Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 octobre 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 juin 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 16 février 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ; l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ne mentionne pas le nom du médecin instructeur ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant algérien né en 1986, a déclaré être entré en France au mois d'août 2015. Il s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien valable du 17 octobre 2016 au 16 octobre 2017 en raison de son état de santé. Par un arrêté du 16 février 2018, le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler ce titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. M. B... relève appel du jugement du 19 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays " . Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens pour la mise en oeuvre de ces stipulations : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Enfin, aux termes de l'article R. 313-23 dudit code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la régularité de la procédure implique, pour respecter les prescriptions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les documents soumis à l'appréciation du préfet comportent l'avis du collège de médecins et soient établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par un collège de médecins tel que prévu par l'article L. 311-11. L'avis doit, en conséquence, permettre l'identification des médecins dont il émane. L'identification des auteurs de cet avis constitue ainsi une garantie dont la méconnaissance est susceptible d'entacher l'ensemble de la procédure. Il en résulte également que, préalablement à l'avis rendu par ce collège de médecins, un rapport médical, relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), doit lui être transmis et que le médecin ayant établi ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet. En cas de contestation devant le juge administratif portant sur ce point, il appartient à l'autorité administrative d'apporter les éléments qui permettent l'identification du médecin qui a rédigé le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis et, par suite, le contrôle de la régularité de la composition du collège de médecins. Le respect du secret médical s'oppose toutefois à la communication à l'autorité administrative, à fin d'identification de ce médecin, de son rapport, dont les dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoient la transmission qu'au seul collège des médecins de l'OFII et, par suite, à ce que le juge administratif sollicite la communication par le préfet ou par le demandeur d'un tel document.
4. Par un avis du 28 novembre 2017, le collège des médecins de l'OFII a indiqué que si l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans ce pays.
5. Le préfet produit une attestation émanant de la directrice de la direction territoriale de l'OFII compétente indiquant le nom du médecin qui a rédigé le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis, et dont il ressort que ce médecin n'est pas l'un des médecins qui a rendu l'avis du 28 novembre 2017. Cet élément suffit à démontrer que le médecin qui a établi le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de l'OFII, dès lors notamment, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le secret médical s'opposait à ce que le préfet produise le rapport que ledit médecin avait rédigé. Le requérant n'est ainsi pas fondé à soutenir que la décision litigieuse aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière.
6. En deuxième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
7. Pour contester l'existence d'un traitement approprié en Algérie, M. B...s'est borné à produire, en première instance, un certificat médical décrivant les pathologies dont il est atteint et le traitement qui lui a été prescrit. M. B..., qui n'a produit aucune autre pièce en appel, n'apporte ainsi pas élément de nature à remettre en cause l'appréciation du préfet portant sur la possibilité pour lui de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. M. B...n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le préfet du Bas-Rhin a méconnu les stipulations précitées de l'accord franco-algérien.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
9. M. B... soutient qu'il est parfaitement intégré au sein de la société française et qu'il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'opérateur de chantier. Toutefois, ce contrat n'a été signé que quelques mois avant l'édiction de la décision litigieuse. Par ailleurs, M. B... qui est célibataire et sans enfant et qui ne réside en France que depuis 2015, n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 33 ans. Dans ces conditions, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressé, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision litigieuse aurait porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées de l'accord franco-algérien et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent ainsi être écartés.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
10. En premier lieu, les moyens dirigées contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
11. En second lieu et compte tenu notamment des circonstances mentionnées au point 9, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
12. Les moyens dirigées contre les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire ayant été écartés, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC02704