Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 mai 2015, M.D..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Haut-Rhin du 9 octobre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et, durant cet examen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me B...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'auteur de l'arrêté n'était pas compétent pour signer un tel acte ;
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle méconnaît enfin les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;
- il ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement, dès lors qu'il répondait aux conditions pour se voir délivrer, de plein droit, un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît également celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant des mesures de surveillance n'est pas motivée ;
- elle est contraire aux objectifs fixés par l'article 7 de la directive du 7 décembre 2008 ;
- elle porte atteinte à sa liberté d'aller et de venir ;
- elle est disproportionnée et injustifiée.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 juillet 2015 et 9 novembre 2015, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.
Mme Dhiver a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.D..., ressortissant kosovar né le 1er mai 1975, est entré pour la première fois en France le 27 décembre 2006, selon ses déclarations, afin d'y solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que celle-ci lui a été refusée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 mai 2007, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 19 février 2008 ; que M. D...a été muni d'autorisations provisoires de séjour entre le 19 mars 2009 et le 11 février 2010 afin de se maintenir aux côtés de sa compagne, MmeC..., admise au séjour en raison de son état de santé ; que l'intéressé, qui a fait l'objet d'une mesure d'éloignement vers le Kosovo le 17 juillet 2013, est revenu sur le territoire et a, le 23 septembre 2014, sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 9 octobre 2014, le préfet du Haut-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai ; que, par un jugement du 8 avril 2015, dont M. D...relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la compétence de l'auteur de l'arrêté du 9 octobre 2014 :
2. Considérant que M. D...reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions contenues dans l'arrêté du 9 octobre 2014 ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu par les premiers juges ;
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant que M. D...reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'existence d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué par voie d'exception, tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à ce qui a été dit au point 3, le moyen tiré de ce que M. D...ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il répondait aux conditions qu'elles fixent, ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant, enfin, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressée, qui reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;
8. Considérant que M. D...soutient qu'il a dû fuir le Kosovo en raison des nombreuses agressions par armes commises par des voisins dont il aurait été victime ; qu'il n'établit pas la réalité des menaces alléguées par la seule production des recours qu'il a adressés les 12 juin 2007 et 15 juin 2008 à la Commission des recours des réfugiés et à la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité de la décision fixant des mesures de surveillance :
9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. " ; qu'aux termes de l'article R. 513-3 du même code : " L'autorité administrative désigne le service auprès duquel l'étranger doit effectuer les présentations prescrites et fixe leur fréquence qui ne peut excéder trois présentations par semaine. " ;
10. Considérant que si la décision d'astreinte aux fins de mesures de surveillance, qui constitue une mesure de police visant à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, doit être motivée, cette motivation peut, outre la référence à l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se confondre avec celle de l'obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire ; qu'en l'espèce, la décision contestée vise l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée ; qu'au demeurant, le préfet a indiqué dans son arrêté les raisons pour lesquelles il avait pris des mesures de surveillance à l'égard de M.D... ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 relatif au " départ volontaire ", de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " (...) 3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire (...) " ; que ces dispositions ont fait l'objet d'une transposition, en droit interne, à l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile cité au point 9 du présent arrêt ; que, par suite, M. D...ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance, par le préfet, des dispositions précitées de l'article 7 de la directive 2008/115/CE pour contester la légalité de la décision l'astreignant à se présenter à l'autorité administrative pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ ;
12. Considérant, enfin, que le préfet, qui a accordé à M. D...un délai de départ volontaire de trente jours, a exigé de lui qu'il remette son passeport original ou sa carte nationale d'identité à la brigade mobile de recherches de la police aux frontières en échange d'un récépissé valant justification d'identité et l'a astreint à se présenter à ce service une fois par semaine afin d'y indiquer les diligences accomplies en vue de son départ volontaire ; que ces mesures, qui découlent de l'obligation de quitter le territoire français et qui sont appliquées dès sa notification et pendant le délai accordé au requérant pour organiser son départ volontaire, ne revêtent pas de caractère excessif ; qu'ainsi, le préfet n'a pas pris une décision de nature à constituer une atteinte disproportionnée à la liberté d'aller et de venir de M. D...et n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Afrim D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.
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N° 15NC00828