1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et dans l'attente de ce réexamen, de la munir d'un récépissé de demande de titre ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à Me D... en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique.
Elle soutient que :
Sur la décision portant refus de séjour :
- il n'est pas établi que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ait été rendu au terme d'une délibération, que ces médecins étaient compétents et que leurs signatures présentaient les garanties de signatures authentiques ;
- elle méconnaît les 5° et 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision n'est pas suffisamment motivée ;
- la décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision n'est pas suffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen de sa situation ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du même code et est entachée d'un défaut d'examen au regard de cet article ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 mai 2020 et 5 octobre 2020, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance et que, s'agissant du refus de séjour, les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure et de la méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 26 octobre 2020 à 12 heures.
Un mémoire, enregistré le 26 octobre 2020 à 12 heures 12, soit après la clôture de l'instruction, présenté pour la requérante, représentée par Me D..., n'a pas été communiqué.
Une pièce complémentaire, enregistrée le 12 novembre 2020 à 9 heures 20, a été présentée pour Mme E....
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les observations de Me C... substituant Me D..., représentant la requérante.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., ressortissante algérienne née le 15 mai 1969, déclare avoir quitté l'Algérie le 7 décembre 2015 pour l'Italie, dont les autorités lui avaient délivré un visa d'entrée de court séjour, puis est entrée en France le 10 décembre suivant. Elle y a sollicité le 13 avril 2017 la délivrance d'un titre de séjour pour raisons de santé. Par un arrêté du 25 mai 2018, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre un refus de titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. L'intéressée a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 27 septembre 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Mme E... fait appel de ce jugement.
Sur le refus de certificat de résidence :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". En vertu de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens, le préfet délivre le titre de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Aux termes de l'article R. 313-23 de ce même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. Lorsque le demandeur n'a pas présenté au médecin de l'office ou au collège les documents justifiant son identité, n'a pas produit les examens complémentaires qui lui ont été demandés ou n'a pas répondu à la convocation du médecin de l'office ou du collège qui lui a été adressée, l'avis le constate (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
3. En premier lieu, lorsque l'avis médical porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du 1er avril 2018 concernant Mme E..., signé par les trois médecins composant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ". Pour contester la régularité de cet avis, la requérante a produit une capture d'écran tirée du logiciel de traitement informatique Themis faisant apparaître des mentions " donner avis " à des dates et heures différentes pour chacun des trois médecins. Ces mentions, compte tenu de leur caractère équivoque, ne sauraient constituer la preuve contraire quant au caractère collégial de l'avis. Par suite, et sans qu'il soit besoin de solliciter l'administration pour que soient communiqués les extraits du logiciel de traitement informatique Themis, Mme E... n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie tirée du débat collégial du collège de médecins de l'OFII qui résulte des dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, il ressort de la décision du directeur général de l'OFII du 1er février 2018, modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'OFII, que les docteurs Amoussou, Lancino et Joseph avaient compétence pour siéger au sein de ce collège. Par suite, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que ces médecins n'ont pas été régulièrement nommés par le directeur général de l'OFII.
6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les signatures des médecins du collège de l'OFII ne seraient pas authentiques et les tampons apposés permettent d'identifier les signataires.
7. En quatrième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un certificat de résidence. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'accès effectif ou non à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un certificat de résidence dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
8. Dans son avis du 1er avril 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que si l'état de santé de Mme E... nécessite une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
9. Il ressort des pièces du dossier que la requérante souffre d'une paralysie faciale périphérique, entraînant de l'anxiété et des douleurs cervicales, d'une cécité congénitale, pour laquelle la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la Loire-Atlantique lui a reconnu un taux d'incapacité entre 80 et 95 %, et d'asthme. Toutefois, les ordonnances et les certificats attestant d'un suivi médical de l'intéressée n'établissent pas que le défaut d'une telle prise en charge entraînerait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, Mme E... ne produisant aucun élément attestant d'un suivi médical de sa cécité. D'ailleurs, elle reconnaît elle-même que seule une prise en charge rapide et précoce de la cécité, lorsqu'elle résidait en Algérie, aurait permis de limiter les complications et l'aggravation des déficiences. Dans ces conditions, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas fait une inexacte application des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
10. En dernier lieu, Mme E..., alors âgée de quarante-six ans, est entrée en France le 10 décembre 2015, Si elle soutient que des membres de sa famille résident en France et l'aident quotidiennement, elle ne l'établit pas. Elle ne démontre pas davantage, alors même que ses parents sont décédés, être dépourvue de liens dans son pays d'origine. Enfin, elle ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française et, comme il a été dit au point 9, en tout état de cause, il n'est pas établi que le défaut de prise en charge médicale entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de certificat de résidence méconnaît les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
13. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
14. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination, ainsi que les moyens tirés du défaut d'examen particulier de la situation de la requérante et de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
15. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
16. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays que s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
17. Si la requérante soutient que la décision contestée aurait pour conséquence de la soumettre à des traitements inhumains et dégradants, en raison des pathologies qui ne seraient pas prises en charge en Algérie, il résulte de ce qui a été dit au point 9 que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a rejeté, par le jugement attaqué, sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. Brasnu, premier conseiller,
- Mme B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2020.
Le rapporteur,
P. B...
Le président,
J-E. Geffray
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT05030