Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 mai 2016, M.B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 15 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Marne du 31 août 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le refus de visa long séjour ne lui a pas été notifié au moyen du formulaire prévu par le règlement (CE) n° 810/2009 du 13 juillet 2009 ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet n'a pas fait application des critères limitativement énumérés par les dispositions de ce règlement pouvant fonder un refus de visa ;
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;
- cette décision doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un visa de long séjour sur laquelle elle se fonde ;
- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;
- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;
- le préfet n'a pas procédé à l'examen de sa situation personnelle et familiale ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 août 2016, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B...n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2016.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les moyens de légalité externe soulevés pour la première fois en appel à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de refus de délivrance d'un visa de long séjour et celle de refus de délivrance d'un titre de séjour, qui relèvent d'une cause juridique distincte de ceux soulevés en première instance et ne sont pas d'ordre public, sont irrecevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire des visas ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Dhiver a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant camerounais né le 24 septembre 1970, déclare être entré régulièrement en France le 10 novembre 2010 ; qu'il s'est marié avec une ressortissante française le 27 mai 2013 ; qu'il a sollicité le 31 juillet 2015 la délivrance d'un visa de long séjour et d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 211-2-1 et du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 31 août 2015, le préfet de la Marne a rejeté ses demandes, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai ; que M. B... relève appel du jugement du 15 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un visa de long séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'en première instance, M. B... n'a soulevé que des moyens de légalité interne au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 31 août 2015 refusant de lui délivrer un visa de long séjour ; que le moyen de légalité externe tiré de ce que le préfet aurait dû lui notifier le refus de visa au moyen du formulaire prévu par le règlement (CE) n° 810/2009 du 13 juillet 2009 est soulevé pour la première fois devant la cour et n'est pas d'ordre public ; que ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte de celle sur le fondement de laquelle la demande a été soumise au tribunal administratif, constitue une demande nouvelle en appel ; qu'il est par suite irrecevable ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article. / (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. (...) " ;
4. Considérant que M. B...a sollicité du préfet la délivrance d'un visa de long séjour en sa qualité de conjoint de français, sur le fondement de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les visas de long séjour délivrés sur le fondement de ces dispositions ne sont pas régis par le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas qui, ainsi qu'il résulte de son article 1er, " fixe les procédures et conditions de délivrance des visas pour les transits ou les séjours prévus sur le territoire des Etats membres d'une durée maximale de trois mois sur une période de six mois (...) " ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de ce règlement est inopérant ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
5. Considérant, en premier lieu, qu'en première instance, M. B... n'a soulevé que des moyens de légalité interne au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 31 août 2015 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; que le moyen de légalité externe tiré de ce que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour est soulevé pour la première fois devant la cour et n'est pas d'ordre public ; que ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte de celle sur le fondement de laquelle la demande a été soumise au tribunal administratif constitue une demande nouvelle en appel ; qu'il est par suite irrecevable ;
6. Considérant, en second lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit aux points précédents, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de visa long séjour ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...). L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ;
8. Considérant que la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français mentionne les dispositions applicables de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, cette mesure d'éloignement, prise en application du 3° du I de cet article, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de séjour, laquelle est suffisamment motivée en droit et en fait ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit aux points précédents, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;
10. Considérant, en troisième lieu, que les termes mêmes de la décision en litige démontrent que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;
11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
12. Considérant que M.B..., qui soutient résider en France depuis 2010, se prévaut de son union avec une ressortissante française depuis 2013 ; qu'il indique également que son frère et sa soeur vivent régulièrement en France ; que toutefois, son mariage, célébré le 27 mai 2013, était encore relativement récent à la date de la décision contestée et M. B...ne justifie pas de l'existence d'une vie commune antérieure à ce mariage ; qu'aucun enfant n'est né de cette union ; que les pièces produites par le requérant permettent seulement d'établir qu'il s'investit dans l'éducation des enfants de son épouse depuis le mois de février 2015 ; que M. B...n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays, où résident sa mère et quatre de ses frères et soeur ; que, dans les circonstances de l'espèce, et alors que la séparation des époux sera limitée au temps nécessaire à M. B...pour obtenir un visa de long séjour auprès des autorités consulaires françaises au Cameroun, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Marne.
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N° 16NC00994