Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2020, Mme D... E..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1902903 du 6 mars 2020 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Marne du 24 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour " étudiant " ;
4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge le versement à son conseil de la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.
Elle soutient que le préfet de la Marne, en considérant qu'elle ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études, a commis une erreur d'appréciation au regard de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été régulièrement communiquée au préfet de la Marne, qui n'a pas défendu dans la présente instance.
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... E... est une ressortissante malgache, née le 30 avril 1997. Elle est entrée régulièrement en France, le 5 septembre 2016, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa valant titre de séjour et portant la mention " étudiant ", valable du 22 août 2016 au 22 août 2017 et régulièrement renouvelé jusqu'au 22 août 2019. Par un courrier du 22 août 2019, la requérante a sollicité un nouveau renouvellement de son titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, estimant que l'intéressée ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études, le préfet de la Marne, par un arrêté du 24 octobre 2019, a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. Mme E... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 octobre 2019. Elle relève appel du jugement n° 1902903 du 6 mars 2020, qui rejette sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement d'un titre de séjour :
2. Aux termes du premier alinéa du premier paragraphe de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France. (...) ". Pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", d'apprécier, sous le contrôle du juge administratif de l'excès de pouvoir, la réalité et le sérieux des études poursuivies. A cet égard, le caractère réel et sérieux de ces études est subordonné à une progression régulière de l'étudiant et à la cohérence de son parcours.
3. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que Mme E... s'est d'abord inscrite en première année de licence " Science et vie de la terre " à l'université de Reims-Champagne-Ardenne, au titre des années 2016-2017 et 2017-2018. Après avoir été ajournée la première année avec une moyenne générale de 3,954/20, elle a été déclarée " défaillante " la seconde année. Si la requérante s'est ensuite inscrite en première année de licence " Arts du spectacle vivant " à l'université de Reims Champagne-Ardenne au titre de l'année 2018-2019, il est constant qu'elle a indiqué avoir abandonné ses études en cours d'année sans fournir le moindre justificatif de résultats. Mme E... fait valoir qu'elle souffre depuis plusieurs années d'un état dépressif chronique nécessitant un suivi médico-psychiatrique. Toutefois, contrairement à ses allégations, les deux certificats médicaux versés au dossier, eu égard aux termes dans lesquels ils sont rédigés, ne suffisent pas à expliquer ces échecs répétés, notamment lors de l'année 2018-2019. Désormais inscrite, au titre de l'année 2019-2020, en première année de brevet de technicien supérieur " Traitement des matériaux " au lycée " Benjamin Franklin " de Reims, la requérante se prévaut de ses très bons résultats, qui lui ont permis de valider sans difficulté ses deux semestres. Elle verse aux débats, pour en justifier, ses bulletins scolaires, ainsi que plusieurs lettres de soutien ou de recommandation de ses professeurs. Toutefois, il est constant que, à la date de l'arrêté en litige du 24 octobre 2019, Mme E... n'avait validé aucune année et même aucune matière en trois ans et qu'elle a changé d'orientation à deux reprises. Elle ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire du ministère de l'intérieur du 7 octobre 2008, relative à l'appréciation du caractère réel et sérieux des études des étudiants étrangers qui sont dépourvues de toute portée impérative. Par suite, à supposer même que la requérante dispose de moyens d'existence suffisants et que la formation de brevet de technicien supérieur suivie en France n'existe pas à Madagascar, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir, eu égard à l'absence totale de progression dans ses études et au manque de cohérence dans son parcours universitaire à la date de l'arrêté contesté, que le préfet de la Marne a commis une erreur d'appréciation en refusant de lui renouveler le titre de séjour sollicité.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 octobre 2019. Par suite, elle n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ses conclusions à fin d'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative et ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour Mme D... E... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
N° 20NC01466 4