Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 mars 2018, Mme A...B..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros.
Elle soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle ne peut bénéficier des soins et de la surveillance nécessaire à sa pathologie au Kosovo ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de ses attaches familiales en France, de son absence de lien au Kosovo et de son parcours scolaire exemplaire ;
- elle ne peut faire l'objet d'une mesure d'éloignement compte tenu de l'absence de traitement approprié à sa pathologie au Kosovo ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de la situation d'isolement dans laquelle elle se trouverait au Kosovo et des risques de persécution qu'elle encourt.
Par un mémoire, enregistré le 13 juin 2018, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens présentés ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- et les observations de MeC..., représentant MmeB....
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante kosovare, relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 novembre 2017 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur l'existence d'un traitement approprié à la pathologie de Mme B...dans son pays d'origine :
2. D'une part, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable, prévoit que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. D'autre part, en vertu du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français l'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
4. Mme B...souffre d'une tumeur bénigne à cellules géantes agressive du type 2 du tibia proximal à gauche, qui nécessite une surveillance régulière à long terme en centre spécialisé. Par un avis du 21 septembre 2017, le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Le préfet de Maine-et-Loire a refusé de délivrer à la requérante le titre de séjour qu'elle sollicitait au motif qu'il existe un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine.
5. Il ressort des pièces du dossier que la pathologie de la requérante a nécessité en 2012 une intervention chirurgicale consistant en un curetage et comblement par ciment renforcé par une plaque interne, qui a été pratiquée en Macédoine en l'absence de prise en charge possible de cette opération au Kosovo. Si la requérante déduit notamment de ce précédent qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement adapté à sa pathologie dans son pays d'origine, les certificats médicaux qu'elle produit confirment la nécessité d'un suivi spécialisé afin de dépister de manière précoce une éventuelle récidive locale mais ne mettent en évidence aucun recours à une opération chirurgicale de manière certaine et à court terme. Aucune des pièces produites ne contredit, par ailleurs, l'avis du collège de médecins aux termes duquel ce suivi spécialisé est disponible au Kosovo. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'autorité administrative a estimé que Mme B...ne remplissait pas l'ensemble des conditions prévues par les dispositions rappelées aux points 2 et 3 du présent arrêt.
Sur l'atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale :
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée, selon ses déclarations, en France le 15 juillet 2013. Après la confirmation du rejet de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile le 20 mars 2015, elle a sollicité un titre de séjour pour raisons de santé. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 5, son état de santé ne rend pas sa présence en France indispensable. Elle est célibataire et sans enfant. Si elle se prévaut de la présence sur le territoire français de sa mère, de deux soeurs et de deux frères, aucun d'entre eux ne réside en France sous couvert d'un titre de séjour, de sorte qu'ils n'ont pas nécessairement vocation à y demeurer. Par ailleurs, elle ne fait état d'aucun autre lien familial ou privé ou d'une intégration particulière. Enfin, si elle soutient être isolée au Kosovo dès lors que son père réside en Albanie, elle ne l'établit pas et ne justifie pas, alors qu'elle a déclaré en mars 2017 qu'il vivait au Kosovo, qu'il aurait quitté ce pays. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté qu'elle conteste porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard aux buts dans lesquels il a été pris, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
7. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point précédent, rien n'établit que Mme B...serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine.
8. D'autre part, si elle indique qu'elle encourt des risques de persécution en cas de retour dans son pays d'origine, elle ne produit aucun document probant justifiant de la réalité des craintes, que la Cour nationale du droit d'asile n'a au demeurant pas tenu pour établies, qu'elle allègue.
9. Par conséquent, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en vertu desquelles nul ne peut être soumis à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
2
N°18NT01315
1