Par un jugement nos 1800222 et 1800223 du 29 janvier 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I.- Par une requête, enregistrée le 23 mars 2018, sous le n°18NC00914, M. A...E..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1800222 et 1800223 du 29 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 22 janvier 2018 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son transfert vers l'Allemagne et l'a assigné à résidence pour une durée de quinze jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France en transmettant son dossier à la préfecture en vue du retrait d'un dossier d'asile et de l'obtention, dans un délai de quinze jours, d'une attestation de demande d'asile et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la décision à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une attestation de demande d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de transfert :
- le droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a été méconnu ;
- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation en violation de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle ne mentionne pas le critère permettant de déterminer l'Etat membre responsable de la demande d'asile ; le tribunal a entaché son jugement d'un défaut de motivation en ne répondant pas à ce moyen ;
- les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ;
- les dispositions de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ;
- le préfet est seul compétent pour déterminer l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile en application de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il n'est pas établi que l'entretien a été mené par une autorité qualifiée au sens de l'article 5.5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; le tribunal a inversé la charge de la preuve sur ce point ;
- l'absence d'entretien conduit par une personne qualifiée a entaché d'irrégularité la décision attaquée et l'a privé d'une garantie ;
- le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour prononcer la décision de transfert alors qu'en vertu de l'article 53 de la Constitution et des articles 3§2 et 17 du règlement du 26 juin 2013 il peut déroger aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- le droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a été méconnu ;
- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation dès lors qu'elle ne précise pas l'hypothèse de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle n'indique pas dans quelle mesure l'exécution du transfert présente une perspective raisonnable ;
- il n'est pas établi un risque de fuite justifiant cette mesure de coercition ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le requérant a exécuté la décision de transfert, la requête a dès lors perdu son objet ;
- le transfert ayant été exécuté, l'Etat français n'est pas devenu responsable de l'examen de la demande d'asile ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
II.- Par une requête, enregistrée le 23 mars 2018, sous le n°18NC00915, Mme B...E..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1800222 et 1800223 du 29 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 22 janvier 2018 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a ordonné son transfert vers l'Allemagne et l'a assignée à résidence pour une durée de quinze jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de l'autoriser à déposer une demande d'asile en France en transmettant son dossier à la préfecture en vue du retrait d'un dossier d'asile et de l'obtention, dans un délai de quinze jours, d'une attestation de demande d'asile et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la décision à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une attestation de demande d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux présentés par son époux dans la requête n° 18NC00914.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requérante a exécuté la décision de transfert, la requête a dès lors perdu son objet ;
- le transfert ayant été exécuté, l'Etat français n'est pas devenu responsable de l'examen de la demande d'asile ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. et Mme E...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 20 février 2018.
Les parties ont été informées, par une lettre du 28 novembre 2018, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'expiration du délai de six mois, défini à l'article 29 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013, dont le point de départ est la date de lecture du jugement du tribunal administratif se prononçant sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert, a pour conséquence que l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Il devient donc impossible d'exécuter la décision de transfert et il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de cette dernière.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeE..., de nationalité arménienne, nés respectivement en 1986 et 1988, sont entrés en France, selon leurs déclarations, en juin 2017, accompagnés de deux enfants mineurs, en vue de solliciter l'asile. Ils ont sollicité la reconnaissance de la qualité de réfugiés le 13 juillet 2017. Le relevé de leurs empreintes digitales a fait apparaître, après leur transmission au système Eurodac, qu'elles avaient été enregistrées en Allemagne. Les autorités allemandes, saisies par les autorités françaises d'une demande de reprise en charge en application du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013, ont explicitement accepté le transfert des intéressés le 24 juillet 2017. Par quatre arrêtés du 4 janvier 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a décidé leur transfert vers l'Allemagne, responsable de l'examen de leurs demandes d'asile et les a assignés à résidence pour une durée de quinze jours. Par un jugement du 16 janvier 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a annulé ces arrêtés en raison d'un vice de procédure. Le préfet de Meurthe-et-Moselle a pris, le 22 janvier 2018, quatre nouveaux arrêtés identiques. Par un jugement du 29 janvier 2018, dont les requérants font appel, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés.
2. Les requêtes n° 18NC00914 et 18NC00915 présentées par M. et Mme E... concernent les membres d'une même famille, sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'exception de non lieu à statuer :
3. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution.
4. Si le préfet de Meurthe-et-Moselle fait valoir qu'il n'y a plus lieu à statuer sur les requêtes dès lors que M. et Mme E...ont exécuté les décisions de transfert, il est cependant constant que ces dernières n'ont pas été rapportées. Dès lors, cette circonstance n'a pas eu pour effet de priver d'objet les conclusions des requêtes tendant à leur annulation et, par suite, il y a encore lieu d'y statuer.
Sur la régularité du jugement :
5. S'il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme E...ont soulevé à l'encontre des décisions de transfert le moyen tiré du défaut d'indication du critère retenu pour déterminer l'Etat responsable de l'examen de leur demande d'asile, les privant ainsi d'une garantie, un tel moyen, au vu de l'argumentation qu'ils avaient développée, constituait un développement du moyen tiré de l'insuffisance de motivation. Le premier juge, dans son jugement, a explicitement répondu à ce moyen. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer sur l'un des moyens invoqués en première instance doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les décisions de transfert :
6. En premier lieu, M. et Mme E...soutiennent que les décisions attaquées sont intervenues en violation de leur droit d'être entendu, consacré par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, alors qu'ils avaient des éléments pertinents à porter à la connaissance du préfet. Toutefois, il est constant que les intéressés ont été entendus dans le cadre d'un entretien individuel, assisté d'un interprète en langue arménienne, le 13 juillet 2017, puis le 22 janvier 2018 avant le prononcé des arrêtés portant transfert du 4 janvier 2018. Si ces derniers arrêtés ont été annulés, ainsi qu'il a été indiqué au point 1, au motif que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'avait pas pris en considération les observations des requérants, il pouvait, sans recueillir à nouveau, dans les circonstances de l'espèce, leurs observations, reprendre les arrêtés attaqués. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu, garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...)/ Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) ".
8. Les décisions contestées, après avoir visé notamment le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et les articles L. 742-3 à L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionnent que M. et Mme E...ont sollicité l'asile en France et que la consultation du fichier Eurodac ayant révélé que leurs empreintes digitales avaient été relevées en Allemagne, où ils ont séjourné en vertu d'un titre de séjour qui n'a pas été renouvelé, les autorités de ce pays ont été saisies d'une demande de prise en charge qu'elles ont acceptée. Il ressort de cette motivation que le préfet a fait application du a) de l'article 18 du règlement du 16 juin 2013. Elle était ainsi suffisante pour permettre aux intéressés d'identifier le critère du règlement sur le fondement duquel le préfet de Meurthe-et-Moselle a estimé que l'Allemagne était responsable de l'examen de leur demande d'asile et d'exercer utilement un recours. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.
9. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces des dossiers, notamment des décisions attaquées qui mentionnent les principaux éléments relatifs à la situation personnelle et familiale des requérants, que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de leur situation.
10. En quatrième lieu, M. et Mme E...se bornent à soutenir que le tribunal n'a pas répondu de façon satisfaisante au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 sans argumenter leur critique. Il y a lieu par suite d'écarter le moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national ". Aux termes de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité compétente pour procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application de l'article L. 742-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département (...) ".
12. Il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme E... ont bénéficié, le 13 juillet 2017, d'un entretien individuel assuré par un agent de la préfecture de la Moselle. S'ils font valoir que l'identité de cet agent n'est pas mentionné, aucune disposition du règlement du 26 juin 2013, ni aucune disposition nationale n'implique que cet agent mentionne son nom sur le compte-rendu d'entretien. Par ailleurs, cet agent doit être regardé comme étant " qualifié en vertu du droit national " pour mener l'entretien avec les requérants, sans qu'il ait à justifier de sa qualification. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
13. En sixième lieu, il résulte de l'article 3, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 que les demandes de protection internationale présentées par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sont examinées par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. Aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ; 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit ". La mise en oeuvre, par les autorités françaises, des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être assurée à la lumière des exigences définies par le second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, selon lequel : " les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ". Il en résulte que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.
14. D'une part, il ressort des termes mêmes des décisions contestées que le préfet de Meurthe-et-Moselle a pris en considération l'ensemble des éléments invoqués par les requérants pour apprécier s'il y avait lieu de déroger à la responsabilité de l'Allemagne pour l'examen de leur demande d'asile, et notamment de l'état de santé de M. E...et de la grossesse de MmeE.... Il s'ensuit que les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur de droit qu'il aurait commise en s'estimant en situation de compétence liée doivent être écartés.
15. D'autre part, les requérants sont dépourvus de toute attache familiale en France. Ils n'invoquent aucun élément qui s'opposerait à leur transfert vers l'Allemagne où ils ont déjà séjourné. Dans ces conditions, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas entaché ses arrêtés d'une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de mettre en oeuvre les clauses dérogatoires prévues par les dispositions précitées de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
16. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
17. Les requérants font valoir que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas tenu compte de la grossesse de Mme E...et de la scolarisation de leurs deux enfants. Toutefois, ils n'établissent pas qu'eu égard à leur jeune âge, leurs enfants ne pourront pas poursuivre leur scolarité en Allemagne où ils ont vécu avant leur venue en France. Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article 32 du règlement du 26 juin 2013, il appartiendra au préfet de transmettre à l'Allemagne toute information utile relative à l'état de santé de Mme E...pour permettre, le cas échéant, sa prise en charge adaptée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
En ce qui concerne les décisions d'assignation à résidence :
18. En premier lieu, il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme E...ont été informés le 22 janvier 2018 de l'éventualité d'une mesure d'assignation à résidence et mis à même de présenter leurs observations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de leur droit d'être entendu, consacré par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : /1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ou fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ; (...) ".
20. Tout d'abord, les arrêtés contestés, après avoir visé l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionnent que les intéressés ont fait l'objet d'une mesure de transfert et qu'il existe une perspective raisonnable de l'exécuter. Le préfet, contrairement à ce que soutiennent les requérants, n'avait pas à énoncer l'un des cas figurant à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'est pas applicable en l'espèce. Ces arrêtés, qui explicitent les motifs pour lesquels les mesures d'assignations ont été prises, comportent donc une motivation suffisante en droit et en fait.
21. Ensuite, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le transfert de M. et Mme E... ne constituerait pas une perspective raisonnable.
22. Si les requérants font valoir qu'ils ne présentent aucun risque de fuite, dès lors notamment qu'ils se sont rendus à toutes les convocations de la police et disposent d'une adresse fixe, cette circonstance est sans incidence sur la légalité des arrêtés contestés qui ont été pris précisément parce qu'ils présentent des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
23. Enfin, si les assignations à résidence prévoient que les requérants doivent se présenter deux fois par semaine au commissariat, pendant une durée de quinze jours, une telle obligation ne constitue pas une mesure disproportionnée par rapport au but poursuivi par ces décisions qui tendent à assurer l'exécution des transferts. Par suite, le moyen doit être écarté.
24. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.
Sur les frais de l'instance :
25. L'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. et Mme E...une somme en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes nos 18NC00914 et 18NC00915 sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E..., à Mme B...E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.
2
No 18NC00914, 18NC00915