Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 juin 2016, Mme A...C...épouse D...représentée par la SELARL Berard - Jemoli - Santelli -B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 mai 2016 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 9 décembre 2015 pris à son encontre par le préfet du Bas-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation administrative dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à Me B...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur en considérant qu'elle était de nationalité russe et en fixant la Russie comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2017, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 26 août 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Kohler, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant qu'à la suite du rejet de la demande d'asile présentée par l'intéressée, le préfet du Bas-Rhin a, par arrêté du 9 décembre 2015, refusé de délivrer un titre de séjour à Mme D..., ressortissante géorgienne, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé ; que Mme D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, que le préfet du Bas-Rhin a, par un arrêté du 3 août 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, donné délégation de signature à M. Riguet, secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, " à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents, correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département, ainsi que toutes requêtes, déférés, mémoires, déclinatoires de compétence auprès des différentes juridictions, à l'exception des mesures concernant la défense nationale, des ordres de réquisitions du comptable public et des arrêtés de conflit " ; que cette délégation, qui prévoit des exclusions, n'est ni générale ni absolue ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent " ;qu'aux termes de l'article L. 743-4 du même code : " Sans préjudice des articles L. 556-1 et L. 743-2, lorsque l'étranger sollicitant l'enregistrement d'une demande d'asile a fait l'objet, préalablement à la présentation de sa demande, d'une mesure d'éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n'est pas abrogée par la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. 741-1, ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de l'office, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet, d'irrecevabilité ou de clôture, ou, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile contre une décision de rejet, avant la notification de la décision de la cour " ;
4. Considérant que Mme D...soutient que la délivrance, le 16 décembre 2015, de l'attestation prévue à l'article L. 741-1 lorsqu'elle a présenté une demande de réexamen de sa demande d'asile a nécessairement eu pour effet d'abroger ou de retirer l'arrêté du 9 décembre 2015 ; que toutefois, en application des dispositions de l'article L. 743-4, la délivrance de cette attestation, lorsque l'étranger a, préalablement à la présentation de sa demande d'asile, fait l'objet d'une mesure d'éloignement, n'a pas pour effet d'abroger cette dernière mesure ; qu'en l'espèce, Mme D...a fait l'objet d'un arrêté de refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français par l'arrêté du 9 décembre 2015 soit antérieurement à la délivrance de l'attestation de demande d'asile le 16 décembre 2015 ; que si Mme D...soutient que l'arrêté en litige lui aurait été notifié postérieurement à la délivrance de cette attestation, elle ne produit aucun élément de nature à étayer ses allégations ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
5. Considérant, en troisième lieu, que la seule circonstance qu'elle ait formé une demande de réexamen de sa demande d'asile, alors qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 743-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet ne pourra être mise à exécution avant la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ne suffit pas à établir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant que Mme D...soutient qu'elle réside en France avec son enfant né sur le territoire français en 2014 et que le père de celui-ci est incarcéré à... ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme D...a déclaré être séparée de son époux lors de ses démarches relatives à son séjour en France et qu'elle a été hébergée seule au titre de l'asile ; qu'elle est entrée en France à l'âge de trente ans et n'allègue pas être dépourvue d'attaches notamment familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, eu égard notamment à la brièveté et aux conditions du séjour en France de l'intéressée, l'arrêté en litige n'a pas porté au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que cet arrêté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation familiale ;
8. Considérant, en cinquième lieu, que Mme D...reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, le moyen tiré de l'erreur commise par le préfet dans l'appréciation de sa nationalité ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouse D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin
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N° 16NC01042