Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 juillet 2015, le Centre international de séjour de Reims, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301085 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 juin 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le caractère lucratif de son activité doit procéder d'une analyse globale de l'ensemble des activités exercées, et non de chaque activité prise distinctement ;
- la doctrine administrative, qui préconise d'examiner la lucrativité des activités exercées par un organisme activité par activité, n'est pas conforme aux principes dégagés par le Conseil d'État ;
- l'analyse de la lucrativité du Centre international de séjour de Reims pour chaque activité est erronée dès lors que ces secteurs d'activité ne fonctionnent pas de manière autonome les uns des autres ;
- la création de secteurs distincts est conforme aux dispositions des articles 209 et 242 B de l'annexe II au code général des impôts ;
- les activités liées à la restauration et aux cours de langue sont marginales et ne constituent qu'un complément de l'activité principale : leurs excédents sont donc réinvestis dans l'activité non lucrative de l'association ;
- l'analyse globale de l'ensemble des activités du centre conduit nécessairement à considérer que son activité ne s'exerce pas dans un secteur concurrentiel.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- contrairement à ce que soutient l'association requérante, les dispositions combinées des articles 206-1, 1447 et 261-7-1b du code général des impôts imposent d'examiner la lucrativité d'un organisme par secteur distinct ;
- pour chaque secteur d'activité, le vérificateur a établi l'existence d'une situation de concurrence avec le secteur marchand.
Vu :
-les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Di Candia,
- et les conclusions de Mme Guidi, rapporteur public.
1. Considérant que le Centre international de séjour de Reims, association dont l'objet est d'accueillir des groupes de jeunes étrangers et nationaux en vue de favoriser le développement d'activités socio-éducatives et de formation, notamment linguistique, de promouvoir le tourisme associatif et de développer les relations internationales de toute nature, exerce des activités d'hébergement, de restauration, de location de salles et de cours de langues ; que l'association a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur les années 2006 à 2008, à l'issue de laquelle le service a estimé qu'elle ne répondait pas aux critères de non-lucrativité ; que l'administration fiscale a tiré les conséquences de cette situation en assujettissant l'association à des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle au titre des années 2007 à 2009 dans les rôles de la commune de Reims ; que l'association requérante relève régulièrement appel du jugement du 9 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du CGI dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " I. La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. / II. Toutefois, la taxe n'est pas due par les organismes mentionnés au premier alinéa du 1 bis de l'article 206 qui remplissent les trois conditions fixées par ce même alinéa " ; qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts : " (...) 1 bis : Ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés (...) les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 (...) dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes d'exploitation encaissées au cours de l'année civile au titre de leurs activités lucratives n'excède pas 60 000 euros " ;
3. Considérant que n'entrent pas dans le champ de ces dispositions les associations qui poursuivent un objet social ou philanthropique dans la mesure où, d'une part, leur gestion présente un caractère désintéressé, et, d'autre part, les services qu'elles rendent ne sont pas offerts en concurrence, dans la même zone géographique d'attraction, avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, elle n'entre pas dans le champ de ces dispositions si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et à tout le moins des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre ;
4. Considérant que s'il est constant que la gestion de l'association requérante présente un caractère désintéressé, l'administration a estimé que les activités lucratives de l'association requérante étaient prépondérantes en procédant à une analyse de chacune des activités exercées au sein de l'association ; que l'association requérante soutient qu'une analyse globale de ses activités aurait conduit l'administration à regarder ses activités non lucratives comme prépondérantes, eu égard à l'importance de ses services d'hébergement et de restauration, qui ne seraient pas offerts en concurrence avec les services proposés par des entreprises commerciales, ainsi qu'à la place très marginale tenue par les activités afférentes aux cours de langues et à la location de salles ; qu'il résulte au contraire de l'instruction que l'administration a regardé ces services d'hébergement et de restauration comme étant offerts en situation de concurrence avec, d'une part, les services que proposent les hôtels situés à Reims et dans la ceinture sud et ouest de l'agglomération, et d'autre part, les restaurants, pizzerias et snacks situés à proximité du Centre international de séjour de Reims, dès lors que ces prestations étaient offerts à une clientèle de " citoyens du monde " sans restriction particulière de nature à en limiter l'accès aux jeunes, aux groupes scolaires ou associatifs ; que l'association requérante n'apporte quant à elle aucun élément de nature à établir que ces activités ne seraient proposées qu'à des groupes de jeunes dans un cadre associatif ou scolaire ; qu'elle se borne à soutenir que l'administration aurait dû s'affranchir de procéder à l'examen des critères relatifs aux conditions de gestion de ses activités au regard des produits ou des prestations fournies, du public visé, du prix pratiqué ou de la publicité mise en oeuvre, sans contester utilement l'analyse du service selon laquelle les conditions d'exercice de ses activités sont identiques à celles des entreprises commerciales ; que dans ces conditions, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'était pas assujettie à la taxe professionnelle ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Centre international de séjour de Reims n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à l'association Centre international de séjour de Reims la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête du Centre international de séjour de Reims est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au Centre international de séjour de Reims et au ministre chargé du budget.
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