Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2018, M.E..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Moselle aurait refusé de lui délivrer un titre de séjour et les décisions du 29 novembre 2017 par lesquelles le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation sous une astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du présent arrêt ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 700 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur le refus de séjour allégué :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet de la Moselle n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
Sur la fixation du pays de renvoi :
- elle est insuffisamment motivée ;
- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 août 2018, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que l'arrêté contesté ne comporte aucune décision de refus de séjour et, s'agissant des décisions par lesquelles il a obligé le requérant à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi, que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 janvier 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. F...Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.E..., ressortissant kosovar né le 25 mai 1994, a déclaré être entré en France le 16 décembre 2013. Il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 28 mai 2014. Il a sollicité le réexamen de sa demande d'asile. Cette demande a été déclarée irrecevable par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 juin 2017 qui a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 octobre 2017. Par un arrêté du 29 novembre 2017, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé son pays de destination et l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours. Le requérant relève appel du jugement du 8 décembre 2017 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination. Il demande également l'annulation d'une décision par laquelle le préfet de la Moselle aurait refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Sur la décision par laquelle le préfet de la Moselle aurait refusé de délivrer un titre de séjour à M. E...:
2. L'arrêté attaqué n'a ni pour objet ni pour effet de refuser un titre de séjour à M. E..., mais se borne à prononcer à son encontre une obligation de quitter sans délai le territoire français et fixe le pays de destination. Dès lors, les conclusions dirigées contre une prétendue décision refusant un titre de séjour au requérant sont irrecevables.
Sur la décision obligeant M. E...à quitter le territoire français :
3. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des mentions de l'arrêté contesté, que le préfet de la Moselle a procédé à un examen particulier de la situation de M. E... avant de prendre à son encontre la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré du défaut d'un tel examen doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
4. En premier lieu, l'arrêté attaqué, en ce qu'il fixe le pays à destination duquel M. E... pourra être renvoyé, comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. E...fait valoir qu'il vit en France depuis le mois de décembre 2013, que Mme C...E..., son épouse, est titulaire d'un récépissé de demande de titre de séjour, que son père, qui l'héberge, réside sur le territoire français sous couvert d'un titre de séjour et que Mme B...E..., sa fille, est en possession d'un document de circulation. Cependant, le requérant n'établit pas que Mmes C...et B...E...seraient respectivement son épouse et sa fille et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toute attache familiale au Kosovo, ni qu'il ne pourrait y poursuivre sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de ces stipulations : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
8. S'il soutient qu'il est menacé dans son pays d'origine, le requérant, dont la demande d'asile a, au demeurant, été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, n'apporte aucune précision dans sa requête sur la nature des menaces dont il ferait l'objet au Kosovo et ne produit aucun document de nature à établir le bien-fondé de ses affirmations. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 18NC00183