Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 juin 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 octobre 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 19 septembre 2018 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision litigieuse n'est pas motivée ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le préfet n'avait pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant vénézuélien, né le 11 février 1986, est entré sur le territoire français, selon ses déclarations, en 2009. Il a fait l'objet d'une remise aux autorités luxembourgeoises en 2013 dans le cadre d'une demande d'asile. Il a été interpellé à Mont-Saint-Martin à l'occasion d'un contrôle d'identité par les services de la police aux frontières réalisé dans un bus transfrontalier dans lequel il avait pris place le 31 juillet 2017. Par arrêté du même jour, le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé à quitter sans délai le territoire français et lui a interdit le retour sur ce territoire pour une durée de dix-huit mois. La requête de M. B... contre cet arrêté a été rejetée par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 12 septembre 2017, confirmé par une ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy du 19 février 2018. Par un arrêté du 19 septembre 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a prolongé l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. B... fait appel du jugement du 23 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
3. La décision en litige, qui a rappelé les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la prolongation d'une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français, rappelle les éléments relatifs à la situation personnelle et administrative de l'intéressé, et notamment le fait qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement, dont la légalité a été confirmée par la juridiction administrative, en dépit de laquelle il s'est irrégulièrement maintenu sur le territoire français et qu'il n'a pas établi avoir tissé en France des liens personnels et familiaux intenses et anciens. Cette décision, dont il ressort la prise en compte par le préfet de la situation particulière de M. B... au vu de l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées, est suffisamment motivée. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision du 19 septembre 2028 prolongeant de deux ans l'interdiction de retour sur le territoire français serait entachée d'un défaut de motivation doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux [GV1][AS2]termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
5. Si M. B... soutient qu'il réside en France depuis 2009 et qu'il y a tissé de nombreux liens personnels, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il a été réadmis au Luxembourg en 2013 et n'établit sa dernière résidence en France que depuis avril 2016. En outre, sa compagne, de nationalité luxembourgeoise, avec laquelle il a eu un enfant né en novembre 2018, et qu'il souhaite épouser, réside au Luxembourg et non en France. Dans ces conditions, M. B..., qui ne démontre pas que la prolongation de l'interdiction de retour sur le territoire français, prononcée en raison du non-respect de la précédente mesure similaire prise à son égard, aurait pour effet de le priver des liens qu'il entretient avec sa fille, n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait porté à son droit à une vie privée et familiale garanti par l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux objectifs poursuivis ou aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 précité de la convention internationale des droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, M. B... n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation en prolongeant son interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
[GV1]Heu il faut choisir adoption des motifs ou pas
[AS2R1]Désolée, j'ai oublié de supprimer ce paragraphe. On avait discuté en SI. Finalement c'était plus cohérent de répondre sur le tout car en réalité ce sont les mêmes éléments qui fondent la réponse aux trois moyens
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N° 20NC01330