Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 octobre 2016, M. B... A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 juillet 2016 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 22 janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée au regard de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le préfet a méconnu l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2017, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 octobre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant albanais né le 3 avril 1989, est entré irrégulièrement en France le 16 novembre 2014 pour y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 mai 2015, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 23 décembre 2015 ; que, tirant les conséquences de cette décision de rejet, le préfet de la Moselle a, par un arrêté du 22 janvier 2016, refusé de délivrer un titre de séjour à M. A...et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de l'Albanie ; que M. A...relève appel du jugement du 7 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du même code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité (...) / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. (...) " ;
3. Considérant que l'arrêté contesté, qui rappelle que la demande d'asile de M. A...a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, mentionne les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 511-1, I, 6° et L. 513-2 ; qu'il est ainsi suffisamment motivé en droit ; que cet arrêté précise de façon suffisamment circonstanciée les raisons pour lesquelles le préfet de la Moselle a estimé que l'intéressé ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour et devait faire l'objet d'une mesure d'éloignement à destination du pays dont il a la nationalité ; qu'ainsi, ledit arrêté est également suffisamment motivé en fait ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait estimé, à tort, en situation de compétence liée, notamment au regard de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, pour refuser un titre de séjour à M. A...et l'obliger à quitter le territoire français à destination de l'Albanie ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France le 16 novembre 2014 seulement, après avoir vécu jusqu'à l'âge de 25 ans dans son pays d'origine ; que l'intéressé, célibataire et sans enfant, est dépourvu d'attaches sur le territoire français ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour du requérant en France, il n'est pas établi qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Moselle aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
8. Considérant que M. A...soutient qu'il encourt le risque d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Albanie, en raison de son orientation sexuelle ; que toutefois, le requérant ne produit aucun élément de nature à établir qu'il serait personnellement exposé à un tel risque dans l'hypothèse d'un éloignement à destination de son pays d'origine ; que s'il entend se prévaloir du recours formé devant la Cour nationale du droit d'asile, dans lequel il retrace les raisons et les circonstances de son arrivée sur le territoire français, ladite cour a estimé que les faits allégués par l'intéressé présentaient des lacunes et des incohérences telles qu'ils ne pouvaient être regardés comme établis ; que dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions et stipulations précitées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
2
N° 16NC02397