Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 septembre 2018 et 6 mars 2019, M. A...E..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une autorisation de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêté et de la munir d'un récépissé dans l'attente de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me D...en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ; elle n'a été précédée d'aucun examen particulier quant à l'empêchement à l'éloignement prévu aux dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle a été prise en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu ; l'adoption d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans aucun examen de la situation actuelle du demandeur méconnaît l'article 5 de la directive retour ; elle méconnaît les dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a déposé une demande de titre de séjour pour soins qui a été reçue par les services de la préfecture avant la mise sous pli de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet n'a pas examiné sa situation alors qu'il a sollicité un titre de séjour pour soins et qu'il présente des motifs humanitaires en raisons des craintes persistantes qu'il nourrit en cas de retour en République démocratique du Congo ; elle est illégale dès lors que le préfet n'a pas examiné les éléments relatifs à son état de santé ; elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de la pathologie grave dont il souffre, qui nécessite un suivi médical lourd et un traitement quotidien et auquel il ne peut avoir accès dans son pays d'origine ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de la durée de sa présence en France et de l'impossibilité de retourner dans son pays d'origine ;
- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée d'un examen approprié des risques encourus ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires, enregistrés les 25 janvier 2019 et 8 mars 2019, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la demande de titre de séjour pour raisons de santé est toujours en cours d'instruction ;
- il s'en remet, pour le surplus, à ses écritures de première instance.
M. A...E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 22 août 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la directive n°2008/115/CE ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- et les observations de MeC..., substituant MeD..., représentant M. A...E....
Considérant ce qui suit :
1. M. A...E..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 4 avril 1982, a sollicité l'asile le 2 mai 2017. A la suite du rejet de sa demande, confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 5 février 2018, le préfet de la Loire-Atlantique lui a, par arrêté du 27 mars 2018, fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A...E...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Il relève appel du jugement du 6 juin 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, dans le cas prévu au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation de quitter le territoire français fait suite au constat de ce que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou de ce que celui-ci ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 du même code, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a été entendu dans le cadre du dépôt de sa demande d'asile à l'occasion de laquelle l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...E...ait sollicité, sans réponse, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit prise la décision contestée. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est intervenue en méconnaissance du droit d'être entendu préalablement à une décision administrative défavorable.
3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 de la directive 2008/115/CE n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. M. A...E...ne peut, en tout état de cause, utilement s'en prévaloir dès lors cet article, aux termes duquel " Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte : / a) de l'intérêt supérieur de l'enfant, / b) de la vie familiale, / c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers, / et respectent le principe de non-refoulement. " a été transposé en droit interne.
4. En troisième lieu, alors qu'il est constant que M. A...E...n'a pas fait part aux services préfectoraux, avant l'envoi de la demande de titre de séjour pour raisons de santé qui n'a été reçue que le 29 mars 2018 soit postérieurement à l'adoption de l'arrêté contesté, d'éléments particuliers relatifs à son état de santé, il n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en l'absence d'un examen particulier de sa situation ou d'une insuffisante motivation au regard des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ". A la date de l'arrêté contesté, la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié de M. A...E...avait été définitivement refusée et il n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre que celui de l'asile sans que suffisent les seules circonstances qu'il bénéficiait d'un suivi médical pour lequel il a présenté une demande de titre de séjour reçue le 29 mars 2018, postérieurement à la décision contestée, et qu'il estimait présenter des motifs humanitaires en raison de ses craintes de retour au Congo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En cinquième lieu, en vertu du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français l'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
7. Si M. A...E...justifie suivre un traitement médicamenteux, aucune des pièces produites ne permet d'établir qu'à la date de la décision contestée, le défaut de prise en charge médicale pouvait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il figurait donc au nombre des étrangers qui ne peuvent être éloignés en vertu du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En sixième lieu, M. A...E...est entré en France, selon ses déclarations, en février 2015, à l'âge de 32 ans. Il ne se prévaut d'aucun lien familial ou privé en France. Il n'est pas dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où résident ses deux enfants et où il n'établit pas, faute de justifier de la réalité des menaces qu'il allègue encourir en cas de retour au Congo, qu'il ne pourrait mener une vie familiale normale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté.
9. En dernier lieu, M. A...E...se borne à reprendre en appel, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens tirés de l'insuffisante motivation des décisions contestées, de la méconnaissance des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du défaut d'examen des risques encourus avant l'adoption de la décision fixant le pays de renvoi et de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Malingue, premier conseiller,
- Mme Chollet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 juin 2019.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT03556
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