Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2018, M.B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler et, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Rhône de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- le préfet du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- la décision litigieuse a été prise dans des conditions qui méconnaissent le droit d'être entendu qui constitue un principe général du droit communautaire et les stipulations de l'article 41-2 de la Charte des droits fondamentaux ;
- elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2019, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 11 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant tunisien né le 19 août 1976, a déclaré être entré en France en juin 2006. Il a été interpellé puis placé en garde à vue le 20 février 2018 pour vol. Par un arrêté du 21 février 2018, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois à compter de la notification de la décision. M. B...a été placé au centre de rétention de Metz et a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler cet arrêté. Le requérant relève appel du jugement du 28 février 2018 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français :
2. En premier lieu, la décision contestée comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. M. B...n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'elle est entachée d'un défaut de motivation.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Rhône a procédé à un examen particulier de la situation de M. B...avant d'édicter la décision attaquée.
4. En troisième lieu, les stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adressent uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Le moyen tiré de leur méconnaissance est, par suite, inopérant.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
6. M. B...fait valoir qu'il réside en France depuis 2006, que ses frères y vivent sous couvert de cartes de séjour, que ses oncles et ses cousins sont de nationalité française, qu'il entretient une relation avec une ressortissante française et qu'il a constitué une société à responsabilité limitée avec l'un de ses frères. Cependant, le requérant n'apporte aucune précision sur la réalité de la relation qu'il allègue, l'identité de sa compagne supposée étant inconnue. La durée de sa présence sur le territoire français n'est pas établie et il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doivent être écartés.
Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
7. En premier lieu, la décision d'interdiction de retour sur le territoire français doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
8. La décision en litige vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions applicables de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation du requérant. Elle indique les éléments de la situation personnelle de l'intéressé qui ont été pris en considération. Cette motivation atteste de la prise en compte par le préfet du Rhône de l'ensemble des critères prévus par les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la décision litigieuse est suffisamment motivée.
9. En second lieu, pour les motifs exposés au point 6, le préfet du Rhône n'a pas entaché cette décision d'une erreur d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
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N° 18NC02735