Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 janvier 2015, la société CET Bouyer-Leroux, représentée par Me A...et MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 décembre 2014 ;
2°) de prononcer la réduction de la cotisation foncière des entreprises contestée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- seul le terrain d'assiette des alvéoles est passible, en application des dispositions du 5° de l'article 1381 du code général des impôts, de la taxe foncière sur les propriétés bâties, une alvéole ne constituant pas un terrain mais un aménagement du terrain au sens juridique et fiscal ;
- étant un aménagement amortissable apporté au terrain, les alvéoles ne relèvent pas de ces dispositions ainsi que le prévoient les paragraphes 90 et 130 de la documentation administrative BOI-IF-TFB-20-10-50-10 et le paragraphe 30 de la documentation administrative BOI-IF-TFB-20-10-50-30 ;
- en écartant l'interprétation administrative de la loi résultant de cette documentation sans se prononcer sur la qualification des installations que constituent les équipements des alvéoles au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts, le tribunal a commis une erreur de droit ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de cette qualification des équipements ;
- selon le paragraphe 170 de de la documentation administrative BOI-IF-TFB-10-50-30, ces équipements sont des outillages et des moyens matériels d'exploitation au sens du 11° de l'article 1382 du code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que la société CET Bouyer-Leroux relève appel du jugement du 5 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 au titre du centre de stockage de déchets ultimes qu'elle exploite sur le territoire de la commune de La Séguinière ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de l'absence d'application aux éléments d'exploitation utilisés par la société requérante pour son activité de production de biogaz de l'exonération prévue par le 11° de l'article 1382 du code général des impôts, qui n'était pas inopérant ; que l'insuffisance de motivation dont le jugement se trouve ainsi entaché le rend irrégulier ; qu'il doit, dès lors, être annulé ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par la société CET Bouyer-Leroux devant le tribunal administratif de Nantes ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 1382 du code général des impôts : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° (...) de l'article 1381 " ; qu'aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation (...) / 5° Les terrains non cultivés employés à un usage (...) industriel " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le centre de stockage des déchets ultimes que la société CET Bouyer-Leroux exploite sur le territoire de la commune de La Seguinière est composé de fosses aménagées dans la terre dénommées " alvéoles d'enfouissement " ; que celles-ci, qui ne comportent aucune construction métallique ou maçonnée, sont constituées pour l'essentiel d'un lit de graviers drainants surmonté d'une couche d'argile et de terre, étanchéifié par membranes et comportant des drains de captage des lixiviats et des biogaz qui sont ensuite traités ou éliminés ; qu'une fois comblées, ces alvéoles sont recouvertes d'une couche de terre étanche puis plantées de végétaux ; que ces alvéoles et les éléments techniques qui y sont intégrés, qui ne sont pas des ouvrages en maçonnerie et ne sont destinés ni à abriter des biens ni à stocker des produits, mais ont pour objet de favoriser la transformation par décomposition et méthanisation des déchets qui y sont enfouis, doivent dès lors être regardées comme un terrain non cultivé employé à un usage industriel au sens des dispositions précitées du 5° de l'article 1381 du code général des impôts ;
6. Considérant qu'il résulte de la nature de terrain non cultivé employé à un usage industriel des alvéoles qu'elles ne constituent pas des outillages ou des installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels au sens des dispositions précitées du 11° de l'article 1382 du code général des impôts ; que, dès lors, elles n'entrent pas dans le champ d'application de l'exonération que ces dispositions prévoient ;
7. Considérant que si la société se prévaut de l'utilisation des alvéoles dans l'activité de production de biogaz qu'elle exerce accessoirement depuis 2010, il résulte de l'instruction que le refus d'exonération en litige a porté sur des éléments tels que les travaux de creusement des alvéoles, les membranes étanches, les drains destinés à l'évacuation des lixiviats et les torchères, principalement utilisés dans le cadre de l'activité de stockage des déchets et non dans celui de l'activité de production de biogaz ;
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi :
8. Considérant que le régime fiscal des alvéoles utilisées par la société CET Bouyer-Leroux est fixé par le 5° de l'article 1381 du code général des impôts et non par le 11° de l'article 1382 du même code ; qu'il suit de là qu'elle n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 160 et 170 de l'instruction BOI-IF-TFB-10-50-30 du 12 septembre 2012, du paragraphe 30 et d'un paragraphe 90 de l'instruction BOI-IF-TFB- 20-10-50-30 du 12 décembre 2012 dans sa rédaction à cette date ni, en tout état de cause, s'agissant de l'activité de production de biogaz, du paragraphe 1 de l'instruction 6 C-124 du 15 décembre 1988 ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société CET Bouyer-Leroux n'est pas fondée à demander la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société CET Bouyer-Leroux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 décembre 2014 est annulé.
Article 2 : La demande de la société CET Bouyer-Leroux tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 présentée devant le tribunal administratif de Nantes et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CET Bouyer-Leroux et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 25 février 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 mars 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00254 2
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