Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 24 juin 2020, sous le n° 20NC01288, Mme G... F..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1902683, 1902684 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy du 3 décembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) d'annuler la décision du préfet des Vosges du 26 août 2019 lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, dans un délai de quarante-huit heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil la somme de 1 800 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- le jugement de première instance est entaché d'irrégularité dès lors que la magistrate désignée n'a pas répondu à son moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet des Vosges au regard des dispositions du 6° du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions du 6° du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision en litige est également entachée d'erreur de fait sur sa situation familiale en France ;
- elle méconnaît le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10°de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que celles de l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 24 juin 2020, sous le n° 20NC01289, M. B... E..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1902683, 1902684 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy du 3 décembre 2019 en tant qu'il rejette sa demande ;
2°) d'annuler la décision du préfet des Vosges du 26 août 2019 lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, dans un délai de quarante-huit heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cinquante euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement de première instance est entaché d'irrégularité dès lors que la magistrate désignée n'a pas répondu à son moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet des Vosges au regard des dispositions du 6° du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions du 6° du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision en litige est également entachée d'erreur de fait sur la situation familiale en France de sa compagne ;
- elle méconnaît le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- en refusant d'admettre au séjour sa compagne en qualité d'étranger malade, le préfet des Vosges a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10°de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que celles de l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
Mme F... et M. E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 7 avril 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 20NC01288 et 20NC01289, présentées pour Mme G... F... et pour M. B... E... concernent la situation d'un même couple d'étrangers au regard de leur droit au séjour en France. Elles soulèvent des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. E... et Mme F... sont des ressortissants bosniens, nés respectivement le 2 juin 1981 et le 5 novembre 1979. Ils ont déclaré être entrés irrégulièrement en France le 29 août 2013, accompagnés de leur fils mineur né le 17 juillet 2005. Ils ont présenté chacun une demande d'asile, qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 décembre 2013 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 2 juin 2014. A la suite de sa demande de mars 2015, Mme F... a été mise en possession, à compter du 10 juillet 2016, d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui a été régulièrement renouvelé jusqu'au 9 juillet 2017. Au cours de la même période, M. E... a, quant à lui, été admis au séjour en qualité d'accompagnant d'un étranger malade. Les requérants ont sollicité le renouvellement de leur titre de séjour. Toutefois, à la suite de l'avis défavorable du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 1er janvier 2018, le préfet des Vosges, par deux arrêtés du 29 juin 2018, dont la légalité a été confirmée par un jugement n° 1900760 et 1901106 du tribunal administratif de Nancy du 18 juin 2019, a refusé de faire droit à leur demande et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 29 janvier 2019, M. E... et Mme F... ont sollicité chacun le réexamen de leur demande d'asile. Leur demande respective ayant été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 11 février 2019, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2019, le préfet des Vosges, par deux nouveaux arrêtés du 26 août 2019, pris en application des dispositions du 6° du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, leur a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Les requérants ont saisi chacun le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 26 août 2019. Ils relèvent appel du jugement n° 1902683, 1902684 du 3 décembre 2019, qui rejettent leur demande respective.
Sur la régularité du jugement :
3. Il ressort des pièces du dossier que, dans leur demande de première instance, les requérants ont soutenu que les décisions portant obligation de quitter le territoire français prises à leur encontre sont entachées d'une erreur de droit au regard des dispositions du 6° du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'aucune mesure d'éloignement ne peut légalement être fondée sur un refus de demande d'asile intervenu cinq ans auparavant. La magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy, qui a visé ce moyen, a omis d'y répondre. Une telle omission affecte la régularité du jugement de première instance, qui doit être annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. E... et de Mme F... tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur ces conclusions et, par la voie de l'effet dévolutif, sur les autres conclusions des requêtes.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les décisions en litige ont été signées, " pour le préfet et par délégation ", par M. Julien Le Goff, secrétaire général de la préfecture des Vosges. Or, par un arrêté du 21 août 2018, régulièrement publié au recueil spécial n° 67 des actes administratifs de la préfecture du 24 août 2018, le préfet des Vosges a consenti à l'intéressé une délégation de signature à l'effet notamment de signer, à compter du 27 août 2018, tous actes, arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, y compris en matière de police des étrangers, à l'exception des réquisitions du comptable et de la force armée. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'autorité signataire des décisions en litige manque en fait et il ne peut, dès lors qu'être écarté.
5. En deuxième lieu, lorsqu'il présente une demande d'asile, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche, qui tend à son maintien régulier sur le territoire français sur ce fondement, ne saurait ignorer que, en cas de rejet de sa demande, il peut faire l'objet, le cas échéant, d'un refus d'admission au séjour et, lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui a été définitivement refusé, d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient, lors du dépôt de sa demande d'asile, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles et notamment celles de nature à permettre à celle-ci d'apprécier son droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il en est de même lorsque l'étranger sollicite le réexamen de sa situation au titre de l'asile.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. E... et Mme F... auraient vainement sollicité un entretien avec les services de la préfecture des Vosges, ni qu'ils auraient été empêchés, lors du dépôt et au cours de l'instruction de leur demande de réexamen de leur demande d'asile, de faire valoir auprès de l'administration tous les éléments jugés utiles à la compréhension de leur situation personnelle. Par suite, alors que les intéressés ne pouvaient raisonnablement ignorer que, en cas de rejet de leur demande de réexamen, ils étaient susceptibles de faire l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu, tel que garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne, ne peut être accueilli.
7. En troisième lieu, contrairement aux allégations des requérants, il ne ressort, ni des motifs des décisions en litige, ni d'aucune autre pièce des dossiers, que le préfet des Vosges se serait abstenu de procéder à un examen particulier de leur situation personnelle. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré du défaut d'un tel examen.
8. En quatrième lieu, à supposer même que le préfet des Vosges ait indiqué à tort que, en dehors de leur fils mineur, M. E... et Mme F... n'ont pas d'attaches familiales en France, alors que plusieurs membres de leur famille y résideraient de façon régulière, l'inexactitude matérielle ainsi commise est en l'espèce sans incidence sur la légalité des décisions en litige, lesquelles ont été prises en application des dispositions du 6° du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté.
9. En cinquième lieu, aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; 4° bis Sans préjudice du 4° du présent article, l'office a pris une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 723-11 ; 5° L'étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ; (...) ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 723-11 du même code : " L'office peut prendre une décision d'irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d'octroi de l'asile sont réunies, dans les cas suivants : (...) 3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l'issue d'un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l'article L. 723-16, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article. ".
10. Il ressort des pièces du dossier que M. E... et Mme F... ont, par courriers du 29 janvier 2019, sollicité chacun le réexamen de leur situation au titre de l'asile. Il est constant que leur demande respective a été déclarée irrecevable par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par deux décisions en date du 11 février 2019, qui ont été confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2019. Dans ces conditions, les requérants ne bénéficiant plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des dispositions combinées des articles L. 743-1 et L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet des Vosges pouvait légalement prendre à leur encontre une obligation de quitter le territoire français en application du 6° du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du même code. Par suite, alors même que les demandes d'asile présentées initialement par les intéressés ont été définitivement rejetées par la Cour nationale du droit d'asile le 2 juin 2014, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
11. En sixième lieu, M. E... et Mme F... ne sauraient utilement invoquer, pour contester la légalité des mesures d'éloignement litigieuses, une méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de celles de l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 susvisé. Par suite, ces moyens doivent être écartés comme inopérants.
12. En septième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
13. D'une part, M. E... ne saurait utilement se prévaloir de l'état de santé de sa compagne pour soutenir que la décision en litige le concernant serait contraire aux dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 1er janvier 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de Mme F... nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et lui permettait de voyager sans risque à destination de son pays d'origine. Si la requérante présente un état anxio-dépressif important et persistant et bénéficie de la reconnaissance de travailleur handicapé pour la période allant du 1er décembre 2017 au 30 novembre 2022, elle n'établit pas, ni même n'allègue, que son état de santé se serait aggravé depuis le prononcé de l'avis du 1er janvier 2018. En outre, ni ses allégations sur l'indisponibilité de son traitement en Bosnie-Herzégovine, ni les éléments médicaux versés au dossier, spécialement les certificats de son médecin psychiatre des 6 juillet 2018 et 4 mars 2019, rédigés en termes identiques, ne sont de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle s'est livré le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur les conséquences résultant d'un défaut de prise en charge et sur la capacité de l'étranger à voyager sans risque. Enfin, Mme F... ne démontre pas que ses troubles psychiatriques seraient en lien avec des événements traumatisants vécus en Bosnie-Herzégovine et qu'ils seraient susceptibles de s'aggraver du fait même de son retour dans ce pays Par suite, sans qu'il soit besoin d'ordonner un supplément d'instruction, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli.
14. En huitième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
15. M. E... et Mme F... font valoir que le centre de leurs intérêts familiaux, matériels, médicaux et moraux se trouve désormais en France. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les requérants sont entrés sur le territoire français le 29 août 2013 à l'âge respectivement de trente-deux et de trente-trois ans. Ayant été admis à séjourner uniquement en tant qu'étranger malade et accompagnant d'un étranger malade, ils n'ont pas vocation à demeurer en France. Contrairement à leurs allégations, les intéressés ne justifient pas, par les pièces versées au dossier, de leur intégration dans la société française. Ils ne démontrent pas davantage être isolés dans leur pays d'origine. Enfin, les requérants, qui font tous deux l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, n'établissent pas qu'ils seraient dans l'impossibilité de reconstituer leur cellule familiale en Bosnie-Herzégovine, ni que leur fils mineur ne pourrait y poursuivre une scolarité normale. Par suite, alors même que certains membres de leur famille résideraient régulièrement en France, que M. E... a travaillé quatorze mois comme manutentionnaire et cueilleur de fruits et qu'il est bénéficiaire d'une promesse d'embauche datée du 12 février 2018 en qualité de manoeuvre, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
16. En neuvième et dernier lieu, pour les raisons qui viennent d'être exposées, le moyen tiré de ce que les décisions en litige seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants doit être écarté.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... et Mme F... ne pas fondés à demander l'annulation des décisions du préfet des Vosges du 26 août 2019 leur faisant obligation de quitter le territoire français. Ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes en tant qu'elles sont dirigées contre les décisions du même jour portant fixation du pays de destination. Par voie de conséquence, les conclusions des requêtes à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme réclamée par M. E... et Mme F... en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1902683, 1902684 du 3 décembre 2019 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy est annulé en tant qu'il a rejeté les demandes de M. E... et Mme F... tendant à l'annulation des décisions du préfet des Vosges du 26 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français.
Article 2 : Les demandes présentées en première instance par M. E... et Mme F..., en tant qu'elles tendent à l'annulation des décisions du préfet des Vosges du 26 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français, sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme G... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Vosges.
N° 20NC01288 et 20NC01289 2