Mme C...D...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2014 du préfet de Meurthe-et-Moselle portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1500168 du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 24 septembre 2015, sous le n° 15NC02021,
M.B..., représenté par la S.C.P. d'avocats Annie Levi-Cyferman-Laurent Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500166 du tribunal administratif de Nancy du 31 mars 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2014 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil du requérant d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour et celle fixant le Kosovo comme pays de destination ne sont pas suffisamment motivées ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; il a ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- c'est en conséquence à tort que le préfet ne lui a pas délivré la carte de séjour temporaire prévue au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- le préfet a porté une atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- il craint d'être persécuté en cas de retour au Kosovo ; le préfet a pris la décision fixant le pays de renvoi en méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
II. Par une requête enregistrée le 24 septembre 2015, sous le n° 15NC02023,
MmeD..., représentée par S.C.P. d'avocats Annie Levi-Cyferman-Laurent Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500168 du tribunal administratif de Nancy du 31 mars 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2014 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de la requérante d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du
10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour et celle fixant le Kosovo comme pays de destination ne sont pas suffisamment motivées ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; il a ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- c'est en conséquence à tort que le préfet ne lui a pas délivré la carte de séjour temporaire prévue au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- le préfet a porté une atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- elle craint d'être persécutée en cas de retour au Kosovo ; le préfet a pris la décision fixant le pays de renvoi en méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Des mémoires ont été déposés par le préfet de Meurthe-et-Moselle le 30 mai 2016, postérieurement à la clôture automatique de l'instruction, trois jours francs avant l'audience.
Vu :
- les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 10 juillet 1979 dont les dispositions ont été reprises par le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre.
1. Considérant que M. A...B...et sa compagne, Mme C...D..., se déclarant de nationalité kosovare, sont entrés irrégulièrement en France le 12 novembre 2012 avec leurs quatre enfants mineurs nés les 8 juillet 1998, 10 octobre 1999, 20 juillet 2005 et
11 septembre 2007 ; que leurs demandes d'asile ayant été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pris le 3 octobre 2014 des arrêtés portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que Mme D...et M. B...relèvent appel des jugements du 31 mars 2015 par lesquels le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;
2. Considérant que les requêtes n° 15NC02021 et 15NC02023 présentent à juger des mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne les refus de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, que les décisions contestées énoncent de manière suffisamment précise et personnalisée les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé ; que le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé des décisions portant refus de séjour doit être dès lors écarté comme manquant en fait ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l 'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l' étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d' existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
5. Considérant que si M. B... et MmeD... se prévalent de leur présence en France, avec leurs quatre enfants mineurs et scolarisés, depuis leur entrée en novembre 2012, ainsi que de leur intégration, il ressort, toutefois, des pièces des dossiers qu'eu égard au caractère récent de l'entrée en France des intéressés et dans la mesure où il n'est pas établi que la vie familiale de ceux-ci ne pourrait se poursuivre au Kosovo avec l'ensemble des membres de la cellule familiale, les arrêtés contestés n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris alors même que des membres de leurs famille vivraient en France ; que le préfet n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit également que les requérants ne sont pas davantage fondés à soutenir que la carte de séjour temporaire prévue au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile devait leur être délivrée ;
6. Considérant, qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers que le préfet ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des refus de séjour contestés sur la situation personnelle des intéressés ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
8. Considérant qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
9. Considérant qu'en se bornant à faire état, sans autre précision, de la scolarisation de leurs enfants, les requérants n'établissent pas que le préfet n'aurait pas porté une considération primordiale à l'intérêt supérieur de ces derniers et aurait par suite méconnu les stipulations précitées ;
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
10. Considérant, qu'en indiquant que les intéressés n'établissaient pas être exposés à des peines ou des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour au Kosovo, pays dont les intéressés déclarent avoir la nationalité, le préfet a suffisamment motivé ses décisions ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l' article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants " ;
12. Considérant que M. B...et MmeD..., dont les demandes tendant à l'octroi de réfugiés ont été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, soutiennent qu'ils ont été menacés au Kosovo en raison de leurs origines rom et craignent d'être persécutés en cas de retour dans ce pays du fait de cette appartenance ; qu'ils ne justifient cependant pas de la réalité de risques personnels de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans leur pays d'origine ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
14. Considérant le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. B...et Mme D...ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
15. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. B...et Mme D...les sommes que celui-ci demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes n° 15NC02021 et 15NC02023 sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Mme C...D...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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