Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 23 août 2018 et le 13 novembre 2018, le préfet du Doubs demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800753 du 25 juillet 2018 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Besançon.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que son arrêté méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le jugement comporte une erreur en ce qui concerne le bénéficiaire des frais irrépétibles.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2018, M. B...A..., représenté par Me Dravigny, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros soit mis à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que c'est à bon droit que le tribunal a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par décision du 27 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Wallerich, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré en France, selon ses déclarations, le 11 septembre 2011. Il a déposé le 18 octobre 2011 une demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié qui a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 11 septembre 2015 que par la Cour nationale du droit d'asile le 4 juillet 2016. Par un arrêté du 28 février 2018, le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière. Le préfet du Doubs relève appel du jugement du 25 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :
2. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
3. M. A...vit en concubinage, depuis 2014, avec une ressortissante ivoirienne qui réside en France de manière continue depuis l'année 2000 sous le couvert d'une carte de séjour temporaire. De leur union est né, le 5 décembre 2015, un enfant, prénommé Mathias. La circonstance que M. A...ait fait l'objet en 2014 d'un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement, non exécutée, n'est pas de nature à remettre en cause, contrairement à ce que soutient le préfet en appel, la réalité de la communauté de vie du couple attestée par plusieurs témoignages et de nombreuses pièces probantes versées au dossier. De même l'assistante maternelle, le médecin traitant et le masseur-kinésithérapeute qui prodigue des soins à Mathias attestent que le requérant participe activement à l'éducation et à l'entretien de son fils, avec qui il vit en compagnie de sa mère. Dans ces conditions, le refus de délivrer à M. A...un titre de séjour était contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Doubs n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé son arrêté.
Sur les frais liés aux instances :
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que, dans l'article 4 du jugement, à la suite d'une erreur de plume, le tribunal a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 350 euros à M.C..., qui n'était pas partie à l'instance, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans cette mesure, il y lieu d'annuler cet article et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 350 euros à M. A...au titre des frais exposés en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
6. En second lieu, d'une part, M. A...a obtenu, en appel, le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de cinquante-cinq pour cent par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 27 septembre 2018. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dravigny, avocate de M.A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dravigny de la somme de 770 euros. D'autre part, l'admission de M. A...à l'aide juridictionnelle partielle a laissé à sa charge une partie des frais non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit d'une somme de 730 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : L'article 4 du jugement n° 1800753 du 25 juillet 2018 du tribunal administratif de Besançon est annulé.
Article 2 : L'Etat versera à M. A...la somme de 350 euros au titre des frais exposés en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet du Doubs est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à Me Dravigny une somme de 770 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : L'Etat versera à M. A...la somme de 730 euros au titre des frais exposés en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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N° 18NC02303