Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 avril 2015, MmeA..., représentée par la SCP A. Lévi-Cyferman et L. Cyferman, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 25 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Meuse du 2 avril 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Meuse, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen particulier de sa situation ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Le préfet de la Meuse a été mis en demeure de produire un mémoire en défense par un courrier du 16 juillet 2015 auquel il n'a pas répondu.
La clôture d'instruction a été fixée au 21 octobre 2015 à 16 heures par une ordonnance du 30 septembre 2015.
Par une décision du 26 février 2015, le président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle a admis Mme A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante bosnienne née le 8 avril 1956, déclare être entrée irrégulièrement en France le 24 mai 2013 afin d'y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que sa demande d'asile, instruite selon la procédure prioritaire, a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 décembre 2013 ; que, tirant les conséquence de cette décision de rejet, le préfet de la Meuse a, par un arrêté du 2 avril 2014, refusé de délivrer un titre de séjour à MmeA..., obligé celle-ci à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée ; que, par un jugement du 25 novembre 2014, dont Mme A...relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la motivation de l'arrêté attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article premier de la loi susvisée du 11 juillet 1979, alors applicable : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...). L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ;
3. Considérant, d'une part, que la décision refusant un titre de séjour à Mme A...mentionne les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 313-13, L. 314-11, 8°, L. 742-6 et L. 742-7, rappelle que la demande d'asile présentée par l'intéressée, examinée selon la procédure prioritaire, a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 23 décembre 2013 et précise les raisons pour lesquelles le préfet a estimé que ce refus de titre de séjour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'ainsi, la décision refusant un titre de séjour à MmeA..., qui comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;
4. Considérant, d'autre part, que la décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme A...n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision lui refusant un titre de séjour, laquelle est suffisamment motivée ;
5. Considérant, enfin, que la décision fixant le pays de destination mentionne que Mme A...est de nationalité bosnienne et, après avoir rappelé les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, précise que l'intéressée n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à ces stipulations en cas de retour vers le pays dont elle a la nationalité ; qu'ainsi, cette décision est également suffisamment motivée ;
Sur la légalité interne des décisions de refus de séjour et d'éloignement :
6. Considérant qu'aux termes de qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des et libertés d'autrui " et qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
7. Considérant que Mme A...fait valoir en appel que son fils, sa belle-fille et ses deux petits enfants résident régulièrement en France ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que la requérante est entrée en France le 24 mai 2013, moins d'un an avant la décision attaquée, et a été, depuis lors, prise en charge par le centre d'hébergement et de réadaptation sociale de Clermont-en-Argonne (Meuse) ; qu'elle ne produit aucun élément de nature à justifier de la nécessité de sa présence auprès de son fils majeur ou de la famille de celui-ci alors qu'il ressort des pièces du dossier que ces derniers sont également hébergés dans un centre d'hébergement et de réadaptation sociale à Sarreguemines (Moselle) ; qu'elle n'établit ni n'allègue être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 57 ans ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de Mme A..., le préfet de la Meuse, qui s'est livré à un examen particulier de sa situation, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée à mener une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué ; qu'il n'a dès lors méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la légalité interne de la décision fixant le pays d'éloignement :
8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; qu'aux termes de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;
9. Considérant que Mme A...ne fait état, ni devant les premiers juges, ni devant la cour, des circonstances qui se trouveraient à l'origine de son arrivée en France, pays dans lequel elle a demandé l'asile ; que dans ces conditions, en l'absence de tout élément permettant d'apprécier les risques de traitements inhumains ou dégradants auxquels elle prétend être exposée en cas de retour dans son pays d'origine, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait été prise en violation des stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Meuse.
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N° 15NC00617