1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 28 avril 2017 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à Me C..., en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée et n'a pas été précédée de l'examen particulier de leur situation ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 411-5 et R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la préfète a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2020, la préfète de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'elle s'en rapporte à ses écritures de première instance et que les pièces produites en appel par le requérant sont postérieures à la décision contestée.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant marocain né le 22 octobre 1971, est entré en France en 2002. Titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 23 juin 2018, il s'est marié, le 29 août 2013, avec Mme B..., une compatriote née le 8 juin 1978. De leur union est née le 20 janvier 2015 l'enfant A... E.... Le 12 juillet 2016, M. E... a formé une demande de regroupement familial en faveur de son épouse et de leur fille auprès de la préfète de la Loire-Atlantique. Cette demande a été rejetée par une décision du 24 mars 2017. Saisi d'un recours gracieux le 4 avril 2017, la préfète a rejeté ce recours le 28 avril suivant. M. E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces deux décisions. Par un jugement du 16 octobre 2019, le tribunal a rejeté sa demande. M. E... fait appel de ce jugement.
2. En premier lieu, il résulte de la motivation des décisions contestées que la préfète de la Loire-Atlantique a pris en compte " l'ensemble des éléments " du dossier de M. E... et l'existence de l'épouse et de l'enfant de M. E.... Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation s'agissant de sa vie familiale et le moyen tiré du défaut d'examen de l'intérêt supérieur de l'enfant de M. E... ne peuvent qu'être écartés.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 ou L. 821-2 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code ou lorsqu'une personne âgée de plus de soixante-cinq ans et résidant régulièrement en France depuis au moins vingt-cinq ans demande le regroupement familial pour son conjoint et justifie d'une durée de mariage d'au moins dix ans ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; - cette moyenne majorée d'un cinquième pour une famille de six personnes ou plus ". Enfin, il résulte des dispositions de l'article R. 421-4 de ce code que les ressources du demandeur sont appréciées sur la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a perçu sur la période de juillet 2015 à juin 2016 un revenu annuel brut d'un montant de 16 328,88 euros, soit environ 1 361 euros par mois, alors que la moyenne mensuelle brute du salaire minimum de croissance s'élevait au cours de cette période à la somme de 1 466,62 euros. M. E... ne conteste pas que ses revenus étaient, pendant la période de référence, inférieurs au salaire minimum de croissance mais soutient qu'il convenait de tenir compte de sa situation particulière, dès lors qu'il a été victime d'un accident du travail le 29 juin 2015 et qu'il n'a donc pas pu travailler davantage pour augmenter ses revenus. Toutefois, malgré cette circonstance, la préfète de la Loire-Atlantique a pu légalement refuser sa demande de regroupement familial au motif qu'il ne justifiait pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
6. M. E... a produit des transferts d'argent pour l'essentiel postérieurs aux décisions contestées et des relevés d'appels sur l'application " Whatsapp " dont l'année n'est pas même mentionnée. Dès lors, les éléments produits ne suffisent pas à établir la réalité et l'intensité des liens qu'il aurait avec les membres de sa famille séjournant au Maroc, en particulier son épouse et leur fille, dont il a toujours vécu séparé. En outre, il n'invoque aucun élément de nature à faire obstacle à ce qu'il puisse leur rendre visite. Dans ces conditions, les décisions contestées n'ont pas porté à son droit de mener une vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En quatrième et dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. Comme il a été dit au point 6, M. E... ne produit aucun élément de nature à établir, à la date des décisions litigieuses, l'intensité des liens qu'il aurait noués avec son épouse et leur enfant dont il a toujours vécu séparé, alors que ces dernières résident au Maroc. De plus, et ainsi qu'il a été dit au point 4, l'intéressé ne justifiait pas de ressources suffisamment stables lui permettant d'accueillir son épouse et leur fille dans des conditions décentes. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme F..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 22 octobre 2020.
Le rapporteur,
P. F...
Le président,
F. Bataille
La greffière,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04946