Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2016, et un mémoire en réplique enregistré le 21 février 2017, la commune de Montferrand-Le-Château, représentée par la SCP Chaton-Grillon-Brocard-Gire, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon ;
A titre principal :
2°) de rejeter purement et simplement la requête présentée par les épouxB... ;
A titre subsidiaire :
3°) de réduire dans de notables et substantielles proportions les prétentions indemnitaires des épouxB... ;
En tout état de cause :
4°) de condamner le syndicat intercommunal d'assainissement de Grandfontaine (SIAG) à la garantir totalement des éventuelles condamnations prononcées à son encontre ;
5°) de condamner la société d'assurances Areas Dommages à la garantir des éventuelles condamnations restant à sa charge ;
Elle soutient que :
Sur le principe de l'obligation :
- l'existence des obligations dont se prévalent M. A...B..., en sa qualité d'exploitant horticole, et les époux B...en leur qualité de propriétaires sont sérieusement contestables ;
- ses appels en garantie formés à l'encontre du SIAG et la compagnie Areas Dommages sont parfaitement fondés ;
- la preuve de l'existence d'un préjudice anormal et spécial en lien avec l'existence ou le fonctionnement d'un ouvrage dont elle aurait la garde n'est pas rapportée ;
- le principe de sa responsabilité sur le fondement des dommages de travaux publics est sérieusement contestable ;
- le SIAG, dont elle est membre, exerce la compétence relative au transport des eaux usées au nom et pour le compte des communes adhérentes ;
- les ouvrages faisant l'objet de défauts de conception, à l'origine des débordements litigieux, sont nécessaires à l'exercice des compétences transférées au SIAG et ont donc été mis de plein droit à sa disposition à la date du transfert des compétences ;
- si les statuts du syndicat prévoient qu'elle devait financer son propre raccordement au réseau syndical, ils ne stipulent pas que les équipements et installations nécessaires à l'exercice des compétences transférées resteraient sa propriété ;
- les désordres litigieux ne sont pas liés à l'existence d'un ouvrage public, mais à son fonctionnement ;
- le SIAG doit assumer les obligations de propriétaire et de gestionnaire de ces ouvrages ;
Sur le montant de la provision :
- la nécessité des travaux de remise en exploitation des terres n'est nullement démontrée ;
- la réalité des pertes de commandes en provenance des établissements Kammerer comme son lien de causalité avec les inondations litigieuses ne sont pas démontrés ;
- les constats d'huissier versés aux débats par les requérant relatifs à la perte de marchandises ne sauraient avoir force probante ;
- il n'est pas démontré que la détérioration du chemin d'accès à la propriété des époux B...est imputable aux inondations litigieuses ;
Sur les appels en garantie :
- les ouvrages dont les défauts de conception sont à l'origine du débordement du réseau public d'assainissement sont la propriété du SIAG ;
- le SIAG n'a à aucun moment pris les mesures ou même ne l'a invitée à mettre en oeuvre des actions afin de limiter la quantité des effluents acheminés à l'entrée du réseau d'assainissement bisontin ;
- il n'est pas contestable ni contesté qu'elle est assurée " multirisques " auprès de la compagnie Areas Dommages.
- le premier juge a commis une erreur de droit en rejetant son appel en garantie dirigé contre la compagnie d'assurances ;
- la déchéance de garantie dont se prévaut la compagnie Areas Dommages n'a pas été portée à sa connaissance ;
- la compagnie Areas Dommages ne démontre pas que la procédure de référé expertise diligentée par les consorts B...et à laquelle la commune a participé aurait été de nature à nuire à ses intérêts ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 janvier, 9 février et 2 mars 2007, M. A... B..., exploitant horticole, et M. et MmeB..., représentés par MeD..., demandent à la Cour :
1°) de rejeter la requête d'appel de la commune de Montferrand-Le-Château ;
2°) de réformer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a limité le montant de leurs demandes indemnitaires en qualité d'exploitant horticole et de propriétaires ;
3°) de condamner la commune de Montferrand-Le-Château à verser une provision, à tout le moins, d'un montant de 214 760,05 euros à M. B...en tant qu'exploitant horticole ;
A défaut :
4°) de condamner la commune de Montferrand-Le-Château solidairement avec le SIAG à verser une provision, à tout le moins, d'un montant de 214 760,05 euros à M. B...en tant qu'exploitant horticole ;
5°) de condamner la commune de Montferrand-Le-Château à verser à une provision, à tout le moins, d'un montant de 14 071 euros à M. et Mme B...en tant que propriétaires ;
A défaut :
6°) de condamner la commune de Montferrand-Le-Château solidairement avec le SIAG à verser une provision, à tout le moins, d'un montant de 14 071 euros à M. et Mme B...en tant que propriétaires ;
7°) de réformer l'ordonnance attaquée en tant qu'elle a limité à 1 200 euros la somme mise à la charge de la commune au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;
En tout état de cause :
8°) de débouter les appelants de l'ensemble de leurs conclusions ;
9°) de mettre à la charge de la commune de Montferrand-Le-Château ou solidairement avec le SIAG une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- il ressort du rapport d'expertise que les inondations litigieuses résultent de débordements épisodiques d'eaux usées et pluviales issues du réseau communal d'assainissement ;
- ces débordements se produisent essentiellement à partir du regard EU 541 situé en bordure de la rue face au terrain de la pépinière ;
- ces débordements sont imputables, d'une part, à l'absence de collecte des eaux pluviales et de ruissellement d'une partie de la zone urbanisée riveraine de la rue de Besançon et, d'autre part, à des défauts de conception du réseau au droit de l'exploitation ;
- le montant des travaux nécessaires à la remise en exploitation des terres parcourues par l'eau a été validé par l'expert ;
- le préjudice relatif aux pertes de commandes en provenance des établissements Karmmerer a été validé par l'expert dans son principe et son quantum ;
- l'indemnisation accordée au titre de ces pertes de commandes a été diminuée à tort par rapport à ce qui était réclamé ;
- le préjudice lié à la perte de marchandises est établi ;
- c'est à tort que l'expert a refusé le principe d'une indemnisation spécifique pour la remise en état du chemin d'accès et de la cour ;
- ils ont la qualité de tiers par rapport aux ouvrages, propriété de la commune, à l'origine des désordres ;
- le préjudice qu'ils ont subi revêt, contrairement à ce que soutiennent le SIAG et la compagnie Areas Dommages, un caractère anormal et spécial ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2017, le syndicat intercommunal d'assainissement de Grandfontaine, représenté par MeE..., demande à la Cour :
A titre principal :
1°) de rejeter la requête d'appel de la commune de Montferrand-Le-Château en tant qu'elle formule des conclusions à son encontre ;
A titre subsidiaire :
2°) de réduire substantiellement la part de responsabilité pouvant être mise à sa charge ;
3°) de réduire le montant des indemnités réclamées par M. B...en tant qu'exploitant horticole et par M. et MmeB... ;
Il soutient que :
- il n'est propriétaire d'aucun ouvrage ayant pu participer aux inondations litigieuses ;
- Il n'a pas de compétence en matière d'eaux pluviales ;
- il n'a supporté aucune dépense d'investissement de 1994 à 2014 relative aux ouvrages mis en cause par l'expert ;
- la commune de Montferrand-Le-Château est gardienne des ouvrages de transport des eaux usées ;
- il conteste très fermement les estimations retenues par l'expert s'agissant des préjudices subis par les consortsB... ;
- les indemnisations sollicitées ne peuvent être formulées que hors taxe et non TTC ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2017, la compagnie Areas Dommages, représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'infirmer l'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en ce qu'elle a alloué une provision aux consortsB... ;
2°) de confirmer l'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon en ce qu'elle a rejeté l'appel en garantie dirigée par la commune de Montferrand-Le-Château à son encontre ;
3°) de condamner le SIAG à la garantir de toutes éventuelles condamnations ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme B...ou à tout succombant une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la déchéance de garantie doit être opposée à la commune de Montferrand-Le-Château, son assurée, qui ne l'a pas tenue informée de la présente procédure et de celle relative au référé expertise ;
- les ouvrages d'assainissement mis en cause relèvent exclusivement de la compétence du SIAG ;
- seule la responsabilité du SIAG pourrait, le cas échéant, être engagée en l'espèce ;
- la responsabilité de la commune de Montferrand-Le-Château ne saurait être recherchée ;
- il existe un doute sérieux quant à la cause du refoulement attribué par l'expert à un supposé sous-dimensionnement qui existe depuis l'origine sans avoir causé la moindre difficulté pendant une vingtaine d'années ;
- elle conteste le montant des sommes réclamées ;
- la nécessité des travaux de restauration des terres n'est pas démontrée ;
- le préjudice commercial dont se prévalent les consorts B...est sérieusement contestable ;
- il n'existe aucun lien de causalité démontré entre les inondations et les désordres affectant le chemin d'accès à la propriété ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 modifiée relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. A partir de février 2013 et au cours des années 2014 et 2015, l'exploitation horticole de M.B..., sise sur le territoire de la commune de Montferrand-le-Château (Doubs), ainsi qu'un terrain où est située sa maison d'habitation ont subi, notamment lors d'épisodes pluvieux, d'importantes inondations. Par ordonnance du 1er décembre 2014, complétée par une ordonnance du 7 avril 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a prescrit une expertise en vue, notamment, de décrire la nature et l'étendue des désordres provoqués par ces inondations. Outre les consorts B...et la commune de Montferrand-le-Château, le syndicat intercommunal d'assainissement de Grandfontaine (SIAG) a été appelé aux opérations d'expertise. L'expert désigné a rendu son rapport le 29 janvier 2016. M.B..., en sa qualité d'exploitant horticole et M. et MmeB..., en qualité de propriétaires, ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à la condamnation de la commune de Montferrand-le-Château à leur verser, d'une part, une provision d'un montant de 214 760,05 euros au titre des préjudices portant sur l'exploitation et, d'autre part, une provision d'un montant de 14 701 euros au titre des désordres affectant le terrain où se situe leur maison d'habitation. La commune de Montferrand-le-Château interjette appel de l'ordonnance du 17 novembre 2016 par laquelle le juge des référés l'a condamnée à verser aux consorts B...une provision de 144 526,78 euros au titre du premier chef de préjudice et une provision de 10 000 euros au titre du second chef de préjudice. Par des conclusions d'appel incident, M. et Mme B...demandent la réformation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle n'a fait que partiellement droit à leurs conclusions indemnitaires.
Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée :
2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui paraît revêtir un caractère de certitude suffisant.
En ce qui concerne le principe de l'obligation :
3. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers, tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure.
4. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que lors d'épisodes pluvieux soutenus mais de fréquence non exceptionnelle, les installations horticoles des consorts B...et leurs abords peuvent être affectés par les eaux pluviales de ruissellement non collectées, en amont et au droit de l'installation, ou par un mélange de ces eaux pluviales et d'eaux usées issues du réseau d'eau communal.
5. Selon l'expert, le ruissellement des eaux pluviales est imputable à l'absence de collecte de ces eaux dans la partie basse de la rue de Besançon au droit de la pépinière, mais aussi en amont de celle-ci. Le raccordement au réseau pluvial des avaloirs recueillant les eaux de la chaussée de la RD 105, en novembre 2013, ayant, néanmoins, permis de réduire une partie des écoulements pluviaux qui affectaient le parking de la pépinière.
6. S'agissant des eaux usées, l'expert expose que les débordements litigieux sont en rapport avec des défauts de conception relevés en différents points du dispositif en place, associés à un mode de collecte de type unitaire sur une partie du territoire concerné et notamment, le dimensionnement très insuffisant des installations.
7. Il résulte de ce qui précède que les désordres litigieux, imputables à des ouvrages publics à l'égard desquels les consorts B...ont la qualité de tiers, sont de nature à engager la responsabilité de la personne publique qui est la gardienne de ces ouvrages.
En ce qui concerne la détermination de la personne publique responsable :
S'agissant des désordres imputables aux eaux pluviales :
8. L'insuffisance et le sous-dimensionnement du réseau d'eaux pluviales sont imputables à la commune de Montferrand-le-Château, gardienne de cet ouvrage, dont la responsabilité est engagée même sans faute.
S'agissant des désordres imputables aux eaux usées ;
9. Aux termes de l'article 19 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 susvisée, applicable à la date d'adhésion de la commune de Montferrand-le-Château au syndicat intercommunal : " Le transfert d'une compétence entraîne de plein droit la mise à disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l'exercice de cette compétence. / Cette mise à disposition est constatée par un procès-verbal établi contradictoirement entre les représentants de la collectivité antérieurement compétente et de la collectivité bénéficiaire. Le procès-verbal précise la consistance, la situation juridique, l'état des biens et l'évaluation de la remise en état de ceux-ci (...) ".
10. Il résulte de l'instruction que, lors de l'adhésion de la commune de Montferrand-le-Château au syndicat intercommunal, il a été acté, par délibération du 10 mars 1992 de cet établissement, que cette adhésion s'effectuait sans droit d'entrée mais que la commune s'engageait à prendre en charge la construction de son collecteur et des ouvrages annexes, la gestion en étant confiée au syndicat dès que le raccordement deviendrait effectif. Ces ouvrages ont été réalisés par la commune qui en a assuré la maîtrise d'ouvrage et le financement et il n'est pas établi, en l'absence de la production d'un procès-verbal le constatant, qu'ils auraient fait l'objet, à la date d'adhésion ou ultérieurement, en application du code général des collectivités territoriales, d'un transfert de propriété au profit du syndicat. Il en résulte que le collecteur et les ouvrages annexes, construits par la commune de Montferrand-le-Château et à l'origine de la diffusion des eaux usées, doivent être regardés, en l'état de l'instruction, comme étant sa propriété, les stipulations de la convention passée entre la ville de Besançon et le SIAG n'étant pas de nature à infirmer cette considération. Le SIAG, quant à lui, n'a à sa charge que l'entretien et la maintenance desdits ouvrages.
11. Or, l'expert a relevé que les ouvrages d'assainissement impliqués dans les désordres constatés ne présentent pas de défauts d'entretien et sont dans un état de conservation et de fonctionnement satisfaisant. Ainsi, seule la responsabilité de la commune de Montferrand-le-Château peut être engagée en tant que maître des ouvrages litigieux.
12. Il résulte de ce qui précède que la commune de Montferrand-le-Château, qui n'établit ni même n'allègue que les désordres litigieux résulteraient d'une faute des consorts B...ou d'un cas de force majeure, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a jugé que le principe de l'obligation dont se prévalent ceux-ci à son encontre n'est pas sérieusement contestable.
En ce qui concerne le préjudice :
S'agissant de la restauration des terres :
13. Il résulte de l'instruction, notamment des observations de l'expert, que les écoulements d'eaux usées brutes sur les sols de la pépinière, mêmes épisodiques et limités dans le temps, peuvent être préjudiciables dans la durée au maintien d'une bonne qualité des sols, et que les eaux pluviales suffisent à provoquer le dépérissement des plantations indépendamment de leur composition chimique. C'est donc à bon droit, sans qu'il ait été nécessaire de procéder à une analyse des sols, que le premier juge a estimé qu'une restauration des terres de culture, situées soit à l'intérieur des tunnels soit entre des tunnels de l'exploitation, s'avérait nécessaire pour assurer une reprise de la production horticole, alors même qu'une partie de cette production s'effectuerait hors sol.
14. En se fondant sur le devis établi par les établissements Tyrode, soumis au contradictoire, avalisé par l'expert et dont il n'est pas démontré que les coûts des aménagements prévus ne correspondraient pas à ceux du marché, le premier juge, en fixant à la somme de 39 840,60 euros, le montant de la provision revêtant un caractère de certitude suffisant pour ce chef de préjudice a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative.
S'agissant de l'acquisition de tablettes :
15. Il résulte des constatations faites par l'expert, que la mise en place de supports hors-sol neufs dans l'un des tunnels le plus fréquemment concerné par les arrivées d'eaux constituait une mesure palliative nécessaire. L'indemnisation de ce matériel justifiée par des factures d'un montant total de 7 863,10 euros doit, dès lors, être regardée comme non sérieusement contestable.
S'agissant des pertes de commandes :
16. Au soutien de sa demande d'indemnisation relative aux pertes de commandes de la part de la société Krammerer, M. B...ne produit que deux courriers de cette entreprise, également du secteur horticole, datés des 30 septembre 2014 et 14 septembre 2015 faisant état, dans des termes vagues, de désistements de commandes. Toutefois, alors même que l'expert fait valoir dans son rapport qu'il s'est personnellement rapproché des établissements Krammerer pour se faire confirmer ces annulations de commandes, l'absence de production de bons de commandes pour l'achat de quantités aussi importantes de pots de plantes vivaces et de plantes annuelles ne permet pas, en l'état de l'instruction, de regarder la créance dont se prévaut M. B... à ce titre comme présentant un caractère non sérieusement contestable. Par suite, la commune de Montferrand-le-Château est fondée à soutenir que c'est à tort que le premier juge l'a condamnée, pour ce chef de préjudice, à verser à M. B...une provision de 55 000 euros.
S'agissant des pertes de marchandises :
17. Les constats d'huissier dressés les 24 octobre et 12 novembre 2013, 4 août et 25 septembre 2014 et 10 juillet 2015 attestent la réalité de destructions de plantes et de marchandises à chacune de ces dates. Au regard, d'une part, des estimations détaillées faites par M. B...lors de ces constats et, d'autre part de celles de l'expert, et enfin compte tenu des aléas portant sur la part des invendus dans un stock de végétaux, le premier juge n'a pas fait une inexacte appréciation de la fraction de la perte de marchandise revêtant un caractère suffisant de certitude en la fixant à un montant de 40 000 euros. Les frais de constats d'huissier nécessaires pour établir ces pertes de marchandises doivent également être inclus dans l'indemnisation à laquelle peut prétendre M. B...et ce, à hauteur de 1 823,80 euros.
S'agissant des dommages subis par M. et Mme B...en tant que propriétaires :
18. Il ressort du rapport d'expertise que les détériorations de la cour de la maison d'habitation des époux B...et du chemin privatif y menant sont dues principalement aux passages des véhicules et à la nature des matériaux en place soumis plus fréquemment à l'incidence des précipitations naturelles (pluie ou neige) qu'aux seules inondations. Dès lors, le lien de causalité entre ces désordres et la survenance des inondations litigieuses n'est pas suffisamment établi et l'obligation dont se prévalent M. et Mme B...à ce titre à l'encontre de la commune de Montferrand-le-Château ne peut être regardée, en l'état de l'instruction, comme non sérieusement contestable. La commune de Montferrand-le-Château est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 de l'ordonnance attaquée, le premier juge l'a condamnée à verser aux intéressés, pour ce chef de préjudice, une provision d'un montant de 10 000 euros.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Montferrand-le-Château est seulement fondée à demander, d'une part, l'annulation de l'article 2 de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Besançon par lequel il l'a condamnée à verser à M. et Mme B...une provision de 10 000 euros et d'autre part à ce que le montant de la provision qu'elle a été condamnée à verser à M.B..., en tant qu'exploitant horticole, par l'article 1er de ladite ordonnance soit ramené de la somme de 144 526,78 euros à celle de 89 526,78 euros.
Sur les appels en garantie formés par la commune de Montferrand-le-Château :
En ce qui concerne l'appel en garantie articulé à l'encontre du SIAG :
20. Comme il a été dit au point 11, seule la responsabilité de la commune de Montferrand-le-Château est susceptible d'être retenue dans la survenance des désordres litigieux en sa qualité de gardien du collecteur et de ses ouvrages annexes. En outre, il n'a été relevé aucune faute du SIAG dans ses charges de gestion et d'entretien du réseau d'assainissement. Par suite, l'appel en garantie de la commune à l'encontre du SIAG ne peut qu'être rejeté.
En ce qui concerne l'appel en garantie articulé à l'encontre de la compagnie Areas Dommages :
S'agissant de la fin de non- recevoir opposée par la compagnie Areas Dommages :
21. En premier lieu, si la compagnie Areas Dommages oppose à la commune de Montferrand-le-Château la déchéance de garantie prévue à l'article 2 de l'intercalaire P018NC095, le seul versement au débat d'un bordereau d'envoi de cet intercalaire, qui ne porte ni la signature ni le paraphe de l'exécutif local, n'est pas de nature, à lui seul, à établir que cette déchéance a été valablement portée à la connaissance de la commune.
22. En second lieu, en vertu de l'alinéa 2 de l'article L. 113-17 du code des assurances, l'assuré n'encourt aucune déchéance ni aucune sanction du fait de son immixtion dans la direction du procès, s'il avait intérêt à le faire.
23. Il résulte de l'instruction que la commune de Montferrand-le-Château a déclaré le sinistre litigieux, par courrier du 23 juillet 2013, à sa compagnie d'assurance, laquelle a désigné un cabinet afin de participer aux opérations d'expertise amiables. La commune avait toutefois un intérêt à participer aux opérations d'expertise, ordonnées le 1er décembre 2014 par le juge des référés du tribunal administratif de Besançon à la demande de M.B..., mesure d'instruction ne préjudiciant pas au fond et dont elle n'avait pas pris l'initiative. Dès lors, la commune ne saurait être regardée comme s'étant immiscée à tort dans la direction du procès, et ne saurait faire l'objet, au titre de cette participation, d'aucune déchéance ou autre sanction.
24. Il résulte de ce qui précède que la fin de non recevoir opposée par la compagnie Areas ne peut qu'être écartée.
S'agissant du bien-fondé de l'appel en garantie :
25. En vertu des articles 1er et 8 du contrat d'assurance passé entre la commune de Montferrand-le-Château et la compagnie Areas Dommages, la garantie, objet de ce contrat, s'applique aux conséquences pécuniaires de la responsabilité que la commune peut encourir par application des articles 1382 à 1386 du code civil, alors applicables, ou des règles de droit administratif ou encore à titre contractuel, en raison des dommages corporels matériels et immatériels - y compris ceux occasionnés par un incendie, une explosion ou par l'action de l'eau causés aux tiers.
26. Il résulte de l'instruction que les inondations ayant entraîné les désordres litigieux sont imputables à une insuffisance et un sous-dimensionnement du réseau d'eaux pluviales et à des défauts de conception du dispositif d'assainissement des eaux usées. La seule responsabilité de la commune de Montferrand-le-Château est ainsi engagée en tant que gardienne de ces ouvrages.
27. Par suite, il y a lieu, par application des stipulations précitées du contrat d'assurance, de faire droit aux conclusions de la commune de Montferrand-le-Château tendant à ce que la compagnie Areas Dommages la garantisse des condamnations prononcées à son encontre par la présente ordonnance, à hauteur de 89 526,78 euros .
Sur l'appel en garantie de la compagnie Areas Dommages à l'encontre du SIAG :
28. Comme il a été dit au point 11, seule la responsabilité de la commune de Montferrand-le-Château est susceptible d'être retenue dans la survenance des désordres litigieux en sa qualité de gardien du collecteur et de ses ouvrages annexes. Par suite, l'appel en garantie que la compagnie Areas Dommages articule à l'encontre du SIAG ne peut qu'être rejeté.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
30. Le juge des référés du tribunal administratif de Besançon en mentionnant dans les motifs de l'ordonnance attaquée qu'il y avait lieu d'accorder à l'exploitation B...et aux époux B...le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative puis en faisant figurer une somme de 1 200 euros dans l'article 3 de son dispositif a entaché cette ordonnance de contrariété entre les motifs et le dispositif. Il y a donc lieu d'annuler ladite ordonnance sur ce point, d'évoquer dans cette mesure et, par ailleurs, de statuer immédiatement sur les conclusions présentées sur le même fondement dans la présente instance.
En ce qui concerne les frais exposés et non compris dans les dépens de première instance :
31. Il y a lieu, dans les circonstances de première instance, de mettre à la charge de la commune de Montferrand-le-Château une somme de 1 500 euros qui sera versée à M. et Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
En ce qui concerne les frais exposés et non compris dans les dépens de la présente instance :
32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Montferrand-le-Château ou du SIAG, qui ne sont pas dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Pour les mêmes motifs, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions, présentées sur le même fondement, par la Compagnie Areas Dommages.
ORDONNE :
Article 1er : Les articles 2 et 3 de l'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon sont annulés.
Article 2 : La provision que la commune de Montferrand-le-Château a été condamnée à verser à M.B..., en tant qu'exploitant horticole, par l'article 1er de l'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon, est ramenée à la somme de 89 526,78 euros (quatre-vingt-neuf mille cinq-cent vingt-six euros et soixante-dix-huit centimes).
Article 3 : La compagnie Areas Dommages est condamnée à garantir la commune de Montferrand-le-Château des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci par la présente ordonnance à hauteur de 89 526,78 euros (quatre-vingt-neuf mille cinq-cent vingt-six euros et soixante-dix-huit centimes).
Article 4 : L'ordonnance du 17 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Besançon est réformée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance.
Article 5 : La commune de Montferrand-le-Château versera à M. et Mme B...une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais exposés et non compris dans les dépens de première instance.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête et des conclusions des autres parties, y compris celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.
Article 7 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Montferrand-le-Château, à l'exploitation de M. A...B..., à M. et Mme A...B..., au syndicat intercommunal d'assainissement de Grandfontaine et à la compagnie Areas Dommages.
Fait à Nancy, le 30 mars 2017.
La présidente de la Cour
Signé : Françoise SICHLER
La République mande et ordonne au préfet du Doubs, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme
Le Greffier en chef,
Jean-Pierre Bontemps
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16NC02647