Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juin 2017, la SARL Saft, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée, l'administration ayant inversé la charge de la preuve ;
- l'origine des crédits apportés sur le compte courant d'une associé est justifiée puisqu'il s'agit de virements de compte à compte ;
- la société n'avait pas l'intention d'éluder l'impôt et des régularisations ont été faites.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Saft ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lambing,
- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,
1. Considérant que la SARL Saft, qui avait pour activité la pose d'installations sanitaires et de chauffage, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ; que par proposition de rectification du 20 septembre 2011, l'administration lui a notifié dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008, 2009 et 2010 ; que la SARL Saft relève appel du jugement du 18 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision, en date du 27 novembre 2017, postérieure à l'introduction de la requête, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé en faveur de la SARL Saft, le dégrèvement à concurrence d'une somme de 3 040 euros au titre des années 2008 et 2010 sur le montant en litige des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés dues en droits et pénalités ; que les conclusions de la requête de la SARL Saft sont, dans la mesure de ce montant, devenues sans objet ;
Sur le surplus des conclusions aux fins de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) " ; que la régularité d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs ;
4. Considérant que la proposition de rectification du 20 septembre 2011 comporte la désignation des impôts concernés, les années d'imposition et les bases d'imposition, et énonce les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés ; que la charge de la preuve relève du bien fondé de ses motifs ; que dès lors, la société requérante a été mise à même de formuler utilement des observations, ce qu'elle a d'ailleurs fait ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ne peut par suite qu'être écarté ;
En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :
5. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés " ; qu'il appartient au contribuable, pour l'application de ces dispositions, de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de la SARL Saft dont Mme A...est la gérante et associée, l'administration fiscale a constaté que le compte courant d'associé de Mme A...avait été crédité au 31 décembre 2008, date de clôture de l'exercice 2008, d'un montant de 47 360 euros et au 30 juin 2010, date de clôture de l'exercice 2009-2010, d'un montant de 43 844 euros ; qu'elle a réintégré ces sommes dans le bénéfice net imposable de la société ; que dans ses observations sur la proposition de rectification du 20 septembre 2011, concernant les apports en compte courant, la SARL Saft a admis le redressement au titre de l'exercice clos en 2008 à hauteur de 35 000 euros ; que dans la réponse aux observations du contribuable du 16 décembre 2011, l'administration a ramené le montant du rehaussement notifié au titre de l'exercice clos en 2010 à 13 016 euros ; qu'eu égard aux justificatifs apportés en appel, le ministre a en outre admis la réduction du bénéfice net de l'exercice clos en 2008 pour un montant global de 7 500 euros ; que pour justifier des apports réalisés sur le compte courant d'associée de Mme A...s'agissant des sommes restant en litige, la société requérante se borne à faire état d'erreurs d'affectations comptables ; qu'elle ne produit cependant aucun élément justificatif de nature à corroborer ces allégations ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que les sommes restant en litige ont été réintégrées dans le résultat imposable de la SARL Saft au titre des années 2008 et 2010;
En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) "; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée (...) la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration " ;
8. Considérant que la SARL Saft soutient que l'application de cette majoration est mal fondée dès lors qu'elle n'a pas eu d'intention d'éluder l'impôt ; qu'elle fait état du plan de redressement relatif aux années en litige, des problèmes de santé de sa gérante et de l'impossibilité de contrôler les déclarations fiscales déposées par son comptable ; qu'il résulte de l'instruction que le service, qui n'a assorti de cette majoration que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée, a indiqué dans la proposition de rectification que le non reversement de la taxe sur la valeur ajoutée collectée a été pratiqué à plusieurs reprises sur l'ensemble de la période vérifiée du 1er juillet 2010 au 31 mars 2011 ; que cette insuffisance de déclaration avait déjà été relevée dans le cadre d'une précédente vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2004 au 30 septembre 2006 ; que les montants des omissions de déclaration sont importants, s'élevant à 8 293 euros au titre de la période du 1er janvier 2009 au 30 juin 2010 et à 40 577 euros au titre de la période du 1er juillet 2010 au 31 mars 2011 ; que si des régularisations sont intervenues, il résulte de l'instruction, et notamment des éléments apportés par l'administration, que la pratique ainsi suivie par la société requérante lors du dépôt des déclarations considérées relevait d'un mode récurrent de gestion de sa trésorerie ; qu'enfin, les problèmes de santé de la gérante ne sont intervenus qu'à compter d'octobre 2011, comme l'atteste le certificat médical produit en première instance, soit postérieurement à la période vérifiée ; qu'il suit de là que l'administration apporte la preuve, qui lui incombe, du caractère délibéré des insuffisances de déclaration par la SARL Saft ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Saft n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions et majorations restant en litige ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SARL Saft aux fins de décharge à concurrence du dégrèvement prononcé par l'administration à hauteur de 3 040 euros au titre des années 2008 et 2010.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Saft est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Saft et au ministre de l'action et des comptes publics.
2
N° 17NC01452