Procédure devant la cour :
Par une requête et trois mémoires, enregistrés le 9 novembre 2020, le 20 septembre 2021, le 2 décembre 2021 et le 10 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 mai 2020 ;
2°) d'annuler la décision du directeur général de l'OFII du 26 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre au directeur général de l'OFII de le rétablir dans ses droits à l'allocation pour demandeur d'asile pour la période du 3 juillet 2018 au 31 décembre 2020, sous astreinte de 200 euros par jour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la décision litigieuse était illégale en raison de l'illégalité de la décision de suspension de ses conditions matérielles d'accueil ;
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a commis aucune fraude ; il ne saurait être fait droit à la demande substitution de base légale avec les dispositions de l'article 20 de la directive 2013/33/CE dès lors qu'une telle substitution le priverait d'une garantie et que les directives ne disposent pas d'un effet vertical descendant et ne peuvent être opposés par un Etat contre un particulier ; il ne peut être fait droit à la demande de substitution de motif dès lors qu'il n'a pas méconnu ses obligations de présentation et ne pouvait être considéré comme étant en fuite ;
- elle doit être annulée en conséquence de l'annulation par le tribunal administratif de Strasbourg de la décision de suspension de ses conditions matérielles d'accueil ;
- l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2016, n'est pas conforme aux dispositions de l'article 20.5 de la directive 2013/33/UE du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 16 février 2021 et le 9 décembre 2021, le directeur de l'OFII conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Le directeur de l'OFII a présenté un mémoire, enregistré le 15 décembre 2021, par lequel il conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens. Ce mémoire n'a pas été communiqué.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 8 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive 2013/33/UE du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marchal a été entendu au cours de l'audience publique.
1. M. B..., ressortissant afghan, né le 15 septembre 1994, a présenté le 14 octobre 2016 une demande d'asile en France et a bénéficié, à compter de cette date, des conditions matérielles d'accueil. M. B... a toutefois fait l'objet d'une décision de transfert vers l'Allemagne, pays alors responsable de l'examen de sa demande d'asile. Considéré comme étant en situation de fuite, M. B... s'est vu suspendre le bénéfice des conditions matérielles d'accueil à compter du 1er juin 2017. Après l'expiration du délai de transfert, M. B... a demandé le rétablissement des conditions matérielles d'accueil. Par une décision du 26 mars 2019, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a refusé de lui accorder le rétablissement des conditions matérielles. M. B... fait appel du jugement du 29 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Devant le tribunal administratif de Strasbourg, M. B... a soutenu que la décision litigieuse devait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision par laquelle l'OFII lui a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. Les premiers juges ont omis de répondre à ce moyen, tiré de l'annulation par voie de conséquence, qui n'était pas inopérant. Par suite, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Sur la légalité de la décision refusant le rétablissement des conditions matérielles :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. En premier lieu, le directeur général de l'OFII a, par une décision du 15 janvier 2019 régulièrement publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur en date du 15 février 2019, donné délégation à M. D... C..., directeur territorial adjoint, à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme A... E..., directrice territoriale à Strasbourg, les décisions se rapportant aux missions dévolues à la direction de Strasbourg, au nombre desquelles figurent les décisions relatives aux conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile. Par suite, alors qu'il n'est pas établi que Mme E... n'ait pas été absente ou empêchée, le moyen tiré de ce que M. C... n'était pas compétent pour signer la décision attaquée manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, la décision du directeur général de l'OFII comporte un exposé suffisant des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, la circonstance que ces motifs seraient erronés étant sans incidence sur l'existence et le caractère suffisant d'une telle motivation. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 744-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers alors applicables : " A la suite de la présentation d'une demande d'asile, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de procéder, dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d'asile, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d'accueil. Ces besoins particuliers sont également pris en compte s'ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d'asile. Dans la mise en œuvre des droits des demandeurs d'asile et pendant toute la période d'instruction de leur demande, il est tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables. / L'évaluation de la vulnérabilité vise, en particulier, à identifier les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes en situation de handicap, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents isolés accompagnés d'enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes atteintes de maladies graves, les personnes souffrant de troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d'autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle, telles que des mutilations sexuelles féminines. (...) ".
7. Si les dispositions de l'article L. 744-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile font obligation à l'OFII de procéder, à la suite d'un entretien personnel avec le demandeur d'asile, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d'accueil, elles n'imposent pas la tenue d'un nouvel entretien préalablement à la décision portant suspension du bénéfice de ces conditions matérielles d'accueil ou à la décision statuant sur une demande de rétablissement de ce bénéfice. Ainsi, M. B... ne saurait utilement soutenir avoir été privé d'un nouvel entretien avant l'intervention de la décision lui refusant le rétablissement du bénéfice des conditions matérielles d'accueil qui lui avaient été précédemment consenties.
8. En quatrième lieu, il ne résulte ni des dispositions de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni de celles de l'article D. 744-38 du même code que, lorsqu'il est saisi d'une demande de rétablissement des conditions matérielles d'accueil, l'OFII devrait mettre l'intéressé en mesure de présenter des observations écrites. L'OFII n'avait pas plus l'obligation de soumettre sa décision au respect d'une procédure contradictoire préalable sur le fondement de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que la décision a été adoptée à la suite d'une demande formulée par M. B.... Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été adoptée en méconnaissance du principe du contradictoire.
En ce qui concerne la légalité interne :
9. Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile, applicable au regard de la date à laquelle l'administration s'était initialement prononcée sur les conditions matérielles d'accueil dont M. B... pouvait bénéficier : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile a abandonné son lieu d'hébergement déterminé en application de l'article L. 744-7, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'informations ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile ; 2° Retiré si le demandeur d'asile a dissimulé ses ressources financières ou a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale ou en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d'hébergement ; 3° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2./ La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d'accueil est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur. / La décision est prise après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites dans les délais impartis. / Lorsque le bénéfice des conditions matérielles d'accueil a été suspendu, le demandeur d'asile peut en demander le rétablissement à l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".
10. Dans le cas où les conditions matérielles d'accueil ont été suspendues sur le fondement de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015, le demandeur peut, notamment dans l'hypothèse où la France est devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile, en demander le rétablissement. Il appartient alors à l'Office français de l'immigration et de l'intégration, pour statuer sur une telle demande de rétablissement, d'apprécier la situation particulière du demandeur à la date de la demande de rétablissement au regard notamment de sa vulnérabilité, de ses besoins en matière d'accueil ainsi que, le cas échéant, des raisons pour lesquelles il n'a pas respecté les obligations auxquelles il avait consenti au moment de l'acceptation initiale des conditions matérielles d'accueil.
11. En premier lieu, il ressort des termes de la décision litigieuse que pour refuser de rétablir le droit aux conditions matérielles d'accueil de M. B..., le directeur général de l'OFII s'est fondé sur les dispositions du 2° de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que seules les dispositions du dernier alinéa de l'article L.744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile étaient applicables à la demande de M. B.... L'OFII doit cependant être regardé comme sollicitant une substitution de base légale afin que la décision de refus de rétablissement des conditions matérielles d'accueil soit fondée sur les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur un autre fondement que le texte dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assorti le fondement sur lequel la décision aurait dû être prononcée.
13. En l'espèce, les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, telles qu'interprétées au point 10 du présent arrêt, qui régissent les demandes de rétablissement des conditions matérielles d'accueil, peuvent être substituées aux dispositions du 2° du même article à tort mises en œuvre par l'OFII dans la décision attaquée. Contrairement à que soutient M. B..., cette substitution ne le prive d'aucune garantie, dès lors notamment que la seule circonstance que l'administration n'avait pas, initialement, examiné sa vulnérabilité ne saurait, par elle-même, constituer une privation de garantie. M. B... ne saurait pas plus s'opposer à cette substitution de base légale au motif que la directive 2013/33/UE serait dépourvue d'effet " vertical descendant ", alors que cette directive n'est pas le fondement, après substitution, de la décision litigieuse.
14. En deuxième lieu, M. B... conteste le motif tiré de ce qu'il aurait obtenu frauduleusement les condition matérielles d'accueil, alors qu'il a toujours respecté les obligations auxquelles il a consenti et qu'il était titulaire d'une attestation pour demandeur d'asile depuis juillet 2018. La circonstance que le demandeur d'asile ait pu, en dépit de ce qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement vers un autre pays membre, se maintenir en France jusqu'à l'expiration du délai d'exécution du délai de transfert et ainsi attendre que la France devienne l'Etat responsable de sa demande d'asile ne caractérise pas, par elle-même, une fraude aux conditions matérielles d'accueil. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que l'OFII lui a opposé le motif tiré de la fraude pour lui refuser le rétablissement des conditions matérielles d'accueil.
15. L'OFII sollicite néanmoins que soit substitué à ce motif ceux tirés de ce que M. B... n'a pas respecté les obligations auxquelles il avait consenti au moment où il a accepté les conditions matérielles d'accueil et de ce qu'il ne fait état d'aucune vulnérabilité particulière ni de besoins particuliers.
16. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir, devant le juge de l'excès de pouvoir, que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision, sous réserve que cette substitution de motifs ne prive pas l'intéressé d'une garantie procédurale.
17. Il ressort des pièces du dossier que, par une lettre du 7 février 2017, reçue par M. B... le 20 février 2017, le préfet du Bas-Rhin a exigé que le requérant se présente dans un délai de 8 jours auprès des services de la police aux frontières pour organiser son départ à la suite de l'accord des autorités allemandes à son transfert dans ce pays. Par une lettre du 23 mars 2017, reçue par M. B... le 25 mars 2017, le préfet du Bas-Rhin lui a imposé, à défaut de s'être rapproché des services de la police aux frontières dans le délai imparti, de se présenter dans un délai de quinze jours devant ces mêmes services. M. B... n'apporte aucun élément attestant qu'il aurait respecté ces obligations et n'apporte également aucune explication pour justifier ne pas s'être présenté aux autorités dans le cadre de la procédure de transfert. De plus, M. B..., qui se borne à soutenir qu'il était sans ressource, n'apporte aucun élément pour démontrer qu'il présentait une situation de vulnérabilité particulière ou des besoins particuliers. Ainsi et alors que le défaut d'examen initial par l'OFII de la condition de vulnérabilité n'a, ainsi qu'il a été précisé au point 13, pas privé l'intéressé d'une garantie procédurale, il doit être fait droit à la demande de substitution de motif présentée par l'OFII. Par suite, les moyens tirés de ce que le directeur général de l'OFII, en refusant de faire droit à sa demande de rétablissement des conditions matérielles d'accueil, a entaché la décision contestée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation doivent être écartés.
18. En troisième lieu, en raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.
19. Par un jugement n° 1908814 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision implicite par laquelle le directeur général de l'OFII a initialement suspendu à M. B... le bénéfice des conditions matérielles d'accueil et a enjoint à l'OFII de procéder au réexamen des droits de M. B... à l'allocation pour demandeur d'asile pour la période du 1er juin 2017 au 26 mars 2019 dans un délai d'un mois suivant la notification du présent jugement. Il ressort des pièces du dossier que, en application de cette injonction, le directeur général de l'OFII a, par une lettre du 10 novembre 2020, informé M. B... de son intention d'adopter une nouvelle décision de suspension et de ce que, à défaut de lui faire parvenir des observations en réponse dans un délai de 15 jours, la décision de suspension serait " effective ". Ce courrier révèle ainsi qu'en application de l'injonction ordonnée par le jugement susmentionné, une décision de suspension des conditions matérielles d'accueil de M. B... du 1er juin 2017 au 26 mars 2019 a, à défaut pour l'OFII d'avoir reçu des observations de M. B..., été adoptée quinze jours après l'envoi du courrier du 10 novembre 2020, soit au 25 novembre 2020. La circonstance, à la compter établie, que M. B... n'ait pas reçu notification de ce courrier est sans incidence sur l'existence de cette décision. M. B... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'annulation par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg de la décision implicite suspendant ses conditions matérielles implique l'annulation par voie de conséquence de la décision litigieuse, dès lors que l'OFII a, le 25 novembre 2020, adopté une décision suspendant rétroactivement les conditions matérielles de l'intéressé. Le moyen doit ainsi être écarté.
20. En quatrième lieu, M. B... soutient que les dispositions précitées au point 9 de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015, ne sont pas conformes à l'article 20, paragraphe 5, de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 en tant qu'elles n'imposent pas en toutes circonstances l'accès aux soins médicaux et la garantie d'un niveau de vie digne. Toutefois, les cas de suspension, de retrait et de refus du bénéfice des conditions matérielles d'accueil prévus par les dispositions de l'article L. 744-8, issues de la loi du 29 juillet 2015 transposant en droit interne la directive précitée, correspondent aux hypothèses fixées à l'article 20 de cette directive dans lesquelles les Etats membres peuvent " limiter ou, dans des cas exceptionnels et dûment justifiés, retirer le bénéfice des conditions matérielles d'accueil ". Ainsi, ces dispositions, qui écartent toute automaticité de refus des conditions matérielles d'accueil et qui imposent un examen particulier de la situation du demandeur d'asile, en particulier de sa vulnérabilité, ne peuvent être regardées comme constituant une transposition incorrecte de la directive. Il ne ressort en outre ni de ces dispositions, ni d'aucune autre que la suspension, le retrait ou le refus des conditions matérielles d'accueil feraient en toutes circonstances obstacle à l'accès aux autres dispositifs prévus par le droit interne répondant aux prescriptions de l'article 20, paragraphe 5, de la directive du 26 juin 2013, si l'étranger considéré en remplit par ailleurs les conditions, et notamment à l'application des dispositions de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles relatives à l'aide médicale de l'Etat ou de l'article L. 345-2-2 du même code relatives à l'hébergement d'urgence. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il a été fait application, seraient incompatibles avec l'article 20 de la directive 2013/33/UE au motif que la suspension, le retrait et le refus qu'elles prévoient priveraient les demandeurs d'asile d'un niveau de vie digne. Le moyen ainsi formulé doit être écarté.
21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par l'OFII devant le tribunal administratif de Strasbourg, que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... doivent être rejetées. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. B..., de même que celles qu'il a présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1904789 du tribunal administratif de Strasbourg du 29 mai 2020 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg ainsi que le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
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N° 20NC03268