Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 décembre 2016 et 3 février 2017, la SA Entreprise de Travaux Publics de l'Ouest, représentée par la Selarl Artlex IV, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'au regard des dispositions du IV de l'article 256 du code général des impôts et de l'article 6 de la directive TVA 67/227/CEE ainsi que de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne, du Conseil d'Etat et de l'instruction n°60 BOI 3 B-1-02 du 27 mars 2002, il n'existe aucun lien direct entre l'indemnité d'un montant de 485 189,19 euros qu'elle a perçue et un service rendu à Nantes Metropole, de sorte que l'indemnité n'est pas passible de taxe sur la valeur ajoutée ; les éléments factuels sont suffisants pour établir le caractère indemnitaire de la somme perçue réparant un préjudice commercial courant, sans qu'il y ait lieu de rechercher l'intention de la société de redéployer ses moyens de production ; la somme perçue avait pour vocation exclusive de réparer le préjudice commercial du fait de l'ajournement du chantier lié à des coûts liés à la prolongation des frais de direction, des coûts liés à l'immobilisation du matériel et des coûts liés à l'immobilisation des moyens humains, coûts dont les parties au contrat étaient convenues d'une indemnisation au sein d'une clause insérée dans l'avenant n°2 au marché de travaux publics.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2017, le ministre chargé des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la SA Entreprise de Travaux Publics de l'Ouest ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour la SA Entreprise de Travaux Publics de l'Ouest.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 dont la société anonyme (SA) Entreprise de travaux publics de l'Ouest (ETPO), entreprise spécialisée en génie civil, a fait l'objet, l'administration fiscale a, par proposition de rectification du 11 juin 2013, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée une indemnité d'un montant de 485 189,19 euros versée en 2011 par la communauté d'agglomération Nantes Métropole dans le cadre d'un marché public de travaux conclu le 13 août 2008 en vue de la réalisation d'un pont à Nantes. Au terme de la procédure contradictoire, ce rappel a été mis en recouvrement le 16 décembre 2013 pour des montants de 79 513 euros en droits et 5 725 euros en intérêts de retard. Après le rejet, par décision du 11 février 2014, de sa réclamation préalable, la société a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes la décharge de cette imposition. Elle relève appel du jugement du 6 octobre 2016 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
2. L'article 256 du code général des impôts dispose que : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Il résulte de ces dispositions que le versement d'une somme par un débiteur à son créancier ne peut être regardé comme la contrepartie d'une prestation de services entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée qu'à la condition qu'il existe un lien direct entre ce versement et une prestation individualisable.
3. Par un avenant signé le 21 juin 2011 au marché public de travaux conclu le 13 août 2008, Nantes Métropole, maître d'ouvrage, a versé à la SA ETPO des rémunérations complémentaires au nombre desquelles figure une indemnisation pour le lot technique n°1 de 485 189,19 euros correspondant, conformément au tableau annexé à cet avenant, aux coûts liés à la prolongation des frais de direction de travaux et aux immobilisations du matériel et des moyens humains de la société. Cette somme vise à couvrir les charges engagées lors de l'interruption du chantier rendue nécessaire par la découverte de sols de moins bonne qualité que prévue et les travaux supplémentaires en découlant. Alors même qu'il n'existait pas de clause contractuelle dans le marché initial relative à l'interruption de chantier ou à une réservation des moyens de production de la SA ETPO par Nantes Métropole, cette indemnité ne constitue pas la compensation d'un préjudice mais la contrepartie directe et la rémunération, selon les modalités dont les parties sont convenues postérieurement à sa réalisation, d'une prestation de services individualisable rendue à Nantes Métropole qui a consisté à maintenir disponible les moyens techniques et humains, prestation indissociable de la poursuite de l'exécution du contrat initial. Cette somme constitue donc une prestation de services à titre onéreux au sens des dispositions du I de l'article 256 du code général des impôts et doit être, dès lors, assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée.
4. La société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de l'instruction n° 60 3 B-1-02 du 27 mars 2002 qui ne comporte pas une interprétation de la loi différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la SA ETPO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA ETPO est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Entreprise de Travaux Publics de l'Ouest et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 5 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 avril 2018.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT03882 2
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