Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er mars 2018, M. D...A..., représenté par Me C...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " étudiant " dans ce même délai et, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé valant autorisation de séjour le temps de la production du titre ou de son réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il a quitté la Guinée en 2015, que ses parents sont décédés en 2005 et 2012, que son oncle ne l'a jamais pris en charge et qu'il est bien inséré dans la société française ; elle méconnaît les dispositions de l'article L 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de séjour.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 janvier 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- et les observations de Me C...B..., représentant M.A....
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant guinéen, relève appel du jugement du 4 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique lui a implicitement refusé la délivrance d'un titre de séjour et de l'arrêté du 1er juin 2017 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
2. En premier lieu, l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans (...).". L'article L. 111-6 du même code prévoit, en son premier alinéa, que la vérification de tout acte civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Ce dernier article dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.
3. La demande de titre de séjour présentée par M. A...sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été rejetée au seul motif que son état civil ne pouvait être établi de manière probante dès lors que la totalité des documents civils qu'il a présentés, à l'exception de l'acte de décès de son père, sont inexistants et donc considérés comme apocryphes. Si M. A...soutient que l'extrait d'acte de naissance du 24 avril 2015 et le jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance n° 10568 du 21 avril 2015 ont donné lieu à un avis favorable du 26 mai 2015 émis par le brigadier analyste en fraude documentaire de la direction départementale de la police aux frontières de Loire-Atlantique, il ressort de cet avis que son caractère favorable résultait du respect de la " légalisation " de l'acte, soit du respect de certaines obligations formelles et non du respect des conditions de fond de sa délivrance. Par ailleurs, la réponse des autorités guinéennes transmise à l'ambassade de France en Guinée du 14 mars 2017, qui lui est postérieure, mentionne qu'elles n'ont pas retrouvé de trace de ce jugement supplétif. La circonstance que cette réponse comporte une erreur au niveau du numéro de transcription de ce jugement supplétif, à savoir 224 au lieu de 2240, ne saurait nécessairement révéler, contrairement à ce que soutient le requérant, que les services de la préfecture ont saisi les autorités guinéennes de références erronées. Dans ces conditions, la force probante de l'acte de naissance et du jugement supplétif n'est pas établie et le requérant, qui ne peut en l'espèce justifier de son état civil par la seule production de sa carte consulaire, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a estimé que son état civil, impliquant la condition d'âge induite par les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'était pas établi.
4. En deuxième lieu, M. A...est entré en France, selon ses déclarations, en mai 2015. Une tutelle a été ouverte à son bénéfice par ordonnance du 26 juin 2015 du juge des tutelles du tribunal de grande instance de Nantes et confiée au conseil général de la Loire Atlantique qui l'a pris en charge dans le cadre d'un contrat de soutien à l'autonomie des jeunes. Il a suivi le dispositif " Mission de lutte contre le décrochage scolaire " avant d'intégrer, à la rentrée scolaire 2016-2017, une seconde professionnelle en logistique. Célibataire, il ne se prévaut d'aucun lien familial ou privé en France tandis qu'il n'est pas dépourvu de toutes attaches en Guinée où réside notamment son oncle. Dans ces conditions, en dépit de ses efforts de formation et d'insertion, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts pour lesquels elle a été prise. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, doivent être écartés les moyens tirés de ce que la décision de refus de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celui selon lequel la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
5. En troisième lieu, la décision de refus de séjour n'étant pas annulée, M. A...n'est pas fondé à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi doivent l'être par voie de conséquence.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes. Par conséquent, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT00939
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