Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 avril 2017, M. C...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 février 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 16 juin 2015 par laquelle le maire de la commune de Forbach l'a informé du non-renouvellement de son contrat à durée déterminée après le 30 juin 2015, ainsi que de la décision implicite de rejet du recours gracieux qu'il avait formé le 13 juillet 2015 ;
3°) d'enjoindre à la commune de Forbach de le réintégrer dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Forbach la somme de 2 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le non-respect du préavis prévu par l'article 38-1 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 entache d'illégalité la décision attaquée et constitue une faute ;
- il occupait un emploi permanent et ne remplaçait aucun fonctionnaire ; la commune de Forbach ne démontre pas que l'intérêt du service justifiait de ne pas renouveler son contrat ;
- la procédure de recrutement d'un nouveau contractuel est illégale en l'absence de publicité préalable de l'emploi à pourvoir, de déclaration de vacance et d'attente d'un délai raisonnable ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors que le recours à de nombreux contrats à durée déterminée est abusif ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2017, la commune de Forbach, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M.B..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de ce que le non-respect du délai de préavis constituerait une faute est nouveau en appel ; en tout état de cause, cette irrégularité est seulement susceptible d'engager la responsabilité de la collectivité et l'intéressé ne présente aucune prétention indemnitaire à ce titre ;
- le recours au contrat à durée déterminée était fondé et qu'aucune erreur de droit et aucun détournement de pouvoir n'ont été commis par la commune ;
- le requérant ne remplit pas les conditions de la loi du 12 mars 2012 ;
- le recrutement d'un nouveau contractuel, bénéficiant des qualifications adéquates, a été effectué après avoir vainement tenté de le pourvoir par un fonctionnaire ;
- le renouvellement des contrats du requérant n'a pas été abusif ;
- le requérant n'a aucun droit à une requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée, quelles que soient ses qualités.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;
- la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barteaux,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me D...pour M.B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...a été recruté par contrat à durée déterminée en qualité de chef du centre technique municipal de la commune de Forbach à compter du 1er juillet 2013, pour une durée d'un an. Ce contrat a été reconduit, à deux reprises, pour une durée de six mois. Par un courrier du 16 juin 2015, le maire de Forbach l'a informé que son contrat ne serait pas renouvelé à son échéance du 30 juin 2015. Le recours gracieux présenté par l'intéressé tendant à la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée a été rejeté implicitement par le maire. M. B...a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'un recours en annulation de la décision de non renouvellement de son contrat et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement du 28 février 2017, dont il fait appel, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 38 du décret du 15 février 1988, dans sa version applicable au litige : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : / (...)/2° Au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ; (...) ".
3. La méconnaissance du délai dont dispose l'administration pour notifier à l'agent non titulaire son intention de renouveler ou non son engagement, si elle est susceptible d'engager la responsabilité de l'administration, n'entraîne pas l'illégalité de la décision de non renouvellement du contrat. Par suite, le moyen tiré de ce que la commune de Forbach n'a pas respecté le délai de préavis d'un mois prévu par les dispositions précitées est sans incidence sur la légalité de la décision contestée et doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et pour les besoins de continuité du service, les emplois permanents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la présente loi peuvent être occupés par des agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire. Le contrat est conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder un an. (...) / Sa durée peut être prolongée, dans la limite d'une durée totale de deux ans, lorsque, au terme de la durée fixée au deuxième alinéa du présent article, la procédure de recrutement pour pourvoir l'emploi par un fonctionnaire n'a pu aboutir ".
5. Il incombe au juge, pour apprécier si le recours à des contrats à durée déterminée successifs présente un caractère abusif, de prendre en compte l'ensemble des circonstances de fait qui lui sont soumises, notamment la nature des fonctions exercées, le type d'organisme employeur ainsi que le nombre et la durée cumulée des contrats en cause. Un renouvellement abusif de contrats à durée déterminée ouvre à l'agent concerné un droit à l'indemnisation du préjudice qu'il subit lors de l'interruption de la relation d'emploi, évalué en fonction des avantages financiers auxquels il aurait pu prétendre en cas de licenciement s'il avait été employé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.
6. M. B...soutient que le recours à des contrats à durée déterminée successifs est abusif. Toutefois, à supposer même que le renouvellement de ces contrats ait été abusif, cette circonstance serait sans incidence sur la décision de ne pas renouveler son contrat et ne confèrerait au requérant aucun droit à un contrat à durée indéterminée. Elle serait seulement susceptible d'engager la responsabilité de la commune de Forbach. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier, notamment des contrats conclus avec la commune, que l'intéressé a été recruté, en application des dispositions de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984, par contrat à durée déterminée d'un an, renouvelé deux fois pour une durée de six mois, pour pourvoir un poste vacant de responsable du centre technique municipal, au grade de technicien principal de 2ème classe, alors qu'il n'avait pu être pourvu par aucun fonctionnaire. Au regard de la durée cumulée de deux ans des contrats, de leur fondement et de la nature des fonctions exercées par M.B..., le renouvellement des contrats ne présente pas un caractère abusif.
7. En troisième lieu, M. B...ne peut utilement soutenir qu'il aurait pu bénéficier d'un contrat à durée indéterminée en application des dispositions de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, dont les modes dérogatoires d'accès à des cadres d'emplois de la fonction publique territoriale ont été prolongés jusqu'au 12 mars 2018, en application des dispositions du III de l'article 41 de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, dès lors que ces dispositions n'étaient pas applicables à la date à laquelle son contrat est arrivé à échéance. Au surplus, il n'établit pas satisfaire aux conditions prévues par la loi du 12 mars 2012, notamment la durée de service effectif.
8. En quatrième lieu, M. B...ne peut utilement se prévaloir à l'encontre des décisions contestées de l'illégalité du recrutement de l'agent contractuel occupant son poste dès lors qu'à la supposer établie, cette circonstance n'est pas de nature à les entacher d'illégalité.
9. En cinquième lieu, le titulaire d'un contrat à durée déterminée ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat et l'autorité compétente peut toujours, pour des motifs tirés de l'intérêt du service, décider de ne pas renouveler son contrat et mettre fin à ses fonctions. Si la décision de ne pas renouveler un contrat à durée déterminée n'a pas à être motivée, il appartient au juge, en cas de contestation de celle-ci, de vérifier qu'elle est fondée sur l'intérêt du service.
10. M. B...soutient que le non-renouvellement de son contrat à durée déterminée n'est pas justifié par l'intérêt du service dès lors qu'un autre contractuel a été immédiatement recruté. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la commune de Forbach n'a recruté un agent non titulaire pour occuper le poste de responsable du centre technique que par contrat du 5 janvier 2016, soit plus de six mois après l'échéance du contrat du requérant. En outre, par une délibération du 14 décembre 2015, la commune de Forbach a décidé de pourvoir ce poste par un fonctionnaire appartenant au cadre d'emploi des ingénieurs territoriaux, dont il est constant que M. B...ne possédait pas le niveau. Par ailleurs, si le poste est demeuré vacant durant six mois et n'a pas été supprimé, cette circonstance ne permet pas de regarder le non renouvellement du contrat de l'intéressé comme fondé sur des considérations étrangères à l'intérêt du service dès lors que l'intéressé ne disposait pas d'un droit à un renouvellement de son contrat aussi longtemps que le poste ne serait pas pourvu par un fonctionnaire. En outre, la durée maximale de deux ans prévue par les dispositions de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984, durant laquelle un contrat fondé sur ce motif peut être renouvelé, était atteinte. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le non renouvellement de son contrat repose sur des considérations étrangères à l'intérêt du service.
11. En sixième lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions contestées ne reposent pas sur des motifs étrangers à l'intérêt du service. De plus, la durée maximale de deux ans pendant laquelle des contrats peuvent être conclus dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire était atteinte. Il s'ensuit que, quelles que puissent être les compétences professionnelles et relationnelles de M. B...et les formations qu'il a pu suivre, le maire de Forbach n'a pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation le refus de renouveler son contrat.
12. En dernier lieu, M. B...n'établit pas, eu égard aux motifs pour lesquelles la commune de Forbach a décidé de ne pas renouveler son contrat, ainsi qu'il a été indiqué au point 10, et en l'absence de tout droit pour l'intéressé à bénéficier d'un contrat à durée déterminée ou indéterminée, que les décisions litigieuses sont entachées d'un détournement de pouvoir.
13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation n'appelle aucune mesure d'exécution. Il s'ensuit que les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les dépens :
15. La présente instance n'a pas donné lieu à des dépens. Par suite, les conclusions présentées sur ce fondement doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Forbach, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par la commune de Forbach et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Forbach sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...et la commune de Forbach.
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N° 17NC00932