Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 janvier 2018, M.C..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 novembre 2017 ;
2°) de condamner la commune des Sables d'Olonne à lui verser la somme de 784 640 euros, avec intérêts au taux légal à compter de sa réclamation préalable et capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la commune des Sables d'Olonne le versement à son profit d'une somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance était recevable ;
- la décision de résiliation du contrat de concession a été prise par une autorité incompétente pour ce faire ;
- l'article 4 du contrat ne prévoit pas la résolution du contrat, qui ne peut intervenir de plein droit que dans le cas d'une clause non équivoque sur ce point et sans mise en demeure préalable du cocontractant, mais seulement sa résiliation sans indemnité, qui ne peut avoir d'effet que pour l'avenir et qu'après mise en demeure du cocontractant restée infructueuse, laquelle n'a pas été mise en ouvre en l'espèce ;
- la condition permettant la résolution du contrat n'était en toute hypothèse pas réalisée ;
- il est fondé à obtenir une indemnisation de la perte de chance sérieuse et du manque à gagner imputables à la faute de service de la commune des Sables d'Olonne.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2018, la commune des Sables d'Olonne, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C...une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête de M.C..., qui ne peut valablement se prévaloir, en sa qualité de tiers au contrat liant la société Docks Services et la commune, de la méconnaissance des stipulations contractuelles, est irrecevable, et qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Besse, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour la commune des Sables d'Olonne.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., propriétaire d'un brevet relatif à un système automatisé de sortie, de stockage et de mise à l'eau des bateaux de plaisance, a conclu le 29 juillet 2011 avec la société Docks Services, dont il était le président, un contrat de licence habilitant cette seule société à développer et commercialiser son brevet moyennant le versement d'une redevance correspondant à 4% du chiffre d'affaires annuel engendré par l'exploitation du brevet. M. C...a en outre conclu le même jour un contrat de licence avec la société SOFID, bureau d'études spécialisé dans le domaine de l'aménagement portuaire, dont il était le gérant, confiant à cette société l'exclusivité pour exploiter le brevet en ce qui concerne les " études de conception et de maîtrise d'oeuvre " moyennant le versement d'une redevance d'exploitation forfaitaire de 50 000 euros à chaque marché passé avec un client. Par un contrat de concession conclu le 12 août 2013, la commune des Sables d'Olonne a confié à la société Docks Services le financement, la conception, la réalisation, l'exploitation et la maintenance d'un port à sec automatisé sur le site de la Cabaude, permettant le stockage, la mise à l'eau et la mise hors de l'eau d'environ 600 bateaux de plaisance et reposant sur la mise en oeuvre du brevet déposé par M.C.... Par un courrier du 11 avril 2014, le maire de la commune a informé la société Docks Services de ce que, en application de l'article 4 du contrat de concession, le contrat était résilié au motif que plus de sept mois et demi après sa signature, cette société ne disposait pas de la totalité du financement de l'opération faute d'avoir trouvé l'apport en fonds propres nécessaire. Par deux courriers du 19 octobre 2015, M. C...d'une part et la société SOFID d'autre part ont chacun adressé à la commune des Sables d'Olonne une demande tendant au versement d'une indemnité, respectivement de 784 640 euros et de 189 300 euros, au titre des préjudices qu'ils estiment l'un et l'autre avoir subi du fait de la résiliation du contrat conclu entre la commune et la société Docks Services. Par deux courriers du 9 décembre 2015, le maire des Sables d'Olonne a refusé de faire droit à ces demandes. M. C...relève appel du jugement n° 1600468 - 1600469 du 29 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune des Sables d'Olonne à lui verser une indemnité de 784 640 euros, et demande à la cour de condamner la commune à lui verser la même somme au titre du manque à gagner résultant pour lui de la résiliation du contrat liant la société Docks Services et la commune et de la perte de chance de percevoir la redevance d'exploitation de son brevet pendant la durée de la concession.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 4 de la convention conclue le 12 août 2013 par la commune des Sables d'Olonne et la société Dock Services : " Durée et conditions résolutoires : (...) La présente convention est consentie sous les conditions résolutoires suivantes : - l'introduction d'un recours dirigé contre la présente convention, ou tout acte s'y rattachant, - la non délivrance dans un délai de dix huit (18) mois, à compter de la notification de la présente convention, du permis de construire définitif, et de toute autre autorisation ou déclaration administrative (loi sur l'eau etc) nécessaire à la construction et l'exploitation de l'ensemble des ouvrages des deux phases visés à l'annexe n° 4, c'est-à-dire purgés de tous recours ainsi que de retrait administratif. / Pour l'une ou l'autre de ces hypothèses, la partie concernée en informe sans délai l'autre partie et lui communique l'ensemble des éléments faisant obstacle à la levée de la condition résolutoire. Les parties se réuniront dans les meilleurs délais afin de déterminer les conséquences juridiques et financières de l'événement sur la poursuite de leurs relations contractuelles. / A défaut d'accord sur la poursuite des relations contractuelles dans un délai de trois mois à compter de la survenance de l'un de ces évènements, la Ville disposera seule de la faculté de procéder unilatéralement à la résiliation de la présente convention. Elle en avisera le Concessionnaire par courrier recommandé avec accusé de réception, dans le délai de trois mois précité. / A défaut de résiliation, la Ville supportera seule les conséquences directes et indirectes de sa décision de poursuivre le présent Contrat. / En cas de mise en oeuvre de la faculté de résiliation, le Concessionnaire sera indemnisé par la Ville dans les conditions suivantes, dans la mesure où l'événement en cause ne trouve pas son origine dans une erreur, faute ou négligence du Concessionnaire. Si tel était le cas, il sera fait application des dispositions de l'article 41 (déchéance) (...). / D'autre part, le Concessionnaire a sollicité pour la première phase de construction un financement bancaire dont les conditions essentielles sont les suivantes : - Montant = 5,9 million d'euros (80% de 7,4 MHT pour la première phase de deux halls), - Durée = 15 ou 16 années, - Taux = 4,5% avec assurance, - 20 % du montant de l'investissement total soit 1,5 MHT sous la forme d'apport du Concessionnaire, - Garantie de la Ville à hauteur de 50% du prêt (soit 2,95 M) assortie d'une précommercialisation à hauteur de 146 places de bateaux de 7,50 mètres de moyenne avant le démarrage des travaux. Si le Concessionnaire n'a pas trouvé l'apport nécessaire dans les 6 mois à compter de la signature du présent contrat, celui-ci sera résilié sans qu'aucune indemnisation ne puisse être demandée à la Ville par le Concessionnaire. ". Il résulte du dernier alinéa de ces stipulations qu'à défaut pour le concessionnaire de justifier, dans les six mois à compter de la signature de la convention de concession, soit au plus tard le 12 février 2014, disposer d'un apport propre correspondant à 20 % du montant total du financement nécessaire à l'opération, soit 1,5 million d'euros HT, la convention serait résiliée de plein droit, sans que cette résiliation n'ouvre droit à indemnisation.
3. Mais les tiers à un contrat administratif, hormis les clauses règlementaires, ne peuvent en principe se prévaloir des stipulations de ce contrat. Dès lors, la qualité de tiers au contrat de concession du 12 août 2013 de M. C...fait obstacle à ce que ce dernier se prévale de l'application erronée des stipulations précitées de l'article 4 de ce contrat, lequel ne peut être regardé comme comportant une stipulation pour autrui dont le requérant aurait pu se prévaloir du seul fait que l'exploitation portuaire concédée reposait sur le brevet lui appartenant.
4. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 29 novembre 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune des Sables d'Olonne, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. C...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, M. C...étant aujourd'hui décédé, aucune somme ne peut être mise à sa charge sur ce même fondement, alors même que l'affaire est en état d'être jugée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune des Sables d'Olonne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux ayants droit de M. C...et à la commune des Sables d'Olonne.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 janvier 2019.
Le rapporteur,
P. BesseLe président,
L. Lainé
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au préfet de la Vendée en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00307