Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 juillet 2017, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 mai 2017 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 28 octobre 2016 pris son encontre par le préfet de la Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat aux dépens ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors qu'il n'a pas été en mesure de formuler ses observations ;
- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a été pris par une autorité incompétente ;
- cet avis est insuffisamment motivé ;
- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée par l'avis rendu par le médecin de l'agence régional de santé ;
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision quant à sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors qu'il n'a pas été en mesure de formuler ses observations ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision quant à sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- le Kosovo n'est pas un pays d'origine sûr ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la même convention.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2017, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B..., ressortissant kosovar né le 3 juillet 1992, est entré sur le territoire français le 1er décembre 2014 selon ses déclarations ; que sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 9 juin 2015 ; que, par un arrêté du 28 janvier 2016, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ; que le 2 février 2016, M. B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le 11 février 2016, la Cour nationale du droit d'asile a confirmé la décision rendue le 9 juin 2015 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, par un arrêté du 28 octobre 2016, le préfet de la Marne a refusé de délivrer à M. B...un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé ; que M. B... relève appel du jugement du 9 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 311-10 de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le titre de séjour est délivré par le préfet du département dans lequel l'étranger a sa résidence et, à Paris, par le préfet de police. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 512-1 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative mentionnée aux articles L. 511-1 et L. 511-3-1 est le préfet de département (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 513-1 du même code : " L'autorité administrative compétente pour prononcer la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger devant être d'office reconduit à la frontière est le préfet de département (...) " ; que l'article 11-1 du décret susvisé du 29 avril 2004 dispose que : " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile " ; que l'article 43 du même décret prévoit que : " Le préfet de département peut donner délégation de signature (...) 1° En toutes matières (...) au secrétaire général (...) " ;
3. Considérant que l'arrêté contesté a été signé par M. Denis Gaudin, secrétaire général de la préfecture de la Marne, qui disposait, en vertu d'un arrêté du préfet de la Marne du 18 juillet 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, d'une délégation à l'effet de signer tous arrêtés ou décisions relevant de la compétence de l'Etat dans le département à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions en matière de police des étrangers ; que cette délégation n'était ni générale ni absolue ; qu'en outre, les dispositions précitées des articles 11-1 et 43 du décret du 29 avril 2004 permettaient légalement au préfet de la Marne de donner délégation au secrétaire général de la préfecture à l'effet de signer des décisions relevant de la police des étrangers sans que cette possibilité de délégation soit subordonnée à l'existence d'une disposition en ce sens dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'enfin, la circonstance que la décision contestée soit intervenue sur proposition du secrétaire général de la préfecture demeure sans incidence sur l'exercice par le préfet de sa propre compétence ; que, par suite, et alors d'ailleurs que les modalités de notification d'une décision sont sans incidence quant à sa légalité, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée, après avoir notamment visé le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, décrit de manière précise et circonstanciée le parcours de M. B... ainsi que les motifs de droit et de fait pour lesquels un titre de séjour lui a été refusé ; qu'ainsi, cette décision est suffisamment motivée ;
4. Considérant, en troisième lieu, que si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union ; qu'ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant ; que, toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union ; qu'il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré ; que M. B... ne peut cependant utilement soutenir qu'il aurait été privé de son droit à être entendu, comme principe général du droit de l'Union européenne, dès lors que lorsqu'il se prononce sur une demande de titre de séjour, un Etat membre ne met pas en oeuvre le droit de l'Union européenne ;
5. Considérant, en outre, que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux et notamment en l'espèce des éléments tenant à son état de santé ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du droit de l'intéressé à être entendu avant que n'intervienne la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté ;
6. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision contestée que le préfet de la Marne n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de M. B... ;
7. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays " ;
8. Considérant que l'avis émis le 27 juillet 2016 a été signé par M. D... C..., médecin de l'agence régionale de santé du Grand Est ; que ce dernier a été désigné médecin de l'agence régionale de santé de Champagne-Ardenne par une décision du directeur général de l'agence en date du 7 mars 2013 publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de région n° 4 quinquies du 19 avril 2013 ; que, par suite, et alors que le requérant n'établit qu'à la date de l'avis rendu par M. D... C..., la décision précitée du 7 mars 2013 avait été abrogée, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de cet avis doit être écarté ;
9. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé par cet avis du 27 juillet 2016 que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'au vu des informations disponibles, il ne peut avoir accès, dans son pays d'origine à un traitement approprié et que les soins doivent, en l'état actuel, être poursuivis pendant un an ; que cet avis comporte les mentions requises par les dispositions précitées de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 et sont ainsi suffisamment motivés ;
10. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision contestée que le préfet, qui a d'ailleurs estimé que M. B... pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, s'est estimé à tort en situation de compétence liée par l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé ;
11. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
12. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
13. Considérant que le préfet de la Marne, qui n'est pas lié par l'avis du médecin de l'agence régional de santé, a justifié de la possibilité pour M. B... de bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement pharmacologique et d'un suivi psychothérapeutique de son affection en produisant notamment un courriel du conseiller international de la ministre des affaires sociales et de la santé du 25 février 2013 quant à l'accès aux soins psychiatriques au Kosovo et la fiche d'informations sur ce pays établi par l'organisation internationale pour les migrations (OIM) rédigée en 2009 ainsi que d'un document intitulé " MedCOI " II qui mentionne que le Kosovo dispose des infrastructures publiques, du personnel médical et des traitements pharmacologiques pour prendre en charge les maladies psychiatriques ; que le certificat médical du 22 février 2016 établi par le docteur Chemla, produit par M. B..., indiquant que ce dernier a besoin de poursuivre des soins en France et qu'en cas de retour au Kosovo il retrouverait la situation de persécution qui a conduit à sa pathologie, n'est pas suffisant, compte tenu de sa généralité, pour établir qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; que ce certificat médical ne permet pas davantage d'établir, pour le même motif, la réalité du lien entre la pathologie de M. B... et les persécutions qu'il allègue avoir subies ; qu'en outre, M. B... n'établit pas, par les pièces qu'il produit à l'instance, qu'il ne pourrait avoir aucun accès à un traitement pharmacologique et psychiatrique au Kosovo ; qu'enfin, et alors que contrairement à ce qu'il soutient, l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne comporte aucune indication à cet égard, M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas voyager sans risque vers son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
14. Considérant, en septième lieu, qu'aux de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. B... résidait en France depuis seulement près de deux ans et n'établit pas, ainsi qu'il a été dit au point 13, qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, et en l'absence d'autre élément invoqué par le requérant, le moyen tiré de ce que le préfet de la Marne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision quant à la situation personnelle de M. B... doit être écarté ;
16. Considérant, en dernier lieu, que M. B... ne peut utilement invoquer les risques qu'il encourrait en cas de retour au Kosovo à l'appui de sa contestation dirigée contre la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour, qui n'implique pas, par elle-même, l'éloignement de l'intéressé à destination de ce pays ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
17. Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 2 et 3, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;
18. Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de la décision de refus de séjour ; que l'arrêté du préfet mentionne l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, ainsi qu'il a été dit au point 4, la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'un défaut de motivation doit être écarté ;
19. Considérant, en troisième lieu, que si, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union ; qu'ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant ;
20. Considérant, toutefois, qu'il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union ; que ce droit implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
21. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;
22. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la circonstance que le préfet de la Marne n'aurait pas expressément informé M. B... qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité n'est pas de nature à permettre de regarder l'intéressé comme ayant été privé de son droit à être entendu ;
23. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision contestée que le préfet de la Marne n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de M. B... ;
24. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...)10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 13, M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
25. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 15, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste du préfet dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée quant à sa situation personnelle doivent être écartés ;
26. Considérant, en dernier lieu, que M. B... ne peut utilement invoquer les risques qu'il encourrait en cas de retour au Kosovo à l'appui de sa contestation dirigée contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, distincte de celle fixant le pays de destination ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
27. Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 2 et 3, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté ;
28. Considérant, en deuxième lieu, que la décision en litige, après avoir notamment visé l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionné la nationalité kosovare de M. B..., indique que l'intéressé n'établit pas être exposé à la torture ou à des peines, à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine et que sa décision ne contrevient pas à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision contestée comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée ;
29. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance qu'une décision du Conseil d'Etat du 10 octobre 2014 a annulé la liste des pays sûrs établie par le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 16 décembre 2013 en tant qu'elle y avait inscrit la République du Kosovo est sans incidence sur la légalité de la décision contestée prise le 28 octobre 2016 et qui est sans relation avec une telle inscription ;
30. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;
31. Considérant, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision contestée que le préfet de la Marne n'aurait pas procédé à un examen de la situation personnelle de M. B... au regard notamment des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;
32. Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été dit au point 13, M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Kosovo ;
33. Considérant, enfin, que si M. B... soutient qu'il encourt des risques pour son intégrité physique en cas de retour au Kosovo, il n'établit pas le caractère réel, personnel et actuel des risques allégués ; que, par suite, et alors au demeurant que sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 11 février 2016, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
34. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 15, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
35. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
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N° 17NC01959