Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 novembre 2017, M.C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 août 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour, ou, à défaut, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'auteur de l'arrêté en litige était incompétent pour en être le signataire ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 décembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Di Candia, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité arménienne, né le 25 janvier 1994, est entré en France, selon ses déclarations, le 12 septembre 2016. Après le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) le 16 février 2017, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 11 juillet 2017, le préfet du Haut-Rhin a pris à son encontre, par un arrêté du 21 août 2017, sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours assortie d'une décision fixant le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé. M. C...relève appel du jugement du 20 octobre 2017 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté contesté dans son ensemble :
2. L'arrêté contesté a été signé par M. Christophe Marx, secrétaire général de la préfecture du Haut-Rhin, qui disposait, en vertu d'un arrêté du préfet du Haut-Rhin du 20 septembre 2016, régulièrement publié, le lendemain, au recueil des actes administratifs de la préfecture et produit en appel, d'une délégation à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département. Par conséquent, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est arrivé récemment sur le territoire français, qu'aucun des membres de sa famille qui y sont présents ne dispose d'un titre de séjour sur le territoire français et qu'il n'existe donc aucun obstacle à ce que sa cellule familiale se reconstitue en dehors du territoire national. Le moyen tiré des menaces qu'il dit encourir en cas de retour en Arménie présente un caractère inopérant dès lors qu'une obligation de quitter le territoire français n'implique pas, par elle-même, que la personne concernée soit éloignée à destination d'un pays déterminé. M. C...ne peut en outre utilement se prévaloir de ce que, postérieurement à la décision en litige, le tribunal administratif de Strasbourg a, par jugement du 20 octobre 2017, annulé la seule mesure d'éloignement prise à l'encontre de son épouse. Dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché ses décisions d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
5. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
6. Si M. C...soutient qu'en cas de retour en Arménie, il risquerait d'être exposé à des menaces en raison de sa participation à une manifestation en faveur de Sasna Tser, il ne démontre par la réalité de tels risques en se bornant à faire référence aux récits qui ont été produits à l'occasion de sa demande d'asile devant l'OFPRA et la CNDA, qui a, au demeurant, été rejetée. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait été prise en violation des stipulations et dispositions précitées doit être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais d'instance ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 17NC02842