Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 mars 2018, Mme B...C..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg du 14 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 1er décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire pour " raison médicale " ou, à défaut, pour " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de lui enjoindre, dans le même délai et sous la même astreinte, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- sa demande de première instance n'est pas tardive ;
- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente ;
- en prenant à son encontre une obligation de quitter le territoire le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- en prenant à son encontre une obligation de quitter le territoire le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire sur sa situation privée et familiale ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision fixant le pays de renvoi sur sa situation privée et familiale ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français sur sa situation privée et familiale.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Haudier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., ressortissante nigériane née en 1991, est entrée irrégulièrement en France au mois de juin 2015. Ses empreintes ayant été relevées en Italie au mois de mai 2015, le préfet du Bas-Rhin a décidé, par une décision du 10 septembre 2015, de la remettre aux autorités italiennes. Elle a parallèlement sollicité la délivrance d'un titre de séjour au mois de novembre 2015 en se prévalant de son état de santé. Par un courrier du 17 novembre 2015, le préfet lui a demandé de produire un certificat médical circonstancié sous pli confidentiel afin de pouvoir recueillir l'avis du médecin inspecteur de santé publique de l'agence régionale de santé sur sa demande. Mme C...n'a pas déféré à cette demande et a déposé une demande d'asile en France lorsque celle-ci est devenue compétente pour statuer sur une telle demande. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 28 avril 2017, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 2 octobre 2017. Par un arrêté du 1er décembre 2017, pris sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Bas-Rhin l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée à l'expiration de ce délai et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Mme C...relève appel du jugement du 14 février 2018 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte :
2. La requérante reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg.
Sur les autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, la décision litigieuse a été prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, suite au rejet par l'OFPRA puis par la CNDA de la demande d'asile de MmeC.... Cette dernière ne peut ainsi utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation, de l'illégalité de la décision du préfet sur la demande de titre de séjour qu'elle avait présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, en soutenant que le préfet a méconnu les dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme C... peut être regardée comme faisant valoir qu'elle ne pouvait pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire, dès lors qu'elle devait se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions.
5. Un étranger ne peut faire l'objet d'une mesure prescrivant à son égard une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsque la loi prescrit qu'il doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour.
6. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
7. En l'espèce, d'une part, si l'intéressée a produit en première instance des éléments médicaux attestant de ce qu'elle a présenté des troubles psychologiques, il ne ressort nullement de ces documents ni d'aucune autres pièces du dossier qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ou qu'elle ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code précité. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que MmeC..., qui n'est entrée sur le territoire français qu'en 2015, est isolée en France et qu'elle a un enfant qui réside au Nigéria. Dès lors, Mme C...n'est pas davantage fondée à soutenir qu'elle aurait dû se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code.
8. En dernier lieu et compte tenu des circonstances énoncées au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de MmeC....
Sur les autres moyens dirigés contre la décision fixant le pays de renvoi :
9. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " . Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. Mme C...n'apporte aucun élément permettant de considérer comme établi qu'elle encourt effectivement personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine. Sa demande d'asile a, au demeurant, été rejetée tant par l'OFPRA que par la CNDA. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que la décision fixant le pays à destination duquel Mme C...pourra être éloignée serait intervenue en violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. Mme C...n'apporte par ailleurs aucun élément de nature à établir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
12. Enfin, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant.
Sur les autres moyens dirigés contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
13. La requérante reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg.
14. Il ne ressort, en outre, pas des pièces du dossier, compte tenu notamment des circonstances énoncées au point 7, que le préfet ne pouvait pas légalement prendre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an à l'encontre de MmeC....
15. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC00705