Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2015, MmeC..., représentée par
MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de procéder dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir à un nouvel examen de sa demande de titre de séjour au titre de l'asile et de la vie privée et familiale ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de la requérante d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du
10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ne sont pas suffisamment motivées ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle peut se prévaloir des lignes directrices de la circulaire " Valls " du
28 novembre 2012 ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle encourt des risques de traitements inhumains ou dégradants au sens de l'arti-
cle 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2016, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2016.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 10 juillet 1979 dont les dispositions ont été reprises par le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre.
1. Considérant que Mme A...C..., ressortissante serbe, née le 26 mars 1994, relève appel du jugement du 22 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aube du 28 avril 2015 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de séjour comporte de manière très précise et non stéréotypée l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé ; que dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de la décision de refus de séjour ; que l'arrêté en litige mentionne l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision portant refus de titre de séjour est suffisamment motivée ; qu'il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de la motivation de la décision de refus de séjour, que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de MmeC... ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l 'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l' étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d' existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
5. Considérant que Mme C...soutient que le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'elle est intégrée et qu'elle vit en France depuis son entrée en juin 2012 auprès de M.C..., qui est le père de son enfant Amin, né le 13 janvier 2014, qu'elle a rencontré lorsqu'elle était en Allemagne et qu'elle a épousé le 30 août suivant ; qu'à cet effet, elle produit notamment plusieurs attestations de proches ; que, toutefois, seule l'attestation établie par les parents de M. C...mentionne que le couple a habité en France du 3 juin 2012 à septembre 2013 ; que les autres attestations établies par des amis n'ont pas précisément cette portée ; que
Mme C...ne peut, dans ces conditions et au vu des autres pièces du dossier, être regardée comme justifiant d'une entrée en France, comme elle le soutient, en juin 2012 ; que les mêmes pièces n'établissent pas davantage l'existence d'une relation stable entre la requérante et son époux avant le mois de janvier 2014 ; que le préfet n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit également que Mme C...n'est pas davantage fondée à soutenir que le préfet devait lui délivrer la carte de séjour temporaire prévue au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions contestées sur la situation personnelle de l'intéressée ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à se prévaloir des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dont les orientations générales ne constituent pas des lignes directrices ;
8. Considérant qu'il s'ensuit que Mme C...n'est fondée ni à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour ni à soutenir que c'est également à tort, en particulier, en conséquence de l'illégalité du refus de séjour, que le préfet l'a en outre obligée à quitter le territoire français ;
9. Considérant que le moyen tiré de ce que Mme C...encourrait des risques de traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que Mme C...n'est en conséquence pas non plus fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet a fixé la Serbie comme pays de destination ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
11. Considérant le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme C...ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
12. Considérant que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme C...la somme que celle-ci demande en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 15NC02149