Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er août 2018, M. A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 22 mai 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du préfet du Doubs du 15 mai 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours suivant l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour le temps de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B...de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la procédure est viciée dans la mesure où le préfet a méconnu les dispositions de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement en raison de son état de santé ;
- la décision portant interdiction de retour porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2018, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Wallerich, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., de nationalité malienne, est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2012. Sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. L'intéressé s'est vu délivrer le 15 avril 2015 une carte de séjour temporaire pour raison de santé, valable jusqu'au 9 novembre 2015. Sa demande de renouvellement de ce titre de séjour a été rejetée par un arrêté du préfet du Doubs du 23 décembre 2016 portant également obligation de quitter le territoire français, confirmé par un jugement du tribunal administratif de Besançon du 12 octobre 2017 dont l'intéressé n'a pas fait appel. A la suite de son interpellation le 14 mai 2018 dans le cadre d'une enquête pénale, il a fait l'objet, par arrêté du préfet du Doubs du 15 mai 2018 d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français sans délai, assortie de décisions fixant le pays de destination, prononçant une interdiction de retour pendant une durée de trois ans et l'informant de ce qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour. M. A...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...)10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement l'étranger ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Toutefois, lorsque l'étranger est retenu en application de l'article L. 551-1, le certificat est établi par un médecin intervenant dans le lieu de rétention conformément à l'article R. 553-8. En cas de rétention ou d'assignation à résidence en application de l'article L. 561-2, l'avis est émis par un médecin de l'office et transmis sans délai au préfet territorialement compétent. ".
3. Il résulte de ces dispositions que, même si elle n'a pas été saisie d'une demande de titre de séjour fondée sur les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative qui dispose d'éléments d'informations suffisamment précis et circonstanciés établissant qu'un étranger résidant habituellement sur le territoire français est susceptible de bénéficier des dispositions protectrices du 10° de l'article L. 511-4 du même code, avant de prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire, doit saisir l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour avis médical.
4. Ainsi qu'il a été dit au point 1, il ressort des pièces du dossier que la demande de renouvellement de titre de séjour pour raison de santé, déposée par M.A..., a été rejetée par un arrêté du préfet du Doubs du 23 décembre 2016 devenu définitif après le rejet de sa demande d'annulation par un jugement du tribunal administratif de Besançon du 12 octobre 2017. Si lors de son audition par les services de police lors de son interpellation, le requérant a invoqué ses problèmes médicaux, il n'a pas fait état d'une dégradation de son état de santé ni communiqué des éléments médicaux suffisamment précis et circonstanciés de nature à établir qu'il serait susceptible de bénéficier des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans cette mesure, le préfet n'a pas commis de vice de procédure en ne sollicitant pas l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration avant de décider de l'obliger à quitter le territoire français.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant interdiction de retour pendant une durée de trois ans :
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Si M. A...fait valoir qu'il vit depuis plusieurs années en concubinage et que ses enfants demeurés au Mali sont désormais majeurs, il ressort des pièces du dossier qu'alors qu'il faisait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, il a été placé en garde à vue pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit ainsi que pour des faits d'acquisition, détention, transport, offre ou cession non autorisée de produits stupéfiants. A cette occasion, une grande quantité de drogue a été retrouvée au domicile qu'il soutient partager avec sa concubine. Dans ces conditions et dès lors que la présence en France de l'intéressé est susceptible de constituer une menace pour l'ordre public, le préfet du Doubs n'a pas, eu égard, en outre, à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressé en France, porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'il entendait protéger et n'a donc pas, en prenant les décisions en litige, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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N° 18NC02168