Par un arrêt n° 15NC00209 du 2 juin 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement.
Par une décision du 12 octobre 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 2 juin 2016 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.
Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 30 janvier 2015, le ministre des finances et des comptes publics, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 novembre 2014 ;
2°) de rétablir les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A... a été assujetti au titre des années 2007, 2008 et 2009 ainsi que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 janvier 2007 et au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, M. A...a disposé d'un délai suffisant avant le début des opérations de contrôle liées à la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet ;
- les dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales n'ont pas été méconnues dès lors que M. A...est à l'origine du report des opérations de contrôle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2015, M.A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le ministre ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2018, postérieurement à la décision du Conseil d'Etat, M.A..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête du ministre des finances et des comptes publics et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les dispositions de l'article L. 47 du livre de procédures fiscales ont été méconnues dès lors qu'il n'a pas bénéficié d'un délai raisonnable pour se faire assister du conseil de son choix.
Par une ordonnance du 7 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Haudier,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., qui exerce une activité de paysagiste, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 15 novembre 2010 au 18 janvier 2011, portant sur les années 2007 à 2009. A l'issue de cette vérification de comptabilité, l'administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de ces trois années et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2007 et du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009. Par un jugement du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes.
2. Aux termes des dispositions de l'article L.47 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la procédure de contrôle en litige : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / (...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ". Il résulte de ces dispositions que la première intervention de l'administration sur place aux fins de vérification de la comptabilité du contribuable ne peut avoir lieu qu'après que ce dernier a été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de notification, dans un délai raisonnable qui ne peut être inférieur à deux jours ouvrés, de l'engagement du contrôle, cette garantie étant de nature à permettre au contribuable d'être présent ou représenté lors des interventions sur place du vérificateur.
3. Toutefois, lorsqu'un contribuable a été régulièrement informé de l'engagement d'une procédure de vérification par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification, dans les conditions prévues à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales citées au point 2 ci-dessus, aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration, lorsqu'elle décide de reporter, de sa propre initiative ou à la demande du contribuable, la date qui avait été initialement prévue pour la première intervention sur place du vérificateur, d'envoyer ou de remettre un avis de vérification rectificatif au contribuable. L'administration est en revanche tenue d'informer le contribuable en temps utile, par tous moyens, de la date à laquelle est reporté le début des opérations de vérification.
4. M. A...a reçu, le 30 octobre 2010, un avis de vérification l'informant qu'il allait faire l'objet d'une vérification de comptabilité, dont la première intervention sur place était prévue le 15 novembre 2010. L'avis indiquait la possibilité pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix lors des opérations de contrôle. M. A...a informé le service vérificateur de son absence à la date du 15 novembre 2010 et a sollicité un report du début des opérations. Le 16 novembre 2010, une nouvelle date d'intervention, fixée au 18 novembre 2010, lui a été proposée par l'administration lors d'un entretien téléphonique. Le même jour, M. A...a, sur la demande du service, confirmé cette nouvelle date par télécopie. Le 18 novembre 2010, M. A...et le vérificateur se sont rencontrés en présence du conseil du contribuable.
5. Ainsi qu'il a été dit-ci-dessus, l'avis de vérification que M. A...a reçu le 30 octobre 2010, soit plus de quinze jours francs avant le début des opérations de contrôle, mentionnait la possibilité pour le contribuable de se faire assister par un conseil de son choix. Par ailleurs, le contribuable a donné par écrit son accord à la date de début du contrôle qui a été reportée à sa demande, et qui convenait à son conseil, présent lors des opérations de contrôle. Enfin M. A... n'a, à aucun moment, indiqué qu'il souhaitait se faire également assister d'un avocat lors de ces opérations. Dans ces conditions, l'administration fiscale peut être regardée comme ayant informé le contribuable en temps utile de la date à laquelle était reportée le début des opérations de vérification et ce alors même que le contrôle a débuté moins de deux jours francs après l'acceptation de cette date.
6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour faire droit à la demande de décharge formée par M.A..., le tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'en fixant au surlendemain la nouvelle date de début des opérations de contrôle, l'administration fiscale n'avait pas octroyé au contribuable vérifié un délai suffisant Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.
7. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version applicable aux années litigieuses : " (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ". Aux termes de l'article 256 du même code, dans sa rédaction applicable aux périodes litigieuses : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ".
8. L'administration ne peut, en principe, pour déterminer les bases d'imposition d'un contribuable, utiliser les éléments qu'elle a recueillis auprès de tiers, dans le cadre de son droit de communication, que si ces éléments sont corroborés par des constatations propres à l'entreprise, aux activités ou à la situation de ce contribuable.
9. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a exercé son droit de communication auprès de trois clients de M. A...et des établissements bancaires de ces derniers et qu'il a obtenu, grâce à ce droit de communication, la copie de dix-sept factures émises entre 2007 et 2009 qui ne figuraient pas dans la comptabilité de M.A..., ainsi que la copie des chèques portant paiement desdites factures. Le montant de ces factures s'élevait à la somme toutes taxes comprises de 62 422,23 euros pour 2007, de 57 146,08 euros pour 2008 et de 89 271,83 euros pour 2009. L'administration a réintégré dans le revenu imposable des trois années vérifiées de M. A...les montants hors taxes de ces factures et a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée collectée qui y était mentionnée.
10. Si M. A...soutient que les éléments obtenus par l'exercice du droit de communication ne sont pas corroborés par des constatations propres à son activité, l'administration fait valoir, sans être sérieusement contestée, que l'intéressé a encaissé les chèques émis par ses clients et correspondant au règlement de ces dix-sept factures. Par ailleurs, M. A...n'apporte aucun élément permettant de douter de l'authenticité de ces factures dont il a obtenu le paiement. Dans ces conditions, les éléments recueillis par l'administration dans le cadre de son droit de communication peuvent être regardés comme étant corroborés par des constatations propres à l'activité de M.A.... Ce dernier n'est dès lors pas fondé à contester le bien-fondé des impositions litigieuses.
11. Il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à la demande de décharge formée par M.A....
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, la somme demandée par M. A...au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement nos 1105578, 1105581, 1105582 et 1200643 du 27 novembre 2014 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A...a été assujetti au titre des années 2007 à 2009, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 et les pénalités correspondantes sont remises à la charge de M.A....
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. B...A....
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N° 18NC02820