'il démontre une véritable volonté d'intégration et que ses cinq enfants sont régulièrement scolarisés ; que le requérant, qui a résidé en Serbie et n'établit pas ne plus y avoir d'attaches, ne fait état d'aucun obstacle à ce qu'il y poursuive sa vie familiale avec ses enfants et son épouse, qui fait également l'objet d'un refus d'admission au séjour ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, la décision attaquée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas plus des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant, ni qu'il aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. B...la somme de 1 500 euros que celui-ci demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N°15NC01252