Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 janvier 2018 et 14 mai 2018, la SAS Alliance Négoce, représentée par Me A...et Lefevre, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale a méconnu l'intention du législateur exprimée dans les rapports de présentation du projet de loi de finances rectificative pour 2012 en refusant de lui accorder l'agrément qu'elle sollicitait dès lors que l'opération de fusion-absorption de la société Agri 37 n'a pas eu pour objet le transfert de ses déficits fiscaux à des fins d'optimisation fiscale ;
- elle remplit les conditions prévues au b du II de l'article 209 du code général des impôts, telles que précisées par le paragraphe 160 du BOI-SJ-AGR-20-30-10-10, dès lors que l'activité a pleinement conservé son identité malgré sa réorganisation opérationnelle pendant la période au titre de laquelle les déficits ont été constatés ; le critère d'appréciation de l'emploi ne peut être analysé d'un seul point de vue quantitatif ; il en va de même s'agissant des moyens d'exploitation ; en se fondant sur les critères relatifs à l'emploi et aux immobilisations corporelles sans prendre en compte la réorganisation opérationnelle et la nature et le volume d'activité, l'administration et le tribunal administratif ont méconnu les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts.
Par des mémoires, enregistrés les 23 mars 2018 et 10 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la SAS Alliance Négoce.
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre de l'opération de fusion-absorption de la société Agri 37 par la société par actions simplifiée (SAS) Echivard devenue Alliance Négoce, cette dernière a sollicité le 2 décembre 2015 la délivrance de l'agrément prévu par les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts afin de lui permettre de transférer le déficit reportable de 263 311 euros de la société Agri 37. Cette demande a été rejetée par décision du 14 novembre 2016 du directeur régional des finances publiques du Centre Val-de-Loire. La SAS Alliance Négoce relève appel du jugement du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. Les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable, prévoient que : " En cas de fusion ou opération assimilée placée sous le régime de l'article 210 A, les déficits antérieurs (...) non encore déduits par la société absorbée ou apporteuse sont transférés, sous réserve d'un agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, à la ou aux sociétés bénéficiaires des apports, et imputables sur ses ou leurs bénéfices ultérieurs dans les conditions prévues respectivement au troisième alinéa du I et au sixième alinéa du 1 du II de l'article 212. (...) L'agrément est délivré lorsque : (...) / b) L'activité à l'origine des déficits ou des intérêts dont le transfert est demandé n'a pas fait l'objet par la société absorbée ou apporteuse, pendant la période au titre de laquelle ces déficits et ces intérêts ont été constatés, de changement significatif, notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en oeuvre, de nature et de volume d'activité ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que la condition qu'elles énoncent tient à ce qu'examinée pour elle-même, l'activité transférée à la société absorbante n'ait pas fait l'objet de changements significatifs pendant la période au titre de laquelle ont été constatés les déficits dont le transfert est demandé. Pour évaluer si l'activité transférée a subi un changement significatif avant l'absorption, ne peuvent donc être pris en compte des éléments relatifs à une autre activité que celle à l'origine de ces déficits.
3. D'une part, les dispositions citées au point 2 du présent arrêt définissent de manière précise et sans ambiguïté la condition tenant à l'absence de changement significatif dans l'activité transférée à l'origine des déficits pendant la période de constatation de ces déficits, sans qu'il soit nécessaire de se référer aux travaux parlementaires pour les interpréter. La société requérante ne peut dès lors utilement invoquer l'intention du législateur pour soutenir que l'agrément prévu par les dispositions du II de l'article 209 du code général des impôts ne saurait être refusé qu'aux entreprises réalisant des opérations de fusion-absorption avec transfert de déficits à des fins d'optimisation fiscale.
4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la société Agri 37 exerçait une activité d'achat-vente de produits agricoles et de produits agrofournitures. Il est constant qu'entre l'exercice clos en 2010, au cours duquel a été enregistré le déficit de 605 757 euros à l'origine duquel se trouve le déficit reportable de 263 311 euros pour lequel l'agrément est sollicité, et le dernier exercice avant l'absorption, la société a perdu l'intégralité de son effectif de 10 salariés au profit du recours à du personnel extérieur à l'établissement et que son actif brut corporel a été réduit de 65 % après la cession d'installations techniques, matériel et outillages industriels et de matériel de transport, traduisant notamment la suppression totale de la flotte de camions du fait de l'externalisation de l'activité de transport. Ainsi, quand bien même la société a exercé sur la période considérée son activité d'achat-revente en maintenant son volume d'activité et son chiffre d'affaires, ces modifications suffisent à caractériser un changement significatif d'activité pendant la période de constatation des déficits de nature à faire obstacle à l'octroi de la délivrance de l'agrément prévu les dispositions citées au point 2 du présent arrêt.
5. Il résulte de ce qui précède que la SAS Alliance Négoce n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 14 novembre 2016. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Alliance Négoce est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Alliance Négoce et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT00189
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