Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 septembre 2015 et 17 février 2016, Mme A..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 juillet 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 avril 2015 pris à son encontre par le préfet de l'Aube ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- le jugement attaqué a méconnu l'article L. 5 du code de justice administrative dès lors qu'elle n'a pas été mise à même de répondre au mémoire en défense du préfet en violation du principe du contradictoire ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2015, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que le moyen relatif à la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure contentieuse devant les premiers juges a été présenté pour la première fois par un mémoire enregistré le 17 février 2016, après l'expiration du délai d'appel qui a commencé à courir au plus tard le 12 septembre 2015, date de la notification du jugement à MmeA... ; ce moyen qui relève d'une cause juridique distincte de celle qui servait de fondement à la requête est par suite irrecevable.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme A..., ressortissante ivoirienne née le 7 mai 1982, est entrée en France le 9 août 2014 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité le 25 septembre 2014 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ; que par un arrêté du 22 avril 2015, le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée ; que Mme A... relève appel du jugement du 28 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure contentieuse devant les premiers juges a été présenté pour la première fois par Mme A... par un mémoire enregistré le 17 février 2016, après l'expiration du délai d'appel qui a commencé à courir au plus tard le 12 septembre 2015, date de la notification du jugement à l'appelante ; que ce moyen relève d'une cause juridique distincte de celle qui servait de fondement à sa requête et, par suite, est irrecevable ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; que ces dispositions ne requièrent pas la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais exigent qu'il réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable ; qu'il appartient, dès lors, à l'autorité administrative d'apprécier, pour l'application de ces dispositions, dans chaque cas sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des justifications produites, où se situe la résidence de l'enfant, entendue comme le lieu où il demeure effectivement de façon stable et durable à la date à laquelle le titre est demandé ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au 25 septembre 2014, date à laquelle Mme A...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées en qualité de parent d'enfant français, l'intéressée ne résidait sur le territoire français avec son fils, Yoro Honsaï, né le 1er décembre 2012, que depuis le mois d'août 2014 selon ses propres dires, soit depuis moins de deux mois ; que, par suite, et alors que les démarches d'insertion de Mme A...en France ont été initiées postérieurement à la date de sa demande de titre de séjour, le territoire français ne saurait être regardé comme le lieu où l'enfant demeure effectivement de façon stable et durable ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme A...a entrepris des démarches d'insertion en France et a suivi une formation, elle est entrée en France très récemment, au mois d'août 2014 selon ses déclarations ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier qu'elle est séparée du père de son enfant Yoro Honsaï depuis l'année 2013, qui réside en Guyane ; que, par ailleurs, Mme A... n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où vivent notamment ses deux autres enfants mineurs ainsi que ses parents ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour opposée à Mme A...n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, et en l'absence d'autre élément invoqué par la requérante, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aube aurait entaché la décision en litige d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A...doit être écarté ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant que pour les mêmes motifs, et en l'absence d'autre élément invoqué par MmeA..., les moyens tirés de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision en litige sur sa situation personnelle, présentés après l'expiration du délai d'appel, doivent, en tout état de cause, être écartés ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 15NC01963