Procédure devant la cour :
I.) Par une première requête, enregistrée le 19 mai 2017 sous le n°17NC01146, M. Ponsart, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 mars 2017 ;
2°) de prononcer la réduction des impositions en matière d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2013 à concurence des montants respectifs de 8 518 euros (2010), 24 854 euros (2011), 21 248 euros (2012) et 15 485 euros (2013) ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les dispositions en cause de l'article 156-I-1° du code général des impôts ne sont pas conformes à l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- son activité agricole n'est pas structurellement déficitaire ; son déficit agricole devait dès lors être admis ;
- le montant des impositions auxquelles il a été assujetti présente un caractère confiscatoire en méconnaissance des principes dégagés par le Conseil constitutionnel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. Ponsart ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique enregistré le 12 janvier 2018, M. Ponsart conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration n'a pas fait application de la procédure de rectification contradictoire et n'a, à tout le moins, pas mis en oeuvre le principe général des droits de la défense.
II.) Par une seconde requête, enregistrée le 12 janvier 2018 sous le n° 18NC00097, M. Ponsart, représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 novembre 2017 ;
2°) de prononcer la réduction des impositions en matière d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 à hauteur des montants respectifs de 23 275 euros (2014) et 25 130 euros (2015) ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soulève les mêmes moyens que ceux exposés ci-dessus dans la requête n°17NC01146.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. Ponsart ne sont pas fondés.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 24 juillet 2018, M. Ponsart conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Il soutient en outre que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration n'a pas fait application de la procédure de rectification contradictoire et n'a, à tout le moins, pas mis en oeuvre le principe général des droits de la défense.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bauer,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. Ponsart, avocat et professeur associé à l'université de Reims, a exercé également une activité d'exploitant agricole dans les Ardennes à compter du 1er janvier 2010. Cette activité s'étant révélée déficitaire depuis sa création, il a en conséquence déclaré chaque année sur sa déclaration de revenus un déficit agricole qu'il a entendu déduire de ses revenus imposables. Les avis d'imposition notifiés par l'administration fiscale à compter de l'année 2010 n'ont cependant pas pris en compte l'imputation desdits déficits. Le contribuable a alors saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande de réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2015. Il relève appel des jugements des 9 mars et 9 novembre 2017 par lesquels le tribunal a rejeté ses demandes.
2. Les requêtes de M. Ponsart visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
3. L'article 156-I-1° du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au 1er janvier 2010, prévoit que : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel (...) sous déduction : I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; (...) Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : 1° des déficits provenant d'exploitations agricoles lorsque le total des revenus nets d'autres sources excède 104 665 euros (...) ". Ce seuil a été porté respectivement à 104 665 euros pour l'année 2011, à 106 225 euros pour les années 2012 et 2013, à 107 075 euros pour l'année 2014 et enfin à 107 610 euros pour l'année 2015.
4. En premier lieu, l'article L. 55 du livre des procédures fiscales dispose que : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts (...) les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A (...) ".
5. Il résulte de l'instruction qu'en l'espèce le refus de l'imputation du déficit agricole sur le revenu global ne procède pas de la constatation par le service d'une omission, d'une inexactitude, d'une insuffisance ou encore d'une dissimulation dans les éléments déclarés par le contribuable et servant de base à l'imposition qui l'aurait conduit à rectifier ces éléments, mais résulte de la simple application de la lettre de l'article 156 précité, lequel interdit la déduction du déficit agricole dès lors que les revenus de l'intéressé sont supérieurs au seuil légalement défini. L'administration n'était dès lors pas tenue de recourir à la procédure de rectification contradictoire prévue par l'article L. 55 précité.
6. En second lieu, le contribuable soutient que l'administration a méconnu le principe général des droits de la défense selon lequel lorsqu'une imposition est assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément à ce principe, mis à même de présenter ses observations. Toutefois, au cas d'espèce, les droits contestés sont bien ceux résultant des éléments déclarés par l'intéressé lesquels, ainsi qu'il a été dit précédemment, ne sont entachés d'aucune omission, inexactitude, insuffisance ou encore dissimulation et n'ont pas été remis en cause par le service. Seul le mode de calcul retenu par ce dernier, et tendant à déduire de son revenu imposable le déficit agricole déclaré alors que ses revenus excédaient le seuil, expressément mentionné par les dispositions du code général des impôts, au-delà duquel une telle déduction était autorisée, est erroné. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de la violation du principe général des droits de la défense doit être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition doit être écarté.
En ce qui concerne le bien fondé de l'imposition :
8. En premier lieu, en dehors des cas et conditions où il est saisi sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, qui prévoit que : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé (...) ", il n'appartient pas au juge de l'impôt de se prononcer sur un moyen tiré de la non-conformité de la loi à une norme de valeur constitutionnelle. Par ordonnance du 26 janvier 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en application de ces dispositions, a transmis au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité présentée par le requérant relative à la conformité à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen des dispositions en cause de l'article 156-I-1° du code général des impôts. Par un arrêt du 8 avril 2015, n°387470, le Conseil d'Etat a jugé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel cette question. Cette décision étant revêtue de l'autorité de chose jugée, le moyen réitéré dans la présente instance de l'inconstitutionnalité desdites dispositions de l'article 156 du code général des impôts ne peut plus être utilement discuté.
9. En deuxième lieu, la circonstance que l'activité agricole de M. Ponsart ne serait pas structurellement déficitaire est, à la supposer même établie, sans incidence sur le bien fondé des impositions en cause, établies conformément à la loi.
10. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, le contribuable ne peut utilement se prévaloir du caractère confiscatoire des impositions mises à sa charge, dès lors qu'elles ont été établies conformément à la loi dont la constitutionnalité ne peut plus être discutée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. Ponsart n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie tenue aux dépens ou la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. Ponsart sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...Ponsart et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 17NC01146, 18NC00097